Le conseil de sécurité de l’ONU prêt à voter pour Alep
Le conseil de sécurité de l’ONU prêt à voter pour Alep
Le Monde.fr avec AFP
Un nouveau projet de résolution est soutenu par la France et menacé du veto russe. Il sera mis au vote ce lundi.
Une manifestation de soutien aux habitants d’Alep, en Italie. | MARCO BERTORELLO / AFP
Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se prononcer lundi sur un nouveau projet de résolution visant à garantir le bon déroulement des évacuations des civils et rebelles des quartiers est d’Alep, toujours supendues par le régime syrien.
A l’issue de longues consultations à huis clos dimanche à New York, les 15 membres du Conseil de sécurité sont parvenus à un compromis pour amender un texte présenté par la France et menacé de veto par la Russie.
L’ambassadeur russe Vitali Tchourkine a estimé qu’il s’agissait « d’un bon texte » et a précisé que le vote aurait lieu à 9 heures. Moscou -grand allié de Damas- a toujours opposé son veto aux résolutions concernant la Syrie mais l’ambassadrice américaine Samantha Power a cette fois dit s’attendre à un « vote unanime ».
Selon l’ambassadeur français François Delattre, les 15 pays ont trouvé « un terrain d’entente » sur un texte de compromis « basé exactement » sur le projet français.
Selon la dernière mouture du projet il « demande à l’ONU et à d’autres institutions pertinentes de superviser de manière adéquate et neutre et de surveiller directement les évacuations des quartiers est d’Alep ». L’ONU devra pour cela « déployer du personnel supplémentaire ».
Si elle est adoptée lundi, la résolution devrait permettre d’organiser « une évacuation dans la dignité et la sécurité, un accès humanitaire et de mettre réellement l’accent sur la protection » des civils.
Sur place, la reprise attendue dimanche de l’évacuation d’insurgés et de civils tenaillés par la faim et transis de froid dans le réduit rebelle d’Alep a été reportée à cause d’un grave incident impliquant des hommes armés.
Toutefois, 350 personnes ont pu quitter dans la soirée Alep et sont arrivées près de Khan al-Assal, en territoire rebelle à l’ouest de la deuxième ville de Syrie.
Bus attaqués par des jihadistes
Les évacuations à Alep devait être menées simultanément à celles des villages de Foua et Kafraya, dans la province d’Idleb (nord-ouest). Mais une vingtaine de bus qui s’apprêtaient à entrer dans ces deux localités chiites prorégime assiégées par les rebelles ont été attaqués et incendiés par des hommes armés issus de la mouvance jihadiste.
Un des chauffeurs a trouvé la mort, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). « L’opération a été reportée en raison de l’absence de garanties concernant la sécurité des évacués des deux villages de Foua et Kafraya », a annoncé l’OSDH, précisant que la suspension était due à l’attaque des bus. « Cinq bus transportant 350 personnes sont arrivés d’Alep-est », a toutefois indiqué Ahmad al-Dbis, chef d’une unité de médecins et de volontaires qui coordonnent l’évacuation près de Khan al-Assal. « Ils sont dans un état terrible, ils n’ont pas mangé, ils n’ont pas bu, les enfants ont attrapé froid, on les a empêchés d’aller aux toilettes », a précisé M. Al-Dbis.
Une médiation de la Russie et de la Turquie a poussé le régime à autoriser le départ de ce convoi qui était arrivé au dernier point de contrôle du régime, a expliqué le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane.
Des milliers de personnes sont bloquées depuis vendredi dans la poche rebelle d’Alep, conquise presque entièrement par le régime de Bachar al-Assad après une violente offensive aérienne et terrestre d’un mois, doublée d’un siège hermétique depuis juillet.
Le correspondant de l’AFP dans le secteur rebelle d’Alep a vu toute la journée des milliers de personnes agglutinées dans le quartier d’al-Amiriyah, d’où étaient partis jeudi des convois avant que l’opération ne soit suspendue par le régime le lendemain.
Froid glacial
En vertu d’un nouvel accord entre belligérants et leurs parrains russe, turc et iranien, 100 bus étaient entrés à Alep en vue de l’évacuation, « sous la supervision du Croissant-Rouge et du Comité international de la Croix-Rouge », d’après les médias officiels. Mais en début de soirée, après des heures d’attente, plus de 30 bus pleins à craquer, certaines personnes debout faute de place, n’ont pas pu quitter la ville.
Des milliers d’autres personnes, dont beaucoup d’enfants, continuaient d’attendre dans le froid glacial pour ne pas rater un autre convoi, a-t-il précisé.
Certains ont enlevé des vêtements de leurs bagages et y ont mis le feu pour se réchauffer alors que les températures avoisinaient les -6 degrés Celsius en soirée.
Il resterait environ 40 000 civils et entre 1 500 et 5 000 combattants avec leurs familles dans le réduit rebelle, selon l’émissaire de l’ONU pour la Syrie Staffan de Mistura.
Environ 8 500 personnes, selon l’OSDH, avaient pu être évacuées d’Alep avant que les opérations ne soient interrompues en raison de divergences sur le nombre de personnes à évacuer de Foua et Kafraya, assiégées par les rebelles dans la province voisine d’Idleb (nord-ouest). Mais un responsable rebelle avait affirmé dimanche à des journalistes qu’un nouvel accord avait été conclu aux termes duquel la reprise des évacuations à Alep se déroulerait parallèlement à celle Foua et Kafraya.
Une fois l’évacuation terminée à Alep, le régime syrien devrait proclamer la reprise totale de la ville, signant sa plus importante victoire dans la guerre sanglante qui déchire le pays depuis 2011 et a fait plus de 310 000 morts.
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