Subprimes : Deutsche Bank et le Credit Suisse annoncent un accord avec la justice américaine
Subprimes : Deutsche Bank et le Credit Suisse annoncent un accord avec la justice américaine
LE MONDE ECONOMIE
La première banque allemande devra acquitter une amende de 7 milliards de dollars, au lieu des 14 milliards envisagés, en échange de l’arrêt des poursuites aux Etats-Unis
Quelques jours avant la fin de l’année civile, Deutsche Bank (DB) est parvenue à lever un des risques les plus graves qui pesaient sur elle. Dans la nuit du jeudi 22 décembre, la première banque allemande a annoncé un accord avec le ministère de la justice américain dans l’affaire des crédits hypothécaires subprimes. En septembre, la banque s’était vue menacée d’une amende de 14 milliards de dollars (13,4 milliards d’euros) pour son rôle dans cette affaire, ce qui avait fait chuter son cours à son plus bas historique, sur fond de crainte d’une recapitalisation. Vendredi, à l’ouverture de la Bourse de Francfort, Deutsche Bank grimpait de 3,7 %.
Le montant de l’amende négociée en échange de l’arrêt des poursuites s’élève à environ 7 milliards de dollars : 3,1 milliards seront payés au ministère de la justice, et 4,1 milliards mis à disposition pour venir en aide aux consommateurs américains victimes de l’affaire.
Une autre banque, le Credit Suisse, a annoncé vendredi qu’elle allait débourser 5,28 milliards de dollars pour régler des litiges concernant la crise des subprimes aux Etats-Unis. L’accord conclu avec les autorités américaines doit encore être approuvé par le conseil d’administration de la banque.
Une véritable libération
A la suite de l’éclatement de la bulle immobilière aux Etats-Unis en 2008, conséquence de la multiplication des crédits hypothécaires à risque accordés à des foyers aux revenus limités et revendus par les banques à des investisseurs sous forme de « paquets », des millions d’Américains s’étaient retrouvés en grande difficulté ou avaient perdu leur logement. L’argent exigé de Deutsche Bank permettra de soulager les propriétaires et les détenteurs de crédits, qui se verront, par exemple, proposer de meilleures conditions de remboursement. Ces aides devront être versées pendant au minimum cinq ans.
Pour DB, cet accord est une véritable libération. La menace d’une amende de 14 milliards de dollars avait provoqué en septembre une crise de confiance des investisseurs, faisant pointer le risque d’un renflouement étatique de l’établissement qualifié cet été par le Fonds monétaire international de « banque systémique la plus dangereuse du monde ». Le cours de DB était alors tombé à moins de 10 euros, sa valeur boursière chutant à 18 milliards, un montant dérisoire pour un établissement classé avant la crise parmi les cinq premières banques d’investissement au monde.
Le compromis négocié met enfin un chiffre définitif en face du litige, et délimite le risque. La pression était d’autant plus grande pour parvenir à un accord avant fin 2016 que des changements de personnel au sein du ministère de la justice sont à prévoir avec l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump le 20 janvier 2017, ce qui aurait pu prolonger les négociations de plusieurs mois. DB indique que l’amende pèsera sur son résultat du quatrième trimestre 2016 à hauteur de 1,17 milliard d’euros.
Cet accord scellé, la banque allemande n’est pas sortie de la tourmente. La confiance des investisseurs ne reviendra durablement que si elle parvient à augmenter son taux de capitaux propres, actuellement de 11,1 %. DB espère le porter prochainement à 11,6 % grâce à la vente prévue de sa participation dans la banque chinoise Huaxia. Son PDG, le Britannique John Cryan, se propose d’atteindre le taux de 12,8 % en 2018, sans augmentation de capital. Une gageure en période de faibles taux d’intérêt et de croissance anémique.
Les déboires judiciaires de DB ne sont, par ailleurs, pas terminés : la prochaine affaire délicate concerne des transactions douteuses en Russie, où la banque est accusée de blanchiment d’argent.
De quoi donner encore quelques nuits agitées à son patron britannique arrivé à l’été 2015. Après un sévère bilan des années précédentes, le discret directeur a pour mission de redresser un établissement mis à mal par deux décennies de gestion dominées par les activités d’investissement, foyer de toutes les dérives que paye aujourd’hui chèrement la banque. Selon Bloomberg, DB s’est acquittée depuis 2008 de 9 milliards d’euros d’amendes et de dommages et intérêts dans différentes affaires.