Primaire de la gauche : les incertitudes des sondages
Primaire de la gauche : les incertitudes des sondages
Par Les Décodeurs
Selon un sondage Harris Interactive publié le 5 janvier, Manuel Valls ferait la course en tête parmi les candidats. Un résultat à prendre avec précaution, tant les incertitudes sont nombreuses.
Selon un sondage Harris interactive publié le 5 janvier, Manuel Valls ferait la course en tête parmi les candidats à la primaire de la gauche. Un résultat qu’il convient de prendre avec beaucoup de précautions tant les incertitudes sont nombreuses. | AFP
A un peu plus de deux semaines du premier tour de la primaire de la gauche, un sondage de l’institut Harris Interactive, commandé par France Télévisions, a placé, jeudi 5 janvier, l’ex-premier ministre Manuel Valls en tête, avec 43 % des intentions de vote. Suivent ensuite ses deux anciens ministres, Arnaud Montebourg (25 %) et Benoît Hamon (22 %).
Il s’agit là du deuxième sondage effectué pour la primaire de la gauche, et même du premier qui tient compte de la liste définitive des candidats à cette primaire. Le tout premier sondage, daté du 8 décembre, n’incluait pas la candidature tardive de Vincent Peillon et comptabilisait encore Gérard Filoche, dont la participation n’a pas été validée par le comité d’organisation.
Si la rareté des sondages sur cette primaire explique que celui d’Harris Interactive soit repris un peu partout dans la presse, elle incite aussi à relativiser la fiabilité de ces photographies des intentions de vote.
Des marges d’erreur non négligeables
Les résultats publiés jeudi 5 janvier montrent une certaine cohérence, puisque ceux du 8 décembre plaçaient le même trio en tête, avec des parts d’intentions de vote équivalentes pour Valls (alors estimées à 45 %) et Montebourg (28 %), mais pas pour Hamon (11 %), qui réalise aujourd’hui une nette progression.
Mais les nombreuses incertitudes qui pèsent encore sur cette primaire limitent fortement la fiabilité des sondages. En premier lieu, la taille du sous-échantillon de personnes interrogées par l’institut début janvier est assez faible. Sur 6 245 personnes ayant répondu en ligne, le sondage évoque seulement les 478 qui se déclarent certaines d’aller voter. La marge d’erreur est alors comprise entre 3,5 points et 4,5 points.
La deuxième incertitude porte sur le nombre d’indécis. Il y a, parmi les personnes interrogées et certaines d’aller voter, un nombre de votants indécis sur leurs intentions de vote. Or, le sondage d’Harris ne précise pas ce nombre. Il est donc impossible de connaître la part de ces 478 personnes ayant donné une intention de vote, ce qui ajoute à l’incertitude de l’avance réelle de Manuel Valls ou de l’écart entre Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, séparés de seulement 3 points.
Un contexte politique changeant
Enfin, comme le rappellent continuellement les instituts de sondage, ces enquêtes d’opinion, même réalisées sur un grand nombre de personnes, ne sont que des photographies reflétant l’état probable de l’opinion à un instant donné. Or, et le sondage le montre assez bien, l’intérêt des électeurs pour la primaire de la gauche reste limité en ce début de mois de janvier. Pas moins de 58 % des électeurs interrogés ne se déclarent « pas vraiment » ou « pas du tout » intéressés.
Pour cause, les candidatures n’ayant été validées que mi-décembre, juste avant les fêtes de fin d’année marquant traditionnellement une pause dans l’actualité politique, la campagne n’a réellement débuté que début janvier, ce qui ne laisse que trois semaines de campagne, durant lesquelles les sept candidats – dont certains sont relativement peu connus du grand public – doivent publier leurs programmes respectifs, parfois à la hâte.
Le sondage d’Harris Interactive a été réalisé du 2 au 4 janvier, en début de campagne (Manuel Valls et Vincent Peillon n’ont dévoilé leurs programmes que le 3 janvier) et avant les trois débats prévus avant le premier tour (respectivement les 12, 15 et 18 janvier), qui sont susceptibles d’influencer les intentions de vote.
La percée de François Fillon en novembre à la primaire à droite a montré que les scrutins de ce type sont particulièrement indécis. De nombreux électeurs peuvent changer d’avis à quelques jours du vote, un phénomène facilité par le fait que les différents candidats sont membres d’une même famille politique. Il est ainsi plus facile de changer d’avis entre Benoît Hamon ou Arnaud Montebourg au dernier moment qu’entre des tendances politiques différentes (par exemple, passer d’un vote de droite à un vote d’extrême gauche).
Toutes ces conditions réunies incitent à prendre avec beaucoup de précautions les enquêtes d’opinion.