Les chauffeurs de VTC manifestent contre Uber, le 15 décembre 2016, porte Maillot, à Paris. | Benoit Tessier / REUTERS

Sera-ce suffisant pour mettre fin à la crise qui secoue le monde des chauffeurs VTC ? Mercredi 1er février, Jacques Rapoport, le médiateur nommé fin 2016, devait présenter à la mi-journée ses préconisations pour sortir du conflit qui oppose les chauffeurs VTC et les plates-formes. Après avis de tous les acteurs, il remettra un texte au gouvernement vendredi 3 février.

Ces recommandations sont assez simples. Elles tiennent sur une simple feuille de papier. Le médiateur demande tout d’abord à Uber un geste financier pour aider de manière transitoire au redressement financier des chauffeurs. Ensuite, il propose de lancer un examen individuel de chaque chauffeur en difficulté. Ce travail serait pris en charge par les plates-formes.

Cela pourrait remédier, assure-t-il à la crise de ce métier, qui est de deux ordres, conjoncturel et structurel. Après les attentats, l’activité économique a fortement ralenti à Paris, qui concentre l’activité des VTC, et a donc touché de plein fouet les chauffeurs. Dans le même temps, les décisions tarifaires d’Uber (baisse des prix, puis hausse de sa commission de cinq points) ces dix-huit derniers mois ont été perçues très négativement par les chauffeurs et ont suscité une forte hostilité.

M. Rapoport menace de demander à l’Etat de légiférer

« Je n’ai pas à commenter la stratégie d’Uber, qui souhaite élargir le marché en augmentant les volumes de courses, grâce à des prix bas, mais je pense que, pour rétablir la confiance avec ses chauffeurs, la plate-forme devrait faire un geste. » Et ce tandis qu’en décembre 2016 Uber avait déjà annoncé la mise en place d’un fonds de deux millions d’euros pour soutenir ses membres.

Si ses premières préconisations ne sont pas suivies d’effet, M. Rapoport menace de demander à l’Etat de légiférer afin d’imposer « un prix plancher pour les courses ». « Cela permettrait aux chauffeurs VTC une sorte de smic, que l’on pourrait appeler pour ces indépendants, un revenu minimum professionnel de croissance, explique le médiateur. Une telle mesure pourrait être prise au nom de l’ordre public social. »

Pour ce marché, qui concentre des acteurs indépendants, ce serait une première. « Les chauffeurs sont aujourd’hui bien indépendants sur le papier, car ils ont la liberté de travailler, mais, dans les faits, ils sont très dépendants des plates-formes, précise le médiateur. Ce sont ces dernières qui fournissent les clients, fixent les prix et encaissent les courses… »

Objectiver un certain nombre de données du marché des VTC

Cette mesure viendrait compléter la loi travail de Myriam El Khomri, qui a déjà mis en place un régime de protection sociale pour les chauffeurs indépendants financés par les plates-formes pour les accidents du travail et la formation. Le médiateur refuse de demander la requalification des indépendants en salariés des plates-formes, comme certaines associations ou syndicats le réclament. Cela mettrait en péril toute l’économie du secteur et provoquerait un retour au système antérieur dit « de la grande remise », avec une réduction drastique du nombre de chauffeurs VTC.

Sur le fond, la médiation de M. Rapoport a permis d’objectiver un certain nombre de données du marché des VTC. Selon la médiation, « le revenu moyen d’un chauffeur indépendant s’établit à environ 1 700 euros par mois, et ce sans prendre en compte les congés payés ou la couverture santé et retraite. Pour leur part, les chauffeurs salariés ou les autoentrepreneurs sont très loin de ce niveau ».

Améliorer la gestion des « déconnexions »

Les plates-formes et les associations de chauffeurs se sont mises d’accord sur ces données. Sur la base de quarante heures d’activité hebdomadaires, le revenu mensuel peut-être nul ou atteindre jusqu’à 1 100 euros. Il faut ensuite retrancher le coût de la protection sociale évaluée, qui représente environ 30 % du revenu pour un indépendant au régime social des indépendants (RSI). Sur la base de soixante heures de travail, le revenu mensuel s’établit entre 1 200 et 2 600 euros. « Ce sont des revenus peu élevés, qui se rapprochent d’autres métiers requérant les mêmes qualifications », précise M. Rapoport.

Pour aider les chauffeurs à s’en sortir à long terme, le médiateur encourage les plates-formes et les associations de chauffeurs à identifier les bonnes pratiques pour maîtriser au mieux leurs charges. En parallèle, il propose d’améliorer la gestion des « déconnexions » des chauffeurs aux plates-formes, un objet récurrent de critique des conducteurs, ces derniers contestant le côté arbitraire de cette décision. Il souhaite la mise en place d’une « gestion contradictoire des déconnexions », grâce à l’installation, notamment, d’une commission d’appel.

Qui sont les chauffeurs Uber ?