« Il ne faut pas devenir amis avec ces gens-là, tu vois ce que je veux dire ? » On est là, les fesses sur un bout de marche du palier du Lido et la journaliste à côté de moi a plein de conseils. « Tu vois, ils vont te parler le temps de leur promotion mais ensuite, ils ne resteront pas tes amis. Ce ne sera pas sincère. Tu vois ce que je veux dire ? » Par chance, il n’y a pas trop de risques de se faire des amis peu fiables ce soir, parmi les célébrités. Déjà parce qu’elles sont à table dans la grande salle du Lido occupées à déguster un feuilleté praliné au chocolat tandis que nous sommes un étage plus haut, assises sur la moquette d’un palier transformé en salle de presse en train de manger du taboulé et du rôti froid.

Isabelle Huppert remercie d’un « quels que soient les prix que je reçois, j’en suis heureuse ». Même un Globe de cristal, donc.

La journaliste à côté de moi se lève pour aller se resservir. « Faut profiter. » Elle a une émission de radio que je ne connais pas. « Mais mon vrai truc, c’est l’astrologie. » La vérité, c’est qu’on n’est pas des vrais journalistes. Puisque ce soir, les vrais journalistes font partie du jury et votent pour les Globes de cristal, une cérémonie inspirée des Golden Globes américains qui décernent des prix dans les domaines de la musique, la littérature, du cinéma et du théâtre.

Si, à l’étage, nous ne sommes qu’entre demi-journalistes, c’est aussi parce que ce ne sont que des demi-people qui viennent nous voir. Un photographe râle. Pendant que, avec ses collègues, ils prenaient des photos de demi-célébrités, Audrey Tautou s’est arrangée pour passer dans leur dos. Mademoiselle Catherine Deneuve (c’est ainsi qu’elle tient à être appelée) est passée par une autre entrée, tout comme Jean Paul Gaultier et Isabelle Huppert.

Larsen et boulettes de pain

Peu connus du grand public, à part de ceux qui regardent les cérémonies retransmises en direct différé sur les chaînes du câble, les Globes de cristal ne marquent que pour leurs sorties de route, comme lorsque Jean-Luc Delarue proposa à Yamina Benguigui de lui tenir les globes.

Ce soir, la cérémonie les enchaîne, ces sorties de route. Le président Olivier Dassault n’est pas là quand on a besoin de lui pour ouvrir la soirée. À la place, les animateurs Estelle Denis et Artus annoncent mademoiselle Catherine Deneuve. Mais l’actrice a le talon coincé dans sa robe. Larsen quand elle prend le micro. « Est-ce que vous entendez ? » Non. Des bouts de pain pleuvent sur scène. C’est Laurent Baffie qui en a fait des projectiles. Mademoiselle Catherine Deneuve se demande sûrement ce qui lui a pris d’accepter cette invitation.

Isabelle Huppert et son Globe de cristal à la cérémonie, au Lido. | Pjb/Benhamou Laurent/Ghnassia An/Sipa

La chanteuse Imani reçoit, la première, le prix de la meilleure interprète. Elle dit ne pas avoir prévu de discours puisqu’elle ne s’attendait pas à gagner. Les gagnants des autres catégories qui ont été prévenus lorsqu’ils ont été invités font semblant de la croire. Voilà Julien Doré qui vient chercher son Globe et signale qu’assis à deux mètres, on n’entend rien du tout. Se trouvent certainement dans la salle des nominés qui espèrent ne pas être invités à monter sur scène. D’autres remercieront, comme Isabelle Huppert, d’un « quels que soient les prix que je reçois, j’en suis heureuse ». Même un Globe de cristal, donc.

Un show sauvé in extremis

Sur le palier à moquette bleue, un homme file avec un seau à glace et des bouteilles préparer la loge de Véronique Sanson. Évidemment, à placer une remise de prix à la fin d’un dîner arrosé, on s’expose à moins de retenue. France Gall, récompensée avec la comédie musicale Résiste, s’accroche à son chewing-gum. Laurent Baffie, qui doit décerner le prix du meilleur film étranger avec l’actrice et productrice Saïda Jawad, se trompe et l’appelle Aïcha. « J’en ai baisé tellement que je n’ai plus de repère », répond-il à Estelle Denis qui le reprend. « Teddy Riner est là, petite fiotte, si t’as des couilles, viens… », brame-t-il au judoka. On pense