Le changement (de banque), c’est maintenant
Le changement (de banque), c’est maintenant
LE MONDE ECONOMIE
Le dispositif sur la mobilité bancaire entre en vigueur le 6 février. Il doit simplifier la vie des consommateurs.
COLCANOPA
Changer de banque va-t-il devenir aussi simple que de passer chez un autre opérateur de téléphonie mobile ? C’est en tout cas l’objectif du nouveau dispositif d’aide à la mobilité bancaire, qui entre en vigueur le 6 février.
Le « mandat de mobilité », c’est son nom, a été mis en place par la loi Macron de juillet 2015. Jusqu’à présent, lorsqu’un client changeait de crémerie, il devait lui-même passer au crible ses relevés de comptes pour identifier les organismes (fournisseur d’énergie, Trésor public, employeur…) qui réalisent des virements ou des prélèvements réguliers sur le compte, afin de les prévenir de sa nouvelle domiciliation bancaire. Avec le risque, non négligeable, d’en oublier au passage. Désormais, la nouvelle banque s’occupe de tout.
Reste à savoir si ce nouveau dispositif, qui est gratuit, sera de nature à convaincre les consommateurs de faire jouer la concurrence. Car, pour l’heure, les Français sont très fidèles : « Le client reste, en moyenne, entre seize et dix-sept ans dans sa banque principale, indique Baudoin Choppin de Janvry, directeur conseil banque de détail chez Deloitte. Le taux de rotation des clients est d’environ 4,5 % en France, contre presque 8 % dans la plupart des pays européens, d’après le rapport Mercereau de 2014 sur la portabilité du compte bancaire. Nous attendons, à terme, un quasi-doublement de la mobilité dans l’Hexagone, grâce au nouveau dispositif », espère Pascal Pflieger, le directeur général adjoint de la banque en ligne BforBank.
Les acteurs Internet, moins chers que les réseaux bancaires traditionnels, sont les premiers à se réjouir du contrat de mobilité. Tous sont en phase active de conquête de clientèle.
Boursorama Banque, BforBank, Fortuneo, Hello bank et ING Direct proposent, en ce moment, des primes de bienvenue de 80 euros à leurs nouveaux clients. Elles mettent aussi en avant les économies potentielles – de plusieurs dizaines voire centaines d’euros –, lorsqu’un particulier passe d’une banque de réseau à un établissement en ligne. Ce dernier pratique la gratuité sur les principaux produits et services du quotidien (cartes bancaires, frais de tenue de compte…).
« Cela reste anxiogène »
Nul doute que l’opérateur de télécommunications Orange, qui devrait lancer sa banque mobile Orange Bank au premier semestre, profitera lui aussi de ce nouveau dispositif. « [Ce dernier] devrait mettre en place une politique tarifaire agressive, qui incitera les acteurs en ligne à continuer à serrer leurs prix, estime Daniel Pion, associé conseil banque de détail chez Deloitte. Mais le mandat de mobilité ne devrait pas déclencher une nouvelle guerre des prix, car les marges des établissements bancaires sont déjà sous pression, en raison du niveau très faible des taux d’intérêt. »
De même, les habitudes sont tenaces, et il ne faut pas s’attendre à un Big Bang. « Les Français sont paradoxaux : ils se plaignent des tarifs trop élevés de leur banque, mais hésitent encore à passer à la concurrence, car cela reste anxiogène », constate Marie Cheval, directrice générale de Boursorama.
D’autant que d’autres freins existent. « Le contrat de mobilité ne concerne pas les produits d’épargne », souligne Marc Giordanengo, manager au sein du cabinet de conseil Ailancy. En effet, le particulier doit s’occuper lui-même de transférer ses placements.
Dans la pratique, le plus simple est de clôturer son Livret A et son Livret développement durable (LDD) dans l’ancienne banque, puis d’en ouvrir de nouveaux dans le nouvel établissement. Mais la situation se complique pour le plan d’épargne-logement (PEL), le plan d’épargne en actions (PEA) et le compte titre ordinaire. En effet, les caractéristiques et la fiscalité de ces placements sont liées à leur date d’ouverture. Pas question, donc, de les clôturer dans une banque pour les rouvrir ailleurs, au risque de perdre leur antériorité fiscale.
Impossible de faire migrer un contrat d’assurance-vie
Il faut donc organiser un transfert en bonne et due forme, ce qui peut prendre jusqu’à plusieurs semaines et n’est pas gratuit (les banques en ligne prennent souvent en charge ces frais pour leurs nouveaux clients). Les établissements facturent entre 40 euros et 100 euros pour transférer un PEL, et de 40 euros à 120 euros pour un PEA, auxquels s’ajoutent des coûts pour chaque ligne de valeurs mobilières transférée, selon le comparateur de tarifs bancaires Meilleurebanque.com.
Par ailleurs, il est impossible de faire migrer un contrat d’assurance-vie : le client doit le conserver dans son ancien établissement. Il pourra toutefois ouvrir un autre contrat dans sa nouvelle banque et l’alimenter, puisque, contrairement aux produits d’épargne réglementés (Livret A, LDD, PEL…), il est possible de détenir plusieurs assurance-vie.
Enfin, du côté du crédit (immobilier, à la consommation…), le particulier peut le conserver dans l’ancien établissement, le rembourser par anticipation ou le faire racheter par la nouvelle banque, ce qui, là encore, peut demander quelques séances de négociations.