Le candidat du Parti socialiste Benoît Hamon, le 17 février, à Lisbonne. | FRANCISCO LEONG / AFP

Ils se sont parlé... et puis après ? L’engagement d’une discussion entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, tous deux candidats à l’élection présidentielle, sur un éventuel rassemblement tourne au vaudeville. Alors que M. Hamon, sorti victorieux de la primaire de son camp, avait annoncé dès la fin du mois de janvier qu’il allait entrer en contact avec le leader de La France insoumise, M. Mélenchon, ne voyant rien venir, a envoyé jeudi 16 février dans la soirée une lettre à son comparse, lui précisant les garanties d’une alliance durable entre eux.

La première de ces garanties traite du « périmètre de la convergence. Nous ne voulons aucun accord, ni à la présidentielle, ni aux législatives avec Emmanuel Macron et son mouvement » est-il écrit. La seconde « concerne [la] volonté [de M. Hamon] d’assumer la rupture avec la politique du quinquennat ». Et M. Mélenchon de citer l’abolition de la loi El Khomri, du CICE et de l’état d’urgence permanent.

Toute la journée de vendredi, le suspense a plané sur la réalité ou pas de leurs échanges. Arrivé dans l’après-midi à Lisbonne pour son premier déplacement à l’étranger en tant que candidat à l’Elysée, Benoît Hamon a clos le débat sur la question. « J’ai eu Jean-Luc Mélenchon plusieurs minutes au téléphone, mais vous n’en saurez pas plus, a-t-il prévenu les médias devant le lycée français de la ville. Ni lui ni moi ne voulons feuilletonner, le rassemblement de la gauche est un sujet suffisamment grave pour ne pas nous livrer à du théâtre. Vous étiez inquiets, nous nous sommes parlé. Vous êtes inquiets, nous allons nous voir. Punto final ! »

« Ici, les gauches ne sont pas irréconciliables »

M. Hamon a commencé vendredi une visite de trente-six heures au Portugal, où il doit rencontrer l’ensemble des dirigeants de la gauche plurielle nationale. Alors qu’à Paris le député des Yvelines négocie un accord électoral avec les écologistes et discute avec des communistes, le cas lusophone relève pour lui de l’exemple à suivre. En novembre 2015, l’ancien maire de la capitale et premier ministre socialiste, Antonio Costa – que M. Hamon devait voir en tête à tête samedi – a pris le pouvoir en s’alliant avec les communistes et la gauche radicale.

Cette alliance portugaise surnommée « geringonça » (« bringuebalante ») enchaîne pour l’instant les succès politiques et économiques, et M. Hamon rêve de s’en inspirer pour la France. « Ici, les gauches ne sont pas irréconciliables, mais réconciliées. Elles ont démontré qu’on peut sortir de l’austérité, retrouver un sillon de croissance, concilier relance économique et progrès social », explique-t-il à Lisbonne.

Pour le député Pascal Cherki, qui accompagne M. Hamon, « la primaire [de janvier] a bouleversé tous les plans à gauche ». « La question qui est posée à Jean-Luc Mélenchon est de savoir qui rassemble le mieux la gauche et qui peut gagner la présidentielle : lui ou Hamon ? Je pense que c’est Benoît [Hamon], car, contrairement à Jean-Luc [Mélenchon], il est au centre de la gauche », affirme l’élu de Paris.

Autre candidat à la présidentielle, l’écologiste Yannick Jadot a lui bel et bien parlé avec MM. Mélenchon et Hamon, mais il n’est pas « un moniteur de colonie de vacances », précise-t-il. Avec le candidat de La France insoumise, la question reste : « Une dynamique commune peut-elle avoir un sens ? », explique M. Jadot. Avec le PS, à l’issue de deux réunions de travail, les convergences sont plus sérieuses et pourraient aboutir à un accord en milieu de semaine prochaine. « Il faudrait sortir à deux ou à trois sur un projet et l’élargir », escompte M. Jadot. « Mitterrand et Marchais ont réussi en leur temps à s’unir dans l’intérêt de la gauche. Hamon et Mélenchon devraient pouvoir le faire aussi », veut croire M. Cherki.