Sihame Aarab est « data scientist » chez Microsoft. | Eric Nunès/Le Monde

Sihame Aarab, 29 ans, diplômée de l’université Paris Descartes en intelligence artificielle est aujourd’hui « data scientist » chez Microsoft. Elle témoigne de son parcours et des possibilités qu’offrent aux jeunes femmes les métiers du numérique.

Comment êtes-vous devenue « data-scientist » ?

Après un baccalauréat scientifique, j’ai pris le chemin de l’université Paris Descartes où j’ai passé une licence de mathématiques et informatique. J’ai alors découvert un univers, celui de l’intelligence artificielle, et après m’être un peu cherchée, j’y ai trouvé ma voie : une alchimie numérique entre mathématiques et philosophie. J’ai bifurqué vers un master de « data-scientist ». Dans cette nouvelle matière, j’ai déniché ce qui me plaisait vraiment.

Quelle est la place des femmes dans votre métier ?

Elles sont aujourd’hui peu nombreuses, mais cela évolue. Nous sommes encore trop à l’écoute de l’opinion des autres sur ce qui devrait nous convenir. Beaucoup de jeunes femmes ignorent les opportunités que ces métiers peuvent leur offrir.

Lorsque j’étais lycéenne, aucun professeur ou conseiller d’orientation ne m’a parlé des nouveaux métiers que crée la révolution numérique, ni même simplement d’informatique. Si les élèves qui passent leur baccalauréat ne sont pas actifs dans leurs recherches d’orientation, l’information ne viendra jamais a eux. C’est regrettable, des talents peuvent se perdre.

Pour corriger cet état de fait, Microsoft a créé un programme nommé Digigirlz, auquel je participe, qui consiste à sensibiliser des collégiennes aux métiers du numérique. C’est également des métiers qui tendent vers l’égalité des chances. L’objectif est de casser un discours ambiant qui laisse entendre que cette voie n’est pas pour les filles. Or, rien ne leur est impossible.

Que perdent les métiers de l’informatique de leur faible féminisation ?

Votre question revient à demander : qu’est-ce que les femmes ont de plus que les hommes ? La créativité probablement. Mais surtout, une plus grande présence de femmes permettrait de gagner du temps et de l’énergie. Cela gommerait les a priori dont elles sont souvent victimes. Dans un univers masculin, quand une tâche essentielle est confiée à une jeune femme, il n’est pas rare de devoir prouver à nouveau sa compétence, de devoir refaire la preuve qu’on a sa place juste du fait de son âge, de son sexe. Ce qui ne serait pas le cas si la même mission était confiée à un homme. Si les femmes pouvaient moins se dépenser à démontrer qu’elles peuvent faire les choses, elles auraient plus de temps pour les réaliser.

Quels conseils donnez-vous aux lycéennes et aux lycéens dans leurs choix d’orientation ?

Certaines personnes savent très vite, très jeunes, quelle est leur passion. C’est un bon point car c’est essentiel de faire ce qu’on aime. Mais d’autres, comme moi, doivent chercher. Mon conseil est donc d’être curieux, de se documenter sur les opportunités qui s’offrent à vous. Il est utile de parcourir les salons étudiants, de découvrir les écoles lors des journées portes ouvertes. Il faut partager, échanger avec les autres sur leurs parcours, les écouter et trouver son centre d’intérêt.

Une fois que celui-ci est défini, ill faut se fixer des objectifs pour ne pas se perdre en route : un diplôme universitaire, une licence, un master… Chaque diplôme est une étape qui doit permettre de faire un point sur ses choix. Continuer sur la même voie ou bifurquer ? Il est nécessaire de se remettre en question rapidement, réfléchir à ce qui nous convient le mieux et avancer. Il faut être prêt à prendre des virages, apprendre de nouvelles matières. Nous ne sommes pas condamnés à suivre nos choix initiaux.