Un bureau de vote à La Haye, le 15 mars. | EMMANUEL DUNAND / AFP

A La Haye comme dans le reste des Pays-Bas, il est possible, en ce mercredi d’élections législatives, de voter un peu partout – au musée municipal, dans les maisons de retraite, les bureaux de poste ou les parkings. A Holland Spoor, l’une des gares de la ville, on peut trouver le bureau dans une salle d’attente entre les voies 3 et 4. Geert Wilders, le chef du Parti pour la liberté (PVV, extrême droite) et Mark Rutte, le premier ministre sortant (VDD, libéral démocrate) ont, quant à eux, voté dans des bâtiments officiels, à deux endroits différents.

Les Néerlandais accomplissent leur devoir électoral en pleine semaine, comme le veut leur tradition, et peuvent voter où ils le souhaitent. C’est ainsi que le taux de participation dépasse parfois largement le nombre d’électeurs attendus à certains endroits. Il atteint donc 120, voire 150 % dans des communes touristiques, où les Néerlandais sont nombreux dès que le soleil illumine un peu le plat pays. Quelque 9 900 bureaux étaient ouverts mercredi dans tout le royaume, attendant près de 13 millions de votants potentiels.

Parmi eux, 850 000 jeunes qui se rendent aux urnes pour la première fois. Lors des précédentes législatives, en 2012, quelque 30 % de ces nouveaux électeurs s’étaient abstenus, tandis que 74,6 % des Néerlandais s’étaient rendus aux urnes, un peu plus nombreux qu’à l’époque du plus faible taux enregistré pour des législatives – 73,3 % en 1998 –, mais bien moins qu’en 2006 (80,4 %). Le beau temps régnant sur le royaume mercredi allait-il influencer la participation ? Son effet peut être estimé à 1 ou 2 %, affirme une très sérieuse étude de l’université Radboud de Nimègue.

« Les grands partis n’ont jamais été si petits »

Le plus âgé des candidats, ce mercredi, est âgé de 93 ans, le plus jeune de 17 ans, et tous deux sont membres du Parti pour les animaux (PVDD, centre-gauche), qui espère décrocher quelques sièges.

A Holland Spoor, l’ambiance est à la bonne humeur en ce début d’après-midi. « Je voulais vraiment voter, mais je ne me déciderai que devant ma feuille », sourit Griet, qui hésite entre « le choix de son cœur », les Verts de Groen-Links, et « celui de la raison », les sociaux-démocrates au pouvoir – « en souvenir de mon papa », qui a toujours soutenu la gauche. Joop Kok est, lui, bien décidé : « PVV, car il est temps qu’on reprenne le contrôle ici ! » Une jeune femme voilée d’origine turque songe à voter Denk, un nouveau parti pro-immigrés.

Qui est Geert Wilders, le leader de l’extrême droite néerlandaise ?
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Les électeurs se voient proposer, ce mercredi 15 mars, un nombre record de listes (28), avec 1 114 candidats au total. Onze de ces partis sont actuellement représentés à la Seconde Chambre, où siègent les députés. Vingt et une listes seulement concouraient en 2012, mais la formation d’une coalition avait été rendue relativement aisée compte tenu de la performance de deux grands partis : les libéraux du Parti populaire et démocrate, et les sociaux-démocrates du Parti du travail (PVDA), alors emmenés par Diederik Samsom. Ensemble, ils avaient obtenu 79 sièges, suffisamment pour s’assurer une majorité à la Seconde Chambre, qui compte 150 sièges.

Cette fois, « les grands partis n’ont jamais été aussi petits, note le quotidien De Volkskrant, et les petits n’ont jamais été aussi nombreux ». Couplée à l’indécision des électeurs – la moitié d’entre eux semblaient encore hésiter mardi soir à l’issue d’un ultime débat télévisé –, cette évolution rendait très incertains les pronostics.

Echaudés par l’expérience américaine, les sondeurs étaient, quant à eux, très prudents et hésitaient à avancer le nom des gagnants. D’autant que leurs méthodes diffèrent : certains utilisent un panel de volontaires, d’autres sélectionnent les participants sur la base de données statistiques officielles, d’autres encore rémunèrent les participants en fonction du nombre de questions auxquelles ils répondent.

Un scrutin jugé historique

Depuis quelques jours, une certaine unanimité s’est cependant faite autour d’une possible victoire du VVD de M. Rutte. Il perdrait une dizaine de sièges au moins, mais transformerait cette demi-défaite en succès puisqu’il devancerait son rival d’extrême droite Geert Wilders et son Parti pour la liberté. La plus grande incertitude semblait toutefois encore régner mercredi à la mi-journée dans les appareils politiques et chez les observateurs, pour ce scrutin jugé historique pour les Pays-Bas et pour une Europe inquiète.

Pour preuve, la « une » du quotidien Algemeen Dagblad, qui remporte sans doute la palme de l’originalité. Encourageant les électeurs – « Votez ! » –, le journal préfigurait mercredi matin ce que pourraient être ses gros titres de jeudi. Soit cinq photos assorties de cinq titres différents : « Mark Rutte, le patron », « Un triomphe quand même pour Wilders », « Le PVDA ressuscité » – alors qu’on prédit une lourde défaite au Parti social-démocrate –, « Pechtold premier ministre » – en cas de victoire du leader des centristes réformateurs et proeuropéens du parti D66 –, ou enfin « Buma ! » dans l’hypothèse d’un retour surprise au pouvoir des démocrates-chrétiens du CDA, dirigé par Sybrand Buma.