Quelques heures après l’attaque au fusil de chasse qui a fait huit blessés dans le lycée Tocqueville, à Grasse (Alpes-Maritimes) – quatre dans la bousculade et quatre, dont le proviseur, touchés par des tirs de plomb –, le portrait que semble dessiner l’activité du principal suspect sur les réseaux sociaux est celle d’un jeune homme fasciné par les tueries de masse. Et notamment par l’une des plus célèbres d’entre elles, la fusillade de Columbine, durant laquelle treize personnes, dont un enseignant, avaient trouvé la mort, en 1999, dans le Colorado (Etats-Unis). Deux lycéens avaient alors ouvert le feu et fait exploser une bombe artisanale dans leur lycée.

Le jeune homme interpellé par le RAID à Grasse, jeudi 16 mars, est, lui aussi, un élève de l’établissement. Ce mineur de 17 ans semblait obsédé par la fusillade de Columbine. Le bandeau de sa page YouTube est une image issue des caméras de vidéosurveillance du lycée américain, qu’il avait également publiée sur Facebook, sur laquelle on aperçoit deux cadavres.

Son unique liste publiée sur YouTube rassemble deux films consacrés à la fusillade, dont la chanson The Anatomy of a School Shooting, du rappeur Ill Bill, qui raconte la fusillade de Columbine du point de vue de ses deux auteurs, Eric Harris et Dylan Klebold (respectivement 18 et 17 ans), qui se sont suicidés après l’attaque. La photographie illustrant son compte Twitter est issue des archives de la police de Columbine, et montre les cadavres des deux auteurs de l’attaque après leur suicide.

Sur YouTube, le jeune homme suivait aussi plusieurs chaînes évoquant le massacre de Columbine – dont le projet Cleaning columbine, qui vise à restaurer toutes les images d’époque sur les deux auteurs de l’attaque et son déroulement. Amateur de groupes de métal et publiant des images inspirées de l’imaginaire sataniste, le jeune homme suivait aussi sur YouTube deux artistes exerçant une certaine fascination sur les « columbiners », les admirateurs de la fusillade : le groupe allemand Rammstein, écouté par Eric Harris et Dylan Klebold, et Marilyn Manson, qui fait une longue apparition dans le documentaire de Michael Moore consacré à la fusillade, Bowling for Columbine (2002), où l’artiste dénonçait l’accès trop facile aux armes à feu qui avait permis l’attaque.

Sympathies pour la droite de la droite

D’autres éléments publiés en ligne tendent à montrer que le jeune homme était aussi fasciné par une certaine imagerie violente, proche de l’extrême droite américaine ou européenne. Il utilisait notamment comme image de profil un visuel issu du jeu Hatred, qui revendiquait le titre de jeu le plus violent au monde – on y incarne un tueur dont le seul but est de massacrer des civils au hasard dans la rue. Misanthrope, cynique, ultraviolent et provocateur, le jeu a été édité par le studio polonais Destructive Creations, suspecté de sympathie envers un groupe néonazi et qui a bénéficié du soutien du mouvement Gamergate, et de sympathisants masculinistes ou conspirationnistes.

Le jeune homme est aussi abonné à plusieurs comptes YouTube diffusant des conseils pour fabriquer ses propres armes, ainsi que des chaînes consacrées aux tueurs en série. Il était également abonné à plusieurs youtubeurs provocateurs classés à droite.

Plusieurs de ses messages publiés en ligne évoquent aussi une fascination macabre. Il fréquentait également des sites spécialisés dans les films d’horreur et gore. Sur Twitter, en réponse à un internaute demandant la suppression d’une vidéo de l’attentat de Nice de juillet 2016, il défendait son maintien : « C’est bien aussi de voir comme quoi on est des merdes qui peuvent mourir pour un rien », écrivait-il.