Les bibliothèques universitaires proposent en moyenne une place pour douze étudiants
Les bibliothèques universitaires proposent en moyenne une place pour douze étudiants
Par Séverin Graveleau
En France les bibliothèques universitaires comptent bien moins de places par étudiants qu’au Royaume-Uni ou en Allemagne, selon un rapport qui préconise de doubler les constructions prévues.
La bibliothèque universitaire de l’université Lyon-III, en 2004. | FRED DUFOUR / AFP
D’ici à 2025, les bibliothèques universitaires (BU) devraient proposer une place assise pour… 12,5 étudiants. C’est certes mieux qu’en 1989, où il y en avait une pour quinze étudiants, mais bien moins bien qu’au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, où l’on compte plutôt une place de bibliothèque pour six étudiants. Si l’on convertit en mètre carré de BU par étudiant, la moyenne ne dépasse pas 0,7 mètre carré (m2) en France, 1,5 m2 dans les pays anglo-saxons, et 2,1 m2 en Allemagne, précise un rapport de l’Inspection générale des bibliothèques (IGB) du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, publié le 31 mars.
La difficulté pour trouver une place assise dans certaines BU françaises n’est pas nouvelle. C’est entre autres pour y répondre que le ministère a lancé en 2016 son plan « Bibliothèques ouvertes » prévoyant des horaires d’ouverture plus larges (soirs et week-ends) ainsi que le déploiement de nouveaux dispositifs censés faciliter la vie des étudiants (comptage des places et information en temps réel par Internet, etc.).
Peut mieux faire…
Le rapport de l’IGB mesure le chemin parcouru depuis trente ans en matière de construction et de rénovation des bibliothèques universitaires : quelque 80 000 places de lecture supplémentaires ont été, ou sont en train d’être, créées au cours de la période 1995-2020. Mais il montre surtout le chemin qu’il reste à parcourir avant d’atteindre l’objectif « d’un mètre carré de bibliothèque universitaire par étudiant, et d’une place pour dix étudiants » sur l’ensemble du territoire.
Ces places créées, les étudiants, qui patientent parfois pendant plusieurs dizaines de minutes devant les BU avant de pouvoir entrer, n’en sentent pas vraiment les effets. Sur la même période (1995-2020), la population universitaire aura doublé, rendant quasi invisible l’investissement effectué. Et une nouvelle hausse est attendue, liée au boom des naissances dans les années 2000 : les inspecteurs recommandent donc de « doubler le rythme actuel de construction » pour faire face à l’évolution prévisible de la démographie étudiante à l’horizon 2025-2030 ; ce qui reviendrait à créer au moins 34 000 places de plus que celles d’ores et déjà planifiées.
Disparités territoriales, les difficultés parisiennes
Il faudra au moins ça pour améliorer une situation dont les étudiants d’Ile-de-France sont les premières victimes. De fortes disparités existent : compter une place pour seize étudiants en Ile-de-France (une pour quatorze si l’on prend en compte les bibliothèques interuniversitaires – BIU), contre une pour onze étudiants hors Ile-de-France, selon des chiffres de 2010 cités par le rapport.
Pour l’Ile-de-France, les lacunes en mètres carrés et en places de lecture sont « d’autant plus grandes que l’on se dirige de la périphérie vers le centre de Paris ». Etaient ainsi décomptées une place pour… 78 étudiants à Paris-II, une pour 59 étudiants à Paris-IX, une pour 33 à Paris-IV, une pour 18 à Paris-X, une pour 12 à Paris-VI, une pour 8 à Cergy, etc. (voir le tableau au bas de cet article). Des manques qui ont pu, parfois, être compensés depuis : le rapport mentionne les projets de constructions prévus pour la période 2010-2025.
La situation globalement avantageuse pour la province ne doit cependant pas cacher des disparités parfois forte entre les régions : une place pour quinze étudiants dans les universités d’Aix-Marseille ou de Lille, contre une place pour huit étudiants à La Rochelle, Limoges ou Strasbourg par exemple.
De nouvelles contraintes
Le rapport met par ailleurs en relief les nouvelles données auxquelles doivent faire face, en 2016, les bibliothèques universitaires :
- hausse du nombre d’étudiants ;
- des BU déjà anciennes : celles construites en nombre au tournant des années 1990 sont « à mi-parcours de leur vie, très souvent peu adaptées au développement des outils numériques » ;
- développement du travail en groupe : la diminution graduelle de la part des cours magistraux au profit de travaux dirigés « a pour conséquence le développement du travail en groupe », explique l’inspection ;
- documentation numérique : on constate aussi la « quasi-disparition » de la documentation de recherche sous forme papier dans les disciplines médicales et scientifiques, ainsi que le « recours toujours plus grand à la documentation numérique ».
Les bibliothèques existantes, à rénover, comme celles qui vont être construites, doivent donc aujourd’hui avoir « des horaires d’ouverture étendus et être modulables », être susceptibles de « combiner usages individuels (silencieux) et collectif (potentiellement bruyants) », se révéler « correctement câblées et équipées » et être « capables de favoriser l’autonomie des usagers », estiment les inspecteurs. Qui appellent aussi, à l’aune des disparités actuelles, à un réel « souci d’équilibre territorial ».