Facebook lance une campagne publicitaire contre les « fausses informations »
Facebook lance une campagne publicitaire contre les « fausses informations »
Le réseau social diffuse largement une liste de dix « conseils » pour apprendre à reconnaître des liens douteux.
Au siège de Facebook à Menlo Park, en Californie, en 2014. | Jeff Chiu / AP
De pleines pages de publicité dans plusieurs quotidiens nationaux, un message s’affichant en tête du fil d’actualité des utilisateurs dans quatorze pays… Depuis le début de la semaine, Facebook a lancé une vaste offensive de communication contre les « fausses informations » (fake news), que le réseau social est régulièrement accusé de laisser proliférer sur sa plate-forme.
Cette campagne prend la forme d’une série de dix conseils, censés permettre aux utilisateurs de ne pas se faire piéger par des informations erronées cherchant sciemment à les tromper : « Méfiez-vous des titres. » « Effectuez des recherches sur la source. » « Vérifiez les preuves apportées. », etc. En cas de doute sérieux, les utilisateurs sont également invités à signaler les liens et messages trompeurs, tout comme ils peuvent signaler un contenu illégal ou choquant.
Mais, contrairement aux messages présumés illégaux, ces contenus ne sont pas examinés par les modérateurs de Facebook ; de manière expérimentale, ils sont « traités » par des journalistes dans plusieurs rédactions (dont celle du Monde). Si deux rédactions différentes considèrent que le message est faux, il n’est pas supprimé, mais les personnes cherchant à le partager verront s’afficher un message expliquant que ce contenu est « contesté », avec une brève explication des raisons du choix.
Changement de politique
Depuis la présidentielle américaine de 2016, Facebook a été vivement critiqué pour sa gestion des fausses informations. Durant la campagne, des messages évidemment faux, cherchant à susciter des clics ou à tromper les électeurs, avaient été très largement diffusés sur le réseau social. Un article affirmant à tort que le pape François avait apporté son soutien à Donald Trump avait ainsi accumulé près de un million de partages, commentaires et « likes » sur Facebook.
Peu après l’élection, le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, avait estimé que ces fausses informations étaient un problème limité. « L’idée que Facebook ait influencé l’élection de la moindre manière à cause de ses faux articles d’actualité, qui représentent une partie infime de notre contenu, me paraît ridicule », avait-il déclaré lors d’une séance de questions-réponses. « De tout le contenu sur Facebook, plus de 99 % de ce que les gens voient est authentique. Seule une très petite quantité est un faux contenu et diffuse de fausses nouvelles », écrivait-il à l’époque, tout en reconnaissant qu’il ne veut pas « de canulars sur Facebook ».
Depuis, Mark Zuckerberg et Facebook ont fait machine arrière. A la mi-février, dans un long texte détaillant sa vision de la politique et de l’avenir de Facebook, M. Zuckerberg écrivait que « deux des sujets les plus discutés l’an dernier concernaient la diversité des points de vue auxquels nous sommes confrontés (les bulles de filtre) et la véracité de l’information (les fake news). Ces deux sujets m’inquiètent, et nous les avons étudiés en profondeur. Mais je suis aussi inquiet qu’il puisse y avoir des effets plus profonds sur lesquels nous devons agir, autour du sensationnalisme et de la polarisation politique, qui conduisent à une diminution de la compréhension. »
Des rédactions « bénévoles » ?
Ces derniers mois, Facebook a multiplié les initiatives contre les fake news : l’entreprise finance avec d’autres entreprises et associations un fonds contre les fausses informations doté de 14 millions de dollars ; elle a noué des partenariats avec des médias dans plusieurs pays ; et a exclu de sa plate-forme de publicité des sites Web spécialisés dans la publication de fake news… Sans faire taire les critiques.
Des médias voient notamment d’un mauvais œil le fait que le plus grand réseau social les sollicite pour modérer les fausses informations de manière bénévole : « Facebook, une entreprise qui gagne 7 milliards de dollars tous les trois mois, se fait sponsoriser par Disney [propriétaire d’ABC, l’un des partenaires de Facebook] pour filtrer les fausses informations de sa plate-forme », ironisait, à la fin de décembre 2016, l’un des journalistes du Wall Street Journal.
C’est sur ce point que se concentre la majorité des critiques adressées à Facebook. Non pas sur l’intérêt ou la qualité de ses initiatives contre les fausses informations – l’outil de remontée des fake news étant encore en cours de test, les rédactions partenaires estiment qu’il faudra du temps pour juger de son efficacité – mais sur le manque de moyens financiers que semble vouloir y consacrer le premier réseau social au monde, en décalage avec la volonté qu’il affiche.
Il y a une semaine, Adam Mosseri, l’un des vice-présidents de Facebook, a publiquement évoqué pour la première fois la possibilité de rémunérer les médias partenaires du réseau social. « Une relation commerciale est envisagée et nous y sommes très ouverts. Nous tenons à nous impliquer de manière responsable et s’il faut passer par un accord financier, c’est tout à fait possible de notre côté », a-t-il déclaré au Financial Times.