Le symbole est fort : un attentat contre des policiers, sur les Champs-Elysées, à deux pas du pouvoir présidentiel et au moment même où se tenait le dernier débat avant le premier tour de l’élection présidentielle.

Un policier a été tué et deux autres grièvement blessés, jeudi 20 avril aux alentours de 21 heures, par un homme, qui a très vite été abattu. Le parquet antiterroriste s’est saisi de l’affaire à la suite d’une revendication de l’attaque par l’organisation Etat islamique. Un conseil de défense s’est tenu vendredi matin à l’Elysée.

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  • Un policier tué et deux autres blessés grièvement

PHILIPPE LOPEZ / AFP

Jeudi en début de soirée, un homme armé descend d’un Audi grise, juste après s’être garé près d’un fourgon de police. Il ouvre le feu avec une arme automatique sur des policiers de la 32e compagnie d’intervention de la direction de l’ordre public et de la circulation de la préfecture de police de Paris (DOPC). L’un d’entre eux est tué et deux autres blessés grièvement. Une touriste allemande a également été blessée au talon, touchée par un éclat de balle. Après quelques minutes de confusion, le terroriste a été abattu sur le trottoir des Champs-Elysées.

  • Le terroriste, un homme connu des services de police

L’identité de l’auteur de l’attaque n’avait pas été confirmée de source officielle vendredi matin. Selon les informations du Monde, il s’agirait de Karim Cheurfi, un Français de 39 ans. Un individu considéré comme « excessivement dangereux et violent », qui était dans le radar de l’antiterrorisme depuis le début de l’année.

Il avait un casier judiciaire bien rempli et était connu des services de police, notamment pour des faits de vols avec effraction, de violences volontaires et de rébellion. Selon nos informations, il n’était pas fiché S mais était surveillé depuis février après avoir proféré des menaces de mort à l’encontre des forces de l’ordre. Il était sorti de prison en 2015 après une peine de dix ans pour trois tentatives d’homicide.

  • Enquête en cours et revendication de l’EI

CHARLES PLATIAU / REUTERS

Le parquet antiterroriste doit éclaircir de grandes zones de flou sur les « complicités » éventuelles dont a pu bénéficier Karim Cheurfi, selon le procureur de la République de Paris, François Molins

Trois membres de son entourage familial ont été interpellés et placés en garde à vue – il s’agit d’une procédure classique, qui ne veut pas forcément dire qu’ils sont soupçonnés de complicité. Après une perquisition au domicile du terroriste, à Chelles, en Seine-et-Marne, des « éléments de radicalisation » ont été trouvés par les enquêteurs, selon nos informations.

Quelques heures après l’attaque, l’organisation Etat islamique (EI) a revendiqué l’attaque
par son organe de propagande Amaq, mentionnant un certain Abou Youssouf Al-Belgiki. Or, il ne s’agit vraisemblablement pas de Karim Cheurfi, qui n’est pas belge.

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  • Une piste belge

Les services antiterroristes belges ont alerté leurs homologues français sur leurs inquiétudes concernant le profil de l’un de leurs ressortissants, avant même que ne survienne l’attaque. Mais il n’y a aucune preuve qu’il s’agisse du terroriste mentionné par l’EI.

L’individu en question, âgé de 35 ans et résidant à Anvers, est soupçonné d’avoir voulu se rendre en France, selon le porte-parole du ministère de l’intérieur français, Pierre-Henry Brandet. Un billet de Thalys pour la France daté du 20 avril a été retrouvé à son domicile. Dans la nuit de jeudi à vendredi, l’homme s’est rendu dans un commissariat d’Anvers pour y témoigner de sa présence, selon son avocat. Selon les autorités belges, « il n’y a pas d’implication directe avérée en l’état ». Le gouvernement français n’écarte, lui, aucune piste pour l’instant.

  • Le dernier jour de campagne bouleversé

PHILIPPE WOJAZER / REUTERS

La campagne officielle pour l’élection présidentielle, qui s’achève à minuit, a été bouleversée par cette attaque. Certains des candidats ont annulé des déplacements, tels François Fillon, Emmanuel Macron, Benoît Hamon et Marine Le Pen, tandis que d’autres les ont maintenus, comme Jean-Luc Mélenchon, Nicolas Dupont-Aignan et Philippe Poutou.

Les principaux candidats ont, bien évidemment, évoqué l’attaque. Marine Le Pen a, par exemple, déroulé ses propositions habituelles sur l’immigration et les fichés « S », qui, en l’occurrence, ne concernent pas l’auteur de l’attaque de jeudi. Elle a mis en cause le « laxisme pénal inouï » qui a permis à Karim Cheurfi de sortir de prison après avoir purgé une peine de dix ans pour trois tentatives d’homicide.

Dans la matinée, Emmanuel Macron a déclaré sur RTL :

« Le risque zéro n’existe pas (…) J’entendais Mme Le Pen dire encore il y a quelques jours avec moi il n’y aurait pas eu tel ou tel attentat”, c’est à la fois irresponsable et mensonger. »

François Hollande a annoncé un « hommage national » rendu au policier tué. Après avoir participé à un conseil de défense exceptionnel à l’Elysée, le président de la République est allé à l’hôpital où sont les deux autres policiers blessés.

  • Sécurité au plus haut niveau pour le premier tour

Bernard Cazeneuve : « Il ne faut pas céder à la peur, à l'intimidation, à l'outrance »
Durée : 01:19

A l’issue de ce conseil de défense, le premier ministre, Bernard Cazeneuve, a déclaré que « rien ne devait entraver » l’élection présidentielle, « ce moment démocratique fondamental pour notre pays ».

Au total, plus de 50 000 policiers et gendarmes seront mobilisés, en complément des 7 000 militaires de l’opération « Sentinelle », des unités spécialisées d’intervention « placées en état d’alerte » et des services de renseignement pour assurer la sécurité des 67 000 bureaux de vote ouverts pour le premier tour, dimanche, et pour le second.

Mais, comme le dit au Monde un cadre de la police : « Il n’y a rien de radicalement différent dans la mesure où on est déjà en posture haute. »