Les Afghans demandent des comptes à la suite du carnage dans une base militaire
Les Afghans demandent des comptes à la suite du carnage dans une base militaire
Le Monde.fr avec AFP
Au moins 130 soldats ont été tués vendredi par une attaque de talibans à Mazar-e-Charif, dans le nord de l’Arghanistan, mais le bilan pourrait être encore plus lourd.
Enterrement d’une des nombreuses victimes de l’attaque survenue vendredi contre la base militaire de Mazar-e-Charif. | Mirwais Baizhan / AP
Les familles endeuillées enterraient leurs fils, dimanche 23 avril, après le carnage des talibans dans une base militaire du nord de l’Afghanistan qui a fait 130 morts au moins et, face à ce nouveau désastre, le pays réclame que des têtes tombent.
Le bilan reste imprécis, deux jours après la tuerie survenue vendredi à l’heure de la prière : la presse afghane s’accorde sur plus de 130 morts et quelques dizaines de blessés sévèrement atteints, faute de données officielles et de communication de la part du gouvernement, qui a décrété une journée de deuil national.
Bilan incertain et complicités interne
Le ministère de la défense s’en tient depuis vingt-quatre heures à « plus de cent tués et blessés », bilan de plus de cinq heures de carnage contre des soldats fauchés à la mosquée ou au réfectoire, désarmés, par dix hommes en uniforme, arrivés à bord de camions militaires avec fusils-mitrailleurs et vestes explosives.
En attendant une nouvelle communication prévue dimanche, le décompte des victimes – pour la plupart de jeunes recrues arrivées des provinces du Nord-Est pour suivre un entraînement – va de 135 à 140 et même 160, selon les médias citant des sources militaires à l’intérieur de la base du 209e corps d’armée, à une quinzaine de kilomètres de Mazar-e-Charif. Les talibans, pour leur part, revendiquent « 500 tués » mais ont coutume de gonfler les bilans.
Les rescapés interrogés par l’AFP à l’hôpital se demandaient également comment le commando avait pu tromper les sept barrages pour pénétrer dans la base avec ses armes, posant une nouvelle fois la question d’éventuelles complicités internes. Un porte-parole des talibans a précisé que quatre des dix assaillants étaient infiltrés au sein des forces armées afghanes.
« Certains responsables doivent partir »
Cette dissimulation et l’incapacité des responsables et des services de renseignement à protéger leurs forces armées au sein même d’une base militaire suscitent rancœur et indignation. Sur les réseaux sociaux, le chagrin le dispute à la colère et il s’agit surtout de demander des comptes : « Qui va démissionner après le désastre de Mazar ? Le ministre de la défense, le vice-ministre ou quelque lampiste ? », demande ainsi sur Twitter « Badloon », un analyste politique engagé dans les mouvements de jeunesse.
« La meilleure façon d’honorer [les morts] est de punir ceux qui ont failli ou coopéré avec l’ennemi : certains responsables doivent partir » renchérit un autre.
Beaucoup demandent la démission du ministre de la défense Abdullah Habibi et celle du commandant du 209e corps d’armée pour « négligence ».
Pour Atiqullah Amarkhail, analyste joint par l’AFP, le désastre de Mazar est d’abord « un fiasco total des services de renseignement qui se répète et se répète. Nous sommes face à une guérilla avec des combattants qui attaquent par petits groupes et causent d’énormes dégâts. On devrait apprendre à contrer leurs tactiques ».
L’hôpital de Kaboul visé en mars
Le mois dernier, c’est le plus grand hôpital militaire du pays, au cœur de Kaboul, qui subissait l’assaut concerté de plus d’une dizaine de terroristes pendant plus de six heures avec, comme à Mazar, des accusations portant sur des complicités au sein de l’établissement.
Là encore, le bilan officiel a été arrêté à une cinquantaine de tués contre toute vraisemblance, des rescapés et des sources de sécurité avançant plus du double. Le Parlement avait tenté de démettre les ministres de l’intérieur et de la défense, ainsi que le patron du NDS, les services de renseignement. Mais ils sont toujours en place.