le président iranien Hassan Rohani. | Vahid Salemi / AP

Finis, les mises en garde bienveillantes et le ton conciliant. Depuis peu, le président Hassan Rohani, en campagne pour sa réélection à la présidentielle du 19 mai, a décidé de hausser le ton. Si, lors des deux premiers débats télévisés, les 28 avril et 5 mai, le président ne s’en était pris que très incidemment à ses deux principaux adversaires – le maire de Téhéran Mohammad Bagher Ghalibaf et l’ancien procureur général Ebrahim Raisi –, depuis dimanche, ses discours marquent un net durcissement.

« Ne nous parlez pas de liberté, parce que la liberté aura honte de vous », a déclaré Hassan Rohani, le 7 mai, à Ouroumieh, dans le nord-ouest de l’Iran, à l’attention de ses adversaires qui lui reprochent son intolérance face aux critiques. Le lendemain, dans la ville de Hamedan (ouest), il a fustigé l’exonération d’impôt dont bénéficient les organisations liées à certains candidats : une allusion à Ebrahim Raisi, à la tête de la très riche fondation Astan Qods.

« Si vous, les jeunes, restez à la maison, sachez qu’ils érigeraient des murs (…) pour séparer les trottoirs réservés aux femmes de ceux réservés aux hommes, comme ils ont appliqué la ségrégation sur leurs lieux de travail », a mis en garde le président Rohani, cette fois-ci en référence à Mohammad Bagher Ghalibaf et sa gestion de la capitale, depuis 2005. « Encore une fois, le 19 mai, le peuple iranien montrera qu’il ne veut pas de ceux qui, pendant ces dernières trente-huit années [depuis la révolution, en 1979], n’ont su que pendre et mettre en prison », a lancé le président iranien à l’adresse de M. Raisi et de son passé de procureur.

Visite houleuse dans une mine

Ce changement d’approche radical est survenu quelques heures après une visite houleuse de M. Rohani, dimanche matin 7 mai, sur le site de la mine de charbon d’Azad Shahr, dans le nord du pays, où une explosion a fait 41 victimes le 3 mai, selon un bilan provisoire. Lors de cette visite, le président a été interpellé par des mineurs qui lui ont reproché d’avoir négligé leurs conditions de travail, leurs salaires impayés, et de n’être venu sur les lieux du drame que très tardivement.

« Nous n’avons pas de quoi manger, explique l’un des mineurs à M. Rohani, sur une vidéo filmée lors de la rencontre et diffusée sur Internet. Où est-ce que tu as été jusqu’à présent, Monsieur le président ? Sais-tu ce que veut dire le travail dans une mine ? » Au moment de quitter les lieux, le cortège d’Hassan Rohani a été pris à partie par des mineurs qui ont frappé à coups de pied et de poing son véhicule. L’incident a été immédiatement exploité par ses adversaires qui y voient la preuve de son incapacité à gérer le pays et à améliorer le sort des plus pauvres.

Alors que les principaux titres de presse réformateurs se réjouissent du « cri de colère » du président Rohani, le candidat conservateur Ebrahim Raisi a promis de « ne pas céder face à ces propos » et d’« ériger des murs entre le peuple et ceux qui piétinent ses droits ». Le dernier débat télévisé, vendredi 12 mai, s’annonce houleux.