Le secteur privé attire de plus en plus les titulaires d’un doctorat
Le secteur privé attire de plus en plus les titulaires d’un doctorat
Faute d’emploi stable en début de carrière dans la recherche publique, ils sont de plus en plus nombreux à se tourner vers le privé, selon une étude du Céreq.
Université Paris-I Panthéon-Sorbonne. | CAMILLE STROMBONI/CC BY-ND 2.0
« Les emplois du privé, en recherche et développement ou hors recherche, sont, plus qu’avant, une opportunité réelle pour les docteurs. Ainsi 39 % des docteurs diplômés en 2010 s’engagent dès leur entrée sur le marché du travail dans des carrières en dehors de la recherche publique », révèle une étude du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) diffusée en mai. Et pour cause, car les trajectoires professionnelles dans la recherche publique restent synonymes de passage plus ou moins long dans des emplois à durée déterminée, rappelle également le centre.
Les données de cette étude sont issues de deux interrogations, posées en 2013 et en 2015, à 8 000 docteurs dans le cadre de l’enquête « Génération 2010 » du Céreq. Cinq ans après leur soutenance de thèse, les docteurs obtiennent presque les mêmes conditions d’emploi que les diplômés des grandes écoles. « Si leur taux de chômage reste en moyenne supérieur (7 % pour les docteurs contre 5 % pour les ingénieurs), ils accèdent davantage aux emplois de cadres et les rémunérations sont équivalentes (autour de 2 400 euros). Par ailleurs, après cinq années de vie active, la part des docteurs employés à durée indéterminée est proche de celle des diplômés sortants de bac + 5 de l’université (respectivement 78 % contre 80 %) », a constaté le Céreq.
Un parcours « à étapes » dans le public
Dans la recherche publique, la titularisation demeure un parcours « à étapes », souligne l’étude. Plusieurs facteurs influencent ce parcours : les conditions de réalisation de la thèse (financement, durée) ; la qualité du travail de thèse (publications, rapport de soutenance) ; et, pour les postes en université, la qualification au Conseil national des universités (CNU).
En attendant l’accès à un poste permanent, les docteurs enchaînent des emplois à durée déterminée. Une note du ministère de l’éducation nationale publiée en février rappelait que 55 % des docteurs qui s’orientaient vers la recherche étaient concernés par des contrats précaires.
Trajectoire professionnelle selon la discipline du doctorat | Céreq
Autre facteur déterminant pour l’insertion : la discipline de thèse. Les docteurs issus des spécialités de maths-physique-chimie, sciences de l’ingénieur et informatique, de droit, économie gestion et sciences sociales ont des taux de chômage inférieurs à ceux de l’ensemble de la population des docteurs. Les docteurs en sciences de l’ingénieur et en informatique sont ceux qui se dirigent le plus vers le privé, notamment ceux de la recherche et développement (R&D). Les docteurs diplômés de droit, économie, gestion et sciences sociales sont les plus nombreux à accéder rapidement à la stabilité dans la recherche publique.
Des docteurs parfois sous-employés dans le privé
Pour les docteurs en sciences de la vie et de la terre (SVT), la situation est par contre « délicate », juge l’étude. « Ils sont plus souvent au chômage, occupent davantage des emplois à durée déterminée et sont majoritaires dans les trajectoires marquées par une instabilité dans la recherche publique ou un éloignement de l’emploi. » Les explications de ce phénomène sont multiples : emploi public bouché et secteur privé peu attractif, du point de vue de ces docteurs.
Si la majorité des docteurs insérés dans le privé se sont tournés très tôt vers ces emplois privés, qui peuvent être synonymes de meilleures rémunérations, « ils peuvent constituer une voie de repli pour ceux qui ont connu des trajectoires difficiles sur le marché du travail, le non-emploi ou l’instabilité dans la recherche publique », souligne l’étude du Céreq.
Enfin, les docteurs du privé se sentent souvent « employés en dessous de leur compétence, ce qui interroge sur leur place dans les organisations et plus spécifiquement dans les entreprises », conclut l’étude.