Le visage d’une fillette, victime du « mal absolu », à la une de la presse britannique
Le visage d’une fillette, victime du « mal absolu », à la une de la presse britannique
Nombre de tabloïds et de quotidiens anglais affichent en « une » de leur édition de mercredi le portrait de Saffie Rose Roussos, âgée de 8 ans, l’une des premières victimes identifiées de l’attaque terroriste de lundi.
Agée de huit ans, Saffie Rose Roussos a été l’une des premières victimes identifiées de l’attaque terroriste. | Emilio Morenatti / AP
La presse britannique a choisi de rendre hommage à l’innocence, au surlendemain de l’attaque terroriste qui a touché la ville de Manchester lundi 22 mai et a causé la mort de vingt-deux personnes et en a blessé cinquante-neuf, dont plusieurs enfants. Rares, en effet, sont les quotidiens à ne pas avoir choisi de mettre en « une » de leur édition de mercredi 24 mai le visage souriant et juvénile de Saffie Rose Roussos. Agée de huit ans, la fillette est devenue le symbole du « mal absolu » qu’est le terrorisme. « Saffie Rose Roussos était au concert avec sa sœur aînée, Ashlee, et sa mère, Lisa, toutes les deux hospitalisées, quand l’attaque a eu lieu », écrit ainsi le Daily Mirror, qui titre : « Tuée par le mal »
Le tabloïd rapporte le témoignage d’un voisin de la famille. « [Le père de Saffie Rose] est allé les chercher et il a finalement trouvé sa femme dans un état critique, sa fille aînée blessée et sa cadette perdue. Je pensais qu’il voulait dire qu’elle s’était perdue dans la foule, mais il voulait désespérément dire qu’il l’avait perdue pour toujours. »
« C’est le pire cauchemar pour n’importe quel parent. Il n’y a rien que vous puissiez faire ou dire pour soulager. Saffie Rose était une petite fille pétillante. Elle était vraiment jolie, absolument adorable. Elle avait tout pour vivre, et on lui a volé la vie. Pour quelles raisons ? », s’interroge la tante de la fillette, également contactée par le journal.
The Sun affiche également en « une » le portrait de l’enfant accolé à celui de l’auteur de l’attaque, Salman Abedi, 22 ans, avec le titre : « Le mal absolu » La petite est présentée par le tabloïd comme « la plus jeune victime de l’explosion ». « Saffie Rose était tout simplement une belle petite fille dans tous les sens du terme. Elle était aimée par tout le monde. On se souviendra affectueusement de sa chaleur et de sa gentillesse », dit au journal le directeur de l’école primaire où était scolarisée la fillette. Et d’ajouter : « Saffie était calme, modeste et créative. »
« Champ de bataille »
Choix éditorial identique du Daily Mail, qui affiche sur sa couverture la même photo de Saffie Rose — le visage légèrement penché, les lèvres roses —, « dont la mère qui se bat en ce moment pour sa vie ignore qu’elle est morte ». A la « une » du tabloïd, le portrait également de Georgina, 18 ans, prise en photo avec Ariana Grande, idole de la jeune Britannique, qui donnait un concert au moment de l’attaque.
« Maintenant, ils tuent nos petites filles », s’insurge le quotidien gratuit Metro. « Chaque jour la liste des victimes continue à s’allonger, mais nous devons nous souvenir de leurs noms et de leurs visages, pas de celui du terroriste qui les a assassinées lundi soir », écrit le journal, qui fait le portrait de dix victimes identifiées, dont celui de la fillette.
Dans son éditorial, The Guardian écrit que « ce n’est pas un réconfort de savoir que nous vivons dans une époque de terreur ». « Ce n’est pas non plus facile de savoir, maintenant, que par une nuit de printemps, parmi les milliers de personnes qui étaient dehors dans cette ville du nord du pays, […] il y avait des gens absorbés par des pensées banales mais aussi une personne dont les pensées ne l’étaient pas du tout. » Et de poursuivre, avec émotion et conviction :
« Nous devons reconnaître que le but d’une telle attaque nauséabonde est de semer la peur parmi notre population et de changer la manière dont nous envisageons notre vie. Un concert pop est un rite de passage pour de nombreux jeunes, qui implique une rupture avec les choix des parents, dont les goûts musicaux coïncident rarement avec ceux de leurs enfants, tout en affirmant une affinité culturelle partagée uniquement par leurs pairs. »
« C’est le syndrome de notre époque qu’un tel moment dans la vie d’une jeune personne puisse se transformer en champ de bataille et qu’une telle innocence doive être violemment déchirée pour des motifs idéologiques ou politiques. »
Manchester : la photo d’une jeune victime comme un symbole en « une » des journaux britanniques