Eau, nourriture, accès à l’asile… Ce que le Défenseur des droits demande pour Calais
Eau, nourriture, accès à l’asile... Ce que le Défenseur des droits demande pour Calais
Par Maryline Baumard
Après sa visite de terrain, Jacques Toubon demande au gouvernement d’humaniser la zone de non droit qu’est devenu le Calaisis pour les migrants.
Lors de la distribution des repas, à Calais, mercredi 21 juin. | DENIS CHARLET / AFP
De l’eau, de la nourriture, un lieu de répit et un accès pour le dépôt d’une demande d’asile. Voilà, en résumé, ce que le Défenseur des droits, Jacques Toubon, demande au gouvernement d’assurer aux quelque 600 migrants qui errent dans la région de Calais, pourchassés par les forces de l’ordre, empêchés de manger, boire et dormir.
M. Toubon a rencontré mardi 14 juin le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, pour évoquer la situation de ce lieu, qu’il avait qualifiée d’« exceptionnellement grave » à l’issue de sa visite du 12 juin.
Le Défenseur des droits avait publié, dès son retour de Calais, un compte rendu demandant que soit « dès à présent mis un terme aux atteintes aux droits fondamentaux les plus élémentaires dont sont victimes les exilés, notamment les mineurs, et qui demeurent à ce jour sans précédent ». Aujourd’hui, il demande des améliorations concrètes au gouvernement pour sortir de ce qui ressemble à une impasse et risque de conduire à des drames.
Interpellations lors du repas du soir
Les migrants sont en effet revenus en masse dans la zone de Calais, point le plus logique de passage vers la Grande-Bretagne, alors que l’exécutif précédent a fait comme si le problème était réglé depuis le démantèlement de « la jungle », en octobre 2016.
Face à ces retours, le ministre de l’intérieur a renforcé les équipes de police sur place. Les distributions de repas ont par ailleurs été interdites le midi, avant qu’un curé n’offre l’enceinte de son église pour qu’elles puissent avoir lieu.
Les distributions de repas du soir, réalisées par des associations, sont quant à elles soumises à un fort encadrement par les forces de police. Ces dernières profitent également de ce point de ralliement pour procéder à des interpellations de migrants.
A ce contexte déjà lourd, s’ajoutent l’usage de gaz lacrymogènes sur des exilés souvent très jeunes et le harcèlement des associatifs qui tentent de porter secours à ces centaines d’étrangers vulnérables.
Pour « un accès pérenne à l’eau »
De façon très pratique, la première requête de M. Toubon auprès du gouvernement est qu’« un accès pérenne à l’eau soit rendu possible ainsi que des distributions de repas adaptées aux besoins des exilés, dans des conditions dignes ».
Migrants à Calais, le 21 juin 2017. | DENIS CHARLET / AFP
Il préconise aussi que soient garantis « un accueil de jour spécialisé et la mise à l’abri des mineurs et des femmes dans des locaux situés sur le territoire de Calais ou à proximité immédiate ».
Il demande encore « un lieu où les exilés puissent se reposer, se laver et envisager la suite de leur parcours migratoire soit installé ».
M. Toubon termine sur un quatrième point : celui d’un accès à la demande d’asile. Depuis l’évacuation de « la jungle » il n’est plus possible d’engager à Calais une procédure pour obtenir le statut de réfugié. Les migrants sont censés se rendre à la préfecture de Lille.
Or, compte tenu des barrages policiers, il leur est impossible de faire ce déplacement. Ce qui constitue une entrave à l’application de la Convention de Genève. Le Défenseur des droits rappelle que de nombreux Erythréens présents là sont éligibles à ce statut de réfugié et que la préfecture de Calais doit leur rouvrir un guichet.
Retour en arrière
M. Toubon profite de ces préconisations pour rappeler qu’il avait déjà signalé dans ces précédentes décisions qu’une évacuation du camp de Calais « pouvait conduire à accentuer l’état de vulnérabilité des exilés déjà éprouvés par un parcours migratoire très difficile ».
Les associations présentes sur place regrettent que la situation dans le Calaisis ait fait un retour en arrière : désormais, disent-elles, elle ressemble à celle qui prévalait avant la mise en place d’un accueil de jour en 2015.
Les recommandations de M. Toubon réitérent celles émises dans son rapport publié le 6 octobre 2015, ou encore dans sa décision du 20 avril 2016. Le gouvernement d’alors s’en était offusqué. Avant de les suivre. En traînant des pieds.