Six questions sur les incendies qui ravagent le sud de la France
Causes, fréquence, recherche de responsabilités… six questions sur les incendies qui ravagent le sud de la France
Depuis plusieurs jours, dans le Sud-Est, les pompiers luttent contre des feux de forêt dont la vitesse moyenne de propagation peut atteindre 5 km/h, soit 83 mètres par minute.
Vidéo : images des incendies en Corse
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Le sud-est de la France n’en finit plus de brûler. Depuis plusieurs jours, les pompiers sont mobilisés dans le Var, le Vaucluse, en Haute-Corse et dans les Alpes-Maritimes pour lutter contre d’importants feux de forêts.
Une lutte de tous les instants pour sauver des territoires et leurs habitants, alors que ces incendies peuvent atteindre une vitesse de propagation de 5 km/h, soit 83 mètres par minute.
Pourquoi le sud de la France est-il autant touché ?
Avec près de 24 000 hectares de surface incendiés par an en moyenne entre 1973 et 2008, la région méditerranéenne française fait partie des cinq régions européennes les plus touchées par les incendies de forêt.
Plusieurs facteurs l’expliquent. D’abord, le climat. Avec des températures importantes, souvent ponctuées par un vent chaud et imprévisible, tout concorde à favoriser les départs de feu. La végétation est également un facteur aggravant. En été, dans le sud de la France, des plantes comme les herbacées terminent leur cycle de vie, et les pins perdent leurs aiguilles pour diminuer leur masse foliaire. Autant de matière sèche très combustible.
En outre, l’organisation spatiale du territoire est caractérisée par une grande proximité entre les espaces habités et les espaces naturels (forêts, maquis, garrigues, etc.). Un aménagement du territoire qui s’explique notamment par une importante déprise agricole, qui engendre un embroussaillement important. S’ajoute à cela une gestion encore trop faible des espaces naturels et forestiers, mais aussi l’expansion des zones urbaines et la présence toujours plus importante de résidences au sein même des forêts.
Les feux de forêt n’existent-ils qu’en été ?
Le phénomène est nettement moins connu, mais les hivers, parfois assez peu arrosés en montagne, sont aussi favorables au départ d’incendies, notamment à la fin de la saison, quand l’herbe a gelé, ce qui l’a déshydratée.
« Dans les régions où la montagne touche la mer, comme les Alpes-Maritimes, par exemple, il est fréquent que la fin d’hiver connaisse davantage d’éclosions d’incendie que l’été », note ainsi un rapport sur l’évolution du risque d’incendies de forêt en région méditerranéenne. En revanche, ces incendies ont souvent une portée très limitée.
Les incendies sont-ils plus nombreux aujourd’hui ?
La tendance globale est à la baisse. Créée en 1973, la base Prométhée recense les données statistiques sur les incendies de forêts dans les quinze départements de la région méditerranéenne. D’après ces chiffres, le nombre de feux forestiers n’a cessé de diminuer depuis les années 1990, à l’exception toutefois de l’année 2003, dernière canicule majeure dans le pays.
Durant la période 2008-2016, le pourtour méditerranéen a enregistré en moyenne 1 602 feux par an, contre 2 428 pour la période 1999-2007 et 2 595 pour la période 1990-1998. En ce qui concerne les surfaces brûlées, 12 193 hectares de forêt ont été touchés en moyenne chaque année entre 1991 et 2002, puis 7 011 hectares entre 2004 et 2016.
Malgré l’augmentation des températures dues au phénomène de réchauffement climatique, le nombre d’incendies est donc en baisse, et ce notamment grâce à un important travail de sensibilisation et une meilleure connaissance des causes des départs de feu.
Des vacanciers à La Croix-Valmer, près de Saint-Tropez, mardi 25 juillet. | VALERY HACHE / AFP
Quelles sont les causes des incendies ?
Selon l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture, plus de 92 % des incendies sont d’origine humaine. Parmi eux, environ 30 % sont volontairement allumés.
Le reste est imputable à des activités humaines, que ce soit des travaux, des dépôts d’ordure, de la circulation automobile ou ferroviaire, des lignes électriques ou encore des jets de mégot.
Comment enquête-t-on sur les incendies ?
2003 a été une année décisive dans la lutte contre les incendies. Avec des chaleurs record, plus de 61 000 hectares étaient partis en fumée cette année-là sur le pourtour méditerranéen français. De ce constat sont nées plusieurs initiatives locales pour une meilleure organisation des cellules d’enquête, et la généralisation d’une nouvelle activité : la RCCI, pour « recherche des causes et circonstances d’incendie ».
Le Var, puis la Haute-Corse, les Alpes Maritimes et les Alpes-de-Haute-Provence ont mis en place, sur décision du procureur général, des cellules pluridisciplinaires d’investigation sur la recherche des causes des feux de forêt. Fonctionnant généralement par équipe de trois personnes, celle du Var compte ainsi une vingtaine de personnels issus de la gendarmerie, des sapeurs-pompiers et de l’Office national des forêts.
En mars 2011, une circulaire du ministère de l’intérieur est venue encadrer l’activité de RCCI et en préciser les obligations de formation. Le travail de l’investigateur consiste notamment dans l’interprétation des traces laissées par un incendie, qui doit permettre de déterminer l’origine du feu, le lieu et les circonstances de son éclosion.
Pour cela, les spécialistes observent le degré de carbonisation des végétaux, plus ou moins desséchés, ainsi que le sens de torsion, qui donne une idée de l’orientation et de la progression des flammes. Chaque élément est étudié de près, notamment les coquilles d’escargot, dont la couche de calcaire éclate à la moindre chaleur et constitue un indice précieux pour déterminer de quel côté le feu est arrivé.
Avec tous ces indices additionnés des données météorologiques, les enquêteurs parviennent à déterminer un « point zéro », qui est passé au crible pour trouver les circonstances exactes de la naissance du feu. Si la foudre est suspectée, un logiciel permet de déterminer précisément où des éclairs ont frappé.
Que risque une personne responsable d’un départ de feu ?
Les procédures de justice sont encadrées par les articles 322-6 et suivants du code pénal.
Les auteurs, même involontaires, d’un incendie sont systématiquement recherchés. Si l’identification est rendue difficile par le manque de témoignages dans des zones souvent peu fréquentées, l’auteur d’un départ de feu par imprudence est passible d’une peine allant de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
En outre, ne pas se déclarer en cas de responsabilité d’un incendie par négligence est un délit pour inaction fautive, également condamnée.
Les incendiaires volontaires, jugés en cour d’assises, encourent une peine allant de quinze ans de réclusion criminelle et 150 000 euros d’amende à la réclusion criminelle à perpétuité et 200 000 euros d’amende, en fonction des dommages causés aux personnes et des morts éventuels.