C’est dans une ambiance tendue qu’ont débuté les travaux de l’Assemblée constituante vénézuélienne, samedi 5 août, une semaine après une élection entachée de violences qui ont fait dix morts. Le président Nicolas Maduro a donné pour mission à cette Assemblée, placée au-dessus de tous les pouvoirs, y compris de celui du président, de réécrire la Constitution de 1999 promulguée par Hugo Chavez, d’apporter la « paix » et de redresser l’économie du pays, en lambeaux.

Les 545 membres de la Constituante sont tous proches du pouvoir, l’opposition ayant boycotté le scrutin, dénonçant une « fraude » et accusant Nicolas Maduro de vouloir accroître ses pouvoirs.

Réunis dans le « salon Elliptique », à quelques dizaines de mètres de l’hémicycle dans lequel se réunissent les députés élus à la fin de 2015, et majoritairement issus de l’opposition, les constituants ont fait savoir qu’ils siégeraient pour une durée maximale de deux ans. « Ce qui est envisagé, c’est la coexistence (...), expliquait quelques jours avant son élection Delcy Rodriguez, qui préside désormais cette Assemblée. Ce qui ne peut pas arriver, c’est que les pouvoirs constitués méconnaissent les décisions de l’Assemblée constituante. »

Parmi les 545 membres de cette Assemblée, dont la première décision a été de limoger, par un vote à main levée, la procureure générale Luisa Ortega, cinq femmes et hommes du cercle rapproché de Nicolas Maduro piloteront la rédaction de la nouvelle Constitution.

  • Delcy Rodriguez

Delcy Rodriguez, le 5 août. | MARCO BELLO / REUTERS

Avocate de 48 ans, Delcy Rodriguez, qui préside la Constituante, a été cheffe de la diplomatie vénézuélienne de décembre 2014 à juin 2017, une période marquée par de fortes tensions avec les Etats-Unis, des gouvernements d’Amérique latine, l’Espagne et des organisations internationales, telles que l’Organisation des Etats américains (OEA). Sous sa houlette, le Venezuela a décidé en avril de quitter l’OEA, une première pour cette organisme régional. Delcy Rodriguez avait copieusement insulté son secrétaire général, Luis Almagro. Elle s’est également vivement opposée aux présidents argentin, Mauricio Macri, et péruvien, Pedro Pablo Kuczynski.

Pour sa défense passionnée de la révolution, M. Maduro l’appelle « la tigresse ». Fille d’un dirigeant communiste assassiné en 1976 et sœur de l’influent dirigeant Jorge Rodriguez, elle fit partie du gouvernement d’Hugo Chavez.

  • Diosdado Cabello

Diosdado Cabello, le 5 août à Caracas. | MARCO BELLO / REUTERS

Vice-président de la formation au pouvoir, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), Diosdado Cabello, 54 ans, a présidé l’Assemblée nationale et était député du Parlement contrôlé par l’opposition. Il a abandonné son fauteuil pour siéger à la Constituante.

Dans son émission hebdomadaire télévisée, « Con el Mazo Dando », (« En frappant avec le gourdin »), où il apparaît régulièrement avec un gourdin ou une batte de baseball en main, il traite avec sarcasme la coalition de l’opposition (MUD), la qualifiant de « bourbier ». Lors d’une réunion politique, l’ancien vice-président Aristobulo Isturiz l’avait présenté comme « la terreur » des adversaires du gouvernement.

En tant que lieutenant de l’armée, il a participé à la tentative de coup d’Etat de 1992 contre le président Carlos Andrés Pérez, dirigée par Hugo Chavez. Il fut également vice-président et même président durant quelques heures lors du putsch d’avril 2002 contre Hugo Chavez. En tant que directeur de la commission des télécommunications, il a fermé trente-deux stations de radio en 2009.

  • Cilia Flores

Cilia Flores, l’épouse du président Maduro et membre de l’Assemblée constituante, le 5 août à Caracas. | Ariana Cubillos / AP

« La première combattante », comme Nicolas Maduro appelle son épouse, Cilia Flores, est une avocate de 60 ans, qui a renoncé à son fauteuil de députée pour se présenter à la Constituante. Elle faisait partie des défenseurs de Chavez quand ce dernier était en prison après le coup d’Etat de 1992.

Sous le gouvernement du « Comandante » (1999-2013), elle fut présidente du Parlement et procureure. A la fin de 2015, elle fut éclaboussée par l’arrestation de ses deux neveux par les autorités américaines en Haïti. Ils sont accusés d’avoir voulu importer aux Etats-Unis de la cocaïne. Elle a épousé Nicolas Maduro en juillet 2013. Le président l’appelle régulièrement « Cilita, la bonita » (« Cilita, la jolie ») en public.

  • Iris Varela

Iris Varela, au côté du président Maduro, le 26 juillet à Caracas. | HANDOUT / REUTERS

Avocate au verbe incendiaire, ce qui lui a valu d’être appelée « Fosforito » (« petite allumette ») par Nicolas Maduro, Iris Varela, 48 ans, a été députée durant plus d’une décennie. Ministre jusqu’en juin, elle a dû faire face à une série de plaintes pour la mort de prisonniers par manque de nourriture et de médicaments dans les prisons, et de violentes mutineries. Elle a également fait participer des prisonniers à une manifestation contre le référendum révocatoire, suspendu depuis, lancé par l’opposition à la fin de 2016 contre Nicolas Maduro. Un autre épisode avait marqué les esprits : elle avait coursé et frappé un journaliste durant un entretien télévisé, en le traitant de « calomniateur ».

  • Aristobulo Isturiz

Aristobulo Isturiz (debout, au micro), vice-président de l’Assemblée constituante vénézuélienne, le 5 août. | Ariana Cubillos / AP

Enseignant, âgé de 70 ans, il a occupé de nombreux postes sous les gouvernements de Chavez et de Nicolas Maduro. Passé par le parti Action démocratique (AD, social-démocrate), formation politique la plus puissante du pays jusqu’à l’arrivée d’Hugo Chavez au pouvoir, en 1999, Aristobulo Isturiz a été vice-président de Nicolas Maduro entre janvier 2016 et janvier 2017. Ancien syndicaliste, député, maire, gouverneur et ministre, il a la réputation d’être un conciliateur et conserve des liens d’amitié avec des dirigeants de l’AD.