Les policier danois s’affairent sur le mini sous-marin « UC3 Nautilus », à  Copenhague (Danemark), le 13 août 2017. / Jacob Ehrbahn / AP

Dans une série télévisée suédo-danoise, Bron (Le Pont), un cadavre était retrouvé coupé en deux, au beau milieu du pont reliant les deux pays. L’histoire qui tient en haleine les Scandinaves depuis le 10 août est de cette veine dramatique. Pas de cadavre ici, mais une disparue, une femme de 30 ans dont le sort inquiète.

Kim Wall est une journaliste suédoise indépendante, originaire de Scanie, la région méridionale du pays, face à Copenhague, la capitale du Danemark, dont elle est séparée par ce fameux pont. Le 10 août, Mme Wall « embarque » pour un reportage sur un mini-sous-marin, le UC3 Nautilus, inventé et piloté par Peter Madsen, un Danois de 46 ans. Et depuis, mystère.

L’alerte est donnée dans la nuit de jeudi à vendredi, à 2 h 30, lorsque le compagnon de Kim Wall, inquiet de ne pas la voir revenir, signale sa disparition. Quelques heures plus tard, c’est le constructeur lui-même, M. Madsen, qui appelle les autorités à l’aide : son sous-marin a des problèmes techniques. Lorsque les secours arrivent, vers 10 h 30, le Danois est sauvé, mais le sous-marin vient juste de couler. Hasard ? En tout cas, la journaliste suédoise n’est pas là.

Un débarquement sans témoin

M. Madsen affirme qu’il l’a débarquée jeudi soir aux environs de 22 h 30, au même endroit où il l’avait embarquée en présence d’amis à elle, trois heures et demie auparavant, près du restaurant Halvandet, sur Refshaleoen, une presqu’île de la capitale juste en face de la petite sirène de Copenhague. Un débarquement sans témoin, puisque le restaurant ferme à 22 heures. Aucune information n’a encore été dévoilée de l’analyse des caméras de vidéosurveillance présentes dans le périmètre de l’établissement.

Le Danois affirme que les problèmes techniques seraient apparus ensuite, durant la nuit. Mais la police danoise, chargée de l’enquête, ne se satisfait pas des explications du sous-marinier, et affirme, lundi, que le navire a été délibérément coulé. Elle soupçonne Peter Madsen d’avoir tué la jeune femme et est persuadée que l’homme a organisé le naufrage de son sous-marin pour effacer les traces, d’autant qu’il leur a donné des explications différentes. La police n’a pas donné, pour l’instant, plus de détails sur ces versions des faits.

Durant les quarante-huit heures suivantes, l’opinion a été suspendue au renflouement du petit sous-marin, localisé à sept mètres sous la surface de la mer dans le golfe de Koge, au sud-ouest de Copenhague. Remonté à la surface samedi après-midi, l’appareil est inspecté dans la nuit de dimanche, mais est vide. Les enquêteurs le considèrent toutefois comme une « scène de crime » potentielle.

Reconstitution du parcours de l’« UC3 Nautilus »

Peter Madsen, l’inventeur et propriétaire de l’ « UC3 Nautilus », à Copenhague (Danemark), le 11 août 2017. / SCANPIX DENMARK / REUTERS

Hélicoptères, avions de recherches, navires de l’armée, plongeurs, appels au public, la mobilisation est impressionnante pour retrouver la jeune journaliste, que ses collègues décrivent comme sérieuse et à l’aise sur le terrain. La police danoise tente désormais de reconstituer le parcours potentiel du sous-marin entre jeudi 19 heures et vendredi 10 h 30.

Selon certaines estimations, l’UC3 Nautilus aurait pu parcourir plus de 170 kilomètres, aller et retour. L’une des hypothèses de l’enquête des Danois est que le sous-marin aurait atteint les eaux allemandes avant de revenir. La police analyse les données de navigation du navire, tandis que les courants marins dans le détroit de l’Öresund les incitent également à explorer les eaux suédoises.

Depuis samedi, M. Madsen est inculpé d’« homicide involontaire par négligence », pas de meurtre, pour l’instant, puisqu’il n’y a pas de corps. L’inventeur danois a annoncé, par l’intermédiaire de son avocate, qu’il ne contestait pas sa détention provisoire pour vingt-quatre jours, mais il continue à rejeter toutes les accusations d’homicide.