Pierre Gasly, le 21 octobre 2016 à Austin (Etats-Unis) dans les stands Red Bull. / MARK THOMPSON / AFP

L’écurie Toro Rosso a anticipé sa décision. Le jeune pilote français, Pierre Gasly, va effectuer ses premiers tours de pistes en Formule 1 ce week-end, en Malaisie, dans le baquet de la monoplace du Russe Daniil Kvyat, qui a visiblement consommé le capital patience de l’écurie sœur Red Bull. C’est d’ailleurs du centre de formation de Red Bull qu’est issu le jeune Pierre Gasly, 21 ans, champion en titre de GP2 en 2016 et actuellement deuxième (à 0,5 point) du leader au Super Formula Series au Japon.

Mardi 26 septembre, l’équipe a confirmé la titularisation de Pierre Gasly dans un communiqué : « Pour les Grands Prix à venir, Pierre Gasly pilotera pour la Scuderia Toro Rosso aux côtés de Carlos Sainz, » jusqu’à son départ chez Renault programmé en 2018. Pour se donner les moyens de « prendre une décision informée quant à nos choix de pilotes pour 2018 », ajoute le directeur de l’équipe, Franz Tost. Né à Rouen (Seine-Maritime), Pierre Gasly, retrouve dans l’élite l’autre Normand Esteban Ocon, lui aussi âgé de 21 ans.

Ironie de l’histoire, le Rouennais va effectuer ses débuts lors de l’ultime Grand Prix de Malaisie, dimanche 1er octobre à Sepang. Ainsi en a décidé le gouvernement local en début d’année, avec un an d’avance, en raison de coûts financiers élevés et d’une baisse des recettes. Le Premier ministre malais, Najib Razak, s’en expliquait vendredi 7 avril : « Le conseil des ministres a décidé de mettre fin au Grand Prix de Formule 1 à compter de 2018, compte tenu de la faible rentabilité comparée à ce que coûte l’accueil de la course. » Alors que le gouvernement malais, propriétaire du circuit, dépense 62 millions d’euros par an pour la course, les rentrées financières basées sur la billetterie ne cessent de chuter. La fréquentation du circuit de Sepang, qui peut accueillir 120 000 personnes, est ainsi tombée en 2016 à 45 000 spectateurs.

Inauguré le 9 mars 1999, le circuit de Sepang accueille, le 1er octobre 2017, son 19e et dernier Grand Prix de Fiormule 1. / CAP

Le directeur du circuit de Sepang frustré

En cause, entre autres, la proximité géographique et temporelle du Grand Prix de Singapour, plus attractif par sa course de nuit et ses horaires de diffusion. Mais peut-être aussi, un « loyer » abusif de la FOM (Formula One Management), promoteur de la F1

L’ex-patron de la FOM, le Britannique Bernie Ecclestone, remplacé en janvier par l’Américain Chase Carrey, n’a pu en effet s’empêcher de mettre de l’huile sur le feu, en déclarant au site Autosport mi-avril, à Bahreïn : « Lorsque j’ai convaincu ces gens de construire [le] circuit [de Sepang] et tous les autres [nouveaux], je me sentais un peu responsable. Je les ai trop fait payer pour ce que nous leur proposions alors. Tôt ou tard, je craignais que les gouvernements [concernés] disent : “Ça suffit et au revoir”. »

Des propos en forme de provocation de la part d’un vieil homme de 86 ans écarté soudainement du pouvoir ? Bernie Ecclestone nous a « fait passer pour des idiots », ripostait de Londres, via l’AFP, Razlan Razali, directeur du circuit de Sepang, vendredi 28 avril. « Je ne comprends pas pourquoi [Bernie Ecclestone] a fait ce genre de déclaration. C’est frustrant. En tant que client fidèle depuis dix-neuf ans, cela traduit un total manque de respect et cela nous a fait passer pour des idiots. »

Un tracé signé Hermann Tilke

Inscrit au programme du championnat du monde depuis 1999, le Grand Prix de Malaisie a pourtant su marquer sa différence dès l’origine. Il est en effet le premier conçu par le designer autrichien, Hermann Tilke, à partir de rien. Construit dans le temps record de quatorze mois, long de 5,543 km, le tracé a tout de suite été considéré comme révolutionnaire à son ouverture, le 9 mars 1999, tant pour sa technologie d’amortissement des chocs en virage que pour sa forme originale. La piste, large, autorise de nombreuses zones de dépassement, et les deux lignes droites permettent des pointes de vitesse seulement limitées par l’accroche aérodynamique. Les pilotes passent ainsi 17 % d’un tour de circuit à freiner. Les pneus sont extrêmement sollicités, d’autant que le revêtement est particulièrement abrasif et la température ambiante élevée (entre 35 et 40 degrés). Ajoutez à cela des pluies diluviennes fréquentes, et vous obtenez l’enfer sur terre des pneumatiques.

Pour les pilotes, Sepang est avec Singapour un des circuits les plus physiques de l’année. Ainsi les techniciens de Red Bull ont calculé que leurs pilotes Daniel Ricciardo, vainqueur à Sepang en 2016, et Max Verstappen encaissaient l’équivalent de 124 coups de poings par course. Pierre Gasly est-il prêt à prendre des coups ? Il s’est déclaré, mardi 26 septembre, « aussi prêt que possible » après avoir travaillé en tant que troisième pilote cette année pour Red Bull.