Le « Président des riches » ?
Le « Président des riches » ?
Par Frédéric Douet (Professeur de droit fiscal à l’université de Rouen-Normandie)
Une contribution fiscale généralisée (CFG) permettrait d’en finir avec l’étiquette qui colle à Emmanuel Macron, estime Frédéric Douet, professeur à l’université de Rouen-Normandie, dans une tribune au « Monde ».
« En supprimant les niches fiscales qui n’auraient plus lieu d’être, les recettes de la CFG avoisineraient celles attendues de l’impôt sur le revenu et de la CSG » (Photo: Emmanuel Macron sur TF1, le 15 octobre). / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE
Tribune. La fiscalité sur les revenus est illisible. D’un côté, l’impôt sur le revenu, qui rapporte 70 milliards d’euros par an, est payé par un foyer fiscal sur deux. C’est un véritable gruyère truffé de niches fiscales, dont le coût s’élèverait à 32 milliards d’euros par an.
De l’autre, les prélèvements sociaux qui sont des doublons de l’impôt sur le revenu, avec principalement la contribution sociale généralisée (CSG), dont le produit devrait passer de 100 à 120 milliards d’euros par an après la hausse de 1,7 point prévue à compter du 1er janvier 2018.
L’annonce de l’exonération de taxe d’habitation pour 80 % des foyers d’ici 2020 et de la suppression des cotisations maladie et chômage ne suffira sans doute pas à calmer la grogne fiscale des retraités (qualifiés de privilégiés à partir de 1 200 euros de revenus par mois) et des fonctionnaires, toujours dans l’attente de mesures précises en contrepartie de cette hausse.
Trois taux constants
En ajoutant à cela la réforme de l’impôt sur la fortune (ISF) et la « flat tax » sur les dividendes, il n’en faut pas plus pour que le président Macron se voit coller l’étiquette de « président des riches », voir des ultra-riches, avec la polémique sur le sort des jets et des yachts en matière d’impôt sur la fortune. Bref, l’étiquette de « président des riches » colle à Emmanuel Macron comme le sparadrap au capitaine Haddock [dans L’Affaire Tournesol].
La contribution fiscale généralisée (CFG) permettrait de sortir par le haut de cette polémique. L’idée consiste à fusionner l’impôt sur le revenu (en supprimant les niches fiscales) et les prélèvements sociaux pour les remplacer par une CFG à trois taux constants dès le premier euro :
– 0 % pour les revenus inférieurs à 1 900 euros bruts par mois. Cela représente une baisse des recettes de 4 milliards d’euros par an. Mais vingt-deux millions de contribuables verraient leurs revenus exonérés de CFG ;
– 12 % dès le premier euro pour les dix-huit millions de contribuables ayant un revenu compris entre 1 900 et 5 000 euros bruts par mois ;
Redonner du pouvoir d’achat
– et 25 %, dès le premier euro, pour les cinq millions de contribuables disposant d’un revenu mensuel brut supérieur à 5 000 euros.
En supprimant les niches fiscales qui n’auraient plus lieu d’être, les recettes de la CFG avoisineraient celles attendues de l’impôt sur le revenu et de la CSG. La CFG redonnerait véritablement du pouvoir d’achat, notamment aux vingt-deux millions de contribuables qui y échapperaient.
De quoi relancer l’attractivité de la France et l’économie (et corrélativement les recettes fiscales), simplifier la fiscalité, réconcilier les Français avec l’impôt et, accessoirement, permettre au président Macron d’être le président de tous les Français…