Transition énergétique : l’urgence des choix
Transition énergétique : l’urgence des choix
Editorial. Nicolas Hulot a annoncé que réduire la part du nucléaire en France à 50 % en 2025 n’est pas tenable. Il doit fixer un nouvel objectif sérieux et réaliste.
Nicolas Hulot a le mérite et le courage de la franchise. Mardi 7 novembre, au terme du conseil des ministres qui en a pris acte, le ministre de la transition écologique et solidaire a dit tout haut ce que beaucoup pensaient ou craignaient : l’objectif fixé par la loi de transition énergétique votée en 2015 n’est pas tenable. Pour réduire à 50 % en 2025, contre 75 % aujourd’hui, la part de l’électricité produite en France par les centrales nucléaires, il faudrait renoncer à fermer les centrales à charbon et construire de nouvelles centrales à gaz. Donc produire plus de gaz à effet de serre, au détriment des objectifs climatiques de la France.
« Je préfère le réalisme et la sincérité à la mystification », a asséné M. Hulot. Dont acte. Le constat n’en est pas moins affligeant. Car il revient à considérer soit que la loi adoptée à grands sons de trompe il y a deux ans pour mettre en œuvre un engagement pris par François Hollande en 2012 reposait sur une ambition illusoire, soit que les efforts nécessaires pour y parvenir n’ont pas été entrepris. A moins que les deux hypothèses ne se cumulent.
Réduire la part prépondérante du nucléaire dans le « mix » énergétique français est un objectif désormais largement partagé. Sans même parler des craintes suscitées depuis longtemps par le nucléaire et ravivées par la catastrophe japonaise de Fukushima, notre parc nucléaire est vieillissant, comme en témoignent les mises à l’arrêt de plus en plus fréquentes, pour réparation, des 58 réacteurs en activité. Quant à l’éventuel renouvellement de ce parc, il serait aujourd’hui excessivement coûteux et économiquement dissuasif.
Fixer un nouvel objectif sérieux et réaliste
Mais l’on peut s’interroger sur la vigueur des actions menées par les pouvoirs publics, ces dernières années, pour diversifier la production électrique française. Sauf à être accusé de renoncement à une mutation indispensable – ou de mener une politique de gribouille –, le gouvernement a donc le devoir de ne pas reproduire les mêmes erreurs. Ce n’est pas parce que l’objectif de 2025 semble difficile à atteindre que le gouvernement peut se dispenser d’en fixer un nouveau, incitatif, contraignant, aussi sérieux et réaliste que possible.
Le président de la République a demandé au gouvernement d’établir « une nouvelle trajectoire ambitieuse d’évolution de notre “mix” énergétique qui permette d’atteindre le plus rapidement possible les objectifs fixés » par la loi. Echaudés par les palinodies récentes, on jugera donc aux actes.
Pour être convaincants, les pouvoirs publics, comme les géants de l’énergie, doivent faire un vigoureux exercice de transparence et répondre à de redoutables questions. Combien de réacteurs nucléaires seront fermés, à quelles échéances et lesquels ? A quelle hauteur et à quel rythme seront engagés les investissements considérables nécessaires pour développer les énergies renouvelables (éolien, solaire…) pour lesquelles la France est cruellement à la traîne ? Ou pour engager une ambitieuse politique d’isolation thermique des bâtiments ?
Tous les scénarios proposés aujourd’hui (aussi bien par RTE, Réseau de transport d’électricité, filiale d’EDF, que par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie ou l’association négaWatt) montrent que des solutions variées existent pour engager la transition énergétique. Il revient aux responsables politiques de prendre leurs responsabilités et d’assumer leurs choix devant les Français. Gouverner, c’est choisir.