Energies renouvelables : Google s’achète une image de bon élève
Energies renouvelables : Google s’achète une image de bon élève
Par Lisa Burek
Le géant du web est en passe d’atteindre son objectif « 100 % d’énergies renouvelables » pour tous ses bureaux et data centers. Que cela signifie-t-il réellement ?
Google utilise des témoins à LED parce qu’ils sont plus économes en énergie et durables. / Google
Ils l’avaient annoncé en 2016, ils l’affirment aujourd’hui : Google est train d’atteindre son objectif de 100 % d’énergies renouvelables d’ici fin 2017 pour ses 70 bureaux et 15 data centers répartis dans le monde. Plus précisément, ce bilan tient compte de l’ensemble des filiales d’Alphabet, la maison mère de Google, qui rassemble Google Inc, Nest Labs, Sidewalk Labs, Google Fiber, Calico… Alphabet affirme, dans son rapport environnemental de 2017, être le premier acheteur d’énergies renouvelables au monde.
À chaque utilisation du moteur de recherche Google, à chaque page actualisée sur les comptes Gmail, à chaque vidéo téléchargée sur la plateforme Youtube… de l’énergie est utilisée. L’ensemble des infrastructures Google consommerait ainsi 5,7 térawatts-heures par an, soit à peu près l’équivalent d’une ville comme San Francisco (865 000 habitants). « Mais ce sont les data centers qui utilisent, de loin, le plus d’énergie », explique Marc Oman, responsable de l’approvisionnement en électricité pour les data centers de Google en Europe.
Qu’est-ce que ça veut vraiment dire, « 100 % d’énergies renouvelables » ?
Disons-le tout de suite : « 100 % d’énergies renouvelables » ne veut pas dire que la firme américaine alimente ses infrastructures uniquement avec de l’énergie propre. Ce chiffre signifie que la somme des énergies renouvelables achetées est égale à l’ensemble de l’électricité utilisée par l’entreprise.
L’énergie produite par les éoliennes et les panneaux solaires doit être reliée à un réseau pour être distribuée auprès des consommateurs ou des bâtiments qui en ont besoin. Ce réseau est géré par des fournisseurs d’énergie. Google achète donc cette énergie propre à un producteur pour la revendre à un fournisseur qui utilise aussi de l’électricité ordinaire.
Il est par ailleurs « difficile de tracer si l’énergie d’une ferme éolienne X va approvisionner un centre de données Y », peut-on lire dans un billet de blog de Gary Demasi, directeur des infrastructures de Google. Sans oublier que « les éoliennes et les panneaux solaires ne produisent de l’énergie que quand le vent souffle et le soleil brille », rappelle Marc Oman. Difficile aujourd’hui, donc, d’avoir une stabilité d’approvisionnement en n’utilisant que la production d’énergies renouvelables.
Des solutions existent, comme les « behind the meter » (systèmes de charge intégrés), des systèmes de stockages d’énergie qui s’installent directement sur le site de production, contrairement aux stockages actuellement installés sur le réseau (« In front of the meter »). En 2015, un rapport de la firme GTM Research (Greentech media) et de l’association américaine de stockage d’énergie (ESA) montrait que 90 % du stockage aux États-Unis était installé sur le réseau et 10 % derrière le compteur des consommateurs. Mais ces innovations ne sont pour le moment pas mises en place à l’échelle de la consommation de Google.
Parc éolien situé aux Pays-Bas. Google a acheté de l’énergie renouvelable dans ce pays pour alimenter ses data centers européens. / GOOGLE
Pour atteindre une si bonne note dans sa consommation d’énergie verte, Alphabet a investi de l’argent. Dès 2010, la firme américaine s’est engagée à injecter 2,5 milliards de dollars (2,1 milliards d’euros) dans des projets d’énergies renouvelables. Elle a par exemple acheté 114 mégawatts à un parc éolien de l’Iowa en 2010. Trois ans plus tard, la firme continuait ses investissements en ajoutant 100,8 mégawatts d’énergie éolienne d’un parc du comté de Mayes, dans l’Oklahoma.
Aujourd’hui, Google a signé des contrats avec vingt parcs éoliens et solaires dans le monde, notamment en Suède et aux Pays-Bas, pour alimenter ses centres de données européens, pour un total de 2,6 gigawatts. L’entreprise ne veut cependant pas communiquer sur le montant négocié de ces contrats. Le choix des énergies renouvelables serait par ailleurs le plus économique. Les prix de l’éolien et du solaire ont respectivement baissé de 60 et 80 % depuis 2010. Selon Marc Oman, cet aspect économique « n’est pas la seule motivation. Nos fondateurs sont aussi profondément engagés contre le changement climatique ».
Le modèle n’est donc pas irréprochable. « Mais nous travaillons déjà sur des solutions de stockage plus adaptées pour notre consommation », insiste Marc Oman. La société mère Alphabet annonce ainsi avoir baissé de 40 % sa consommation d’énergie des data centers grâce aux algorithmes élaborés par DeepMind, société anglaise spécialisée dans l’intelligence artificielle, rachetée par Google en 2014 pour un demi-million d’euros. C’est elle qui a élaboré AlphaGo, premier programme informatique à avoir gagné contre un être humain dès 2015.