Emboîtant le pas des Etats-Unis, l’Union européenne a annoncé, mardi 12 décembre, la suspension de son assistance à l’organisation des législatives de 2018 au Cambodge, une décision rare, après la dissolution du principal parti d’opposition.

« La Commission européenne a décidé de suspendre son assistance à la commission électorale », a annoncé la représentation diplomatique européenne à Phnom Penh. « Un processus électoral dont le principal parti d’opposition a été arbitrairement exclu ne peut être considéré comme légitime », a dénoncé la représentation européenne.

Le principal parti d’opposition, le Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), a été dissous en novembre, point d’orgue d’une longue série d’attaques orchestrées par l’homme fort du pays, Hun Sen, contre son seul adversaire crédible dans les urnes. Le CNRP avait fait un score remarqué, de plus de 40 %, aux législatives précédentes, en 2013, une percée confirmée lors des municipales de juin 2017.

Représailles de Washington

Au début de septembre, le chef du CNRP, Kem Sokha, avait été emprisonné et inculpé pour « trahison et espionnage » en faveur de Washington, des accusations passibles de trente ans de prison. Et le fondateur du parti, Sam Rainsy, est en exil en France pour échapper à des poursuites.

Washington tente aussi de faire pression de son côté : à la mi-novembre, les Etats-Unis avaient déjà annoncé suspendre toute aide à l’organisation des élections, qui « ne ser[aie]nt pas légitimes ». Washington a également décidé, en représailles, d’interdire l’entrée sur le territoire américain aux personnes qui « sapent la démocratie » au Cambodge.

Après l’annonce de non-assistance électorale de Washington, Hun Sen et la Commission électorale avaient assuré que les élections se tiendraient comme prévu, même sans aide ni observateurs internationaux.

Mardi, la Commission électorale a réservé le même accueil à l’annonce des Européens : « Les équipements, budgets, aspects techniques et ressources humaines sont déjà prêts », a réagi Som Sorida, secrétaire général de la Commission, interrogé par l’Agence France-Presse.

Hun Sen n’a, quant à lui, pas commenté la décision européenne mardi, mais s’est félicité de la dissolution de l’opposition. « Nous devons les garder à l’œil, car nous connaissons leurs plans pour une révolution de couleur au Cambodge », a-t-il insisté lors d’une réunion avec l’armée. Il ne cesse de brandir la menace, à l’occasion de ces élections, d’une « révolution de couleur », comme en Libye ou en Egypte, soutenue par Washington.