« Le penseur », de Rodin. / Pixabay

Pierre-Olivier Monteil, auteur d’Ethique et philosophie du management (Erès, 2016), enseigne l’éthique à HEC et à Paris-Dauphine. Selon lui, les étudiants sont en demande de réflexion sur le sens de leur futur travail et la façon de le conduire.

Pourquoi intervenez-vous en école de management ?

J’ai soutenu ma thèse en philosophie politique à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) après vingt-deux ans de carrière en entreprise. Ce sont deux mondes qu’il faut rapprocher pour que les philosophes sachent ce qui se passe dans la vraie vie et que les manageurs bénéficient de leurs apports théoriques. Avant mon premier cours à HEC, on m’a fait remarquer que j’aurais en face de moi des jeunes à qui le monde du travail allait dérouler le tapis rouge : « S’ils ne se posent pas des questions maintenant, ils ne s’en poseront plus jusqu’à leur retraite ! » La philosophie doit toucher ce public amené à prendre des responsabilités.

En quoi l’enseignement de l’éthique consiste-t-il ?

Il se concentre souvent sur les cas de conscience et les dilemmes. C’est important mais insuffisant. Dans mes cours, j’aborde aussi la question de l’éthique professionnelle : pourquoi est-ce que je m’engage dans mon travail ? Par intérêt, par calcul, par idéal ? Comment puis-je contribuer à l’engagement de mon équipe ? A chaque séance, on se penche sur une proposition philosophique que l’on met à l’épreuve de situations, à travers des textes de management ou de sociologie. Ainsi, au sujet de l’entretien individuel d’appréciation, on pourra se référer à Kant et à ses deux grandes catégories de jugement pour voir dans quelle mesure l’évaluation ne se joue pas que sur des règles et des chiffres.

« Plutôt que de raisonner en termes de performance, il faudrait se demander ce que nous faisons du présent »

Comment les étudiants accueillent-ils ces cours ?

En fin de chapitre, je conseille toujours quelques extraits de livres. Et je constate souvent que les étudiants d’HEC lisent les ouvrages de A à Z. Nostalgiques des cours de culture générale de classe préparatoire, ils sont heureux de renouer avec un registre plus littéraire. A Dauphine, j’enseigne à des professionnels en formation continue. A leur demande, on examine des cas de figure courants, comme le conflit. Là, on démêle ce qui relève du désaccord, de la mésentente ou encore du conflit de personnes…

Les manageurs rencontrent-ils, dans leur travail, des contraintes qui amplifieraient leur intérêt pour la philosophie ?

L’urgence est un problème qui se pose à beaucoup de salariés. La vision à court terme vide la vie de sens. On réagit comme si l’on avait peur d’une panne de temps mais il ne s’agit pas d’un stock qui se gère ! Plutôt que de raisonner en termes de performance, il faudrait se demander ce que nous faisons du présent.

Qu’espérez-vous apporter à vos élèves ?

L’idée est de semer des graines de réflexion qui permettront à tous de développer leurs propres ressources. L’éthique ne peut avoir réponse à tout, mais il s’agit de prendre conscience de la marge de manœuvre qu’on a selon les situations, et de la complexité des choses.

« Le Monde » aide les jeunes à s’orienter vers les études supérieures

Pour aider les 16-25 ans, leurs familles et les enseignants à se formuler les bonnes questions au moment d’effectuer les voeux d’orientation, Le Monde organise les conférences O21/s’orienter au 21e siècle, à Nancy (1er et 2 décembre 2017), Lille (19 et 20 janvier 2018), Nantes (16 et 17 février 2018), Bordeaux (2 et 3 mars 2018) et Paris (17 et 18 mars 2018).

S’y ajoutent des salons étudiants : après le salon des grandes écoles (SAGE) et celui des formations artistiques START, organisés chaque année en novembre et décembre, le Salon des masters et mastères spécialisés (SAMS) est prévu le 27 janvier. A consulter également, notre rubrique Le Monde Campus, et tout particulièrement ses sous-rubriques APB / Parcoursup, O21 et Etudes supérieures.