La Glasgow school of art, une école très pluridisciplinaire inscrite au programme Erasmus. / Jean-Pierre Dalbéra/CC by 2.0

Etudiant à l’Ecole ­nationale supérieure des Arts décoratifs (Ensad) à Paris, dans la spécialité « Design de la matière et du textile », Adrien Testard, 24 ans, a passé onze mois au Japon, à l’université Bunka de Tokyo. Dans le cadre d’un bi-diplôme, il y a fait sa quatrième année au département Mode. A côté de cours ­professionnalisants, comme à l’Ensad, il en suivait d’autres, ­généraux. Son mémoire a porté sur « Les ruines vivantes dans l’esthétique japonaise ». Un travail qui, à lui seul, illustre la ­richesse de son expérience.

Un vaste réseau

De plus en plus, les étudiants en arts appliqués et en arts ­plastiques suivent une partie de leur cursus à l’étranger. Les écoles, privées et publiques, ont multiplié les partenariats à travers le monde, dans le cadre du programme européen Erasmus et d’échanges entre établissements ou d’accords de bi-diplômes. Un vaste réseau s’est ainsi tissé à travers le monde qui relie les écoles, les plus prestigieuses – l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, l’ÉCALE de Lausanne… – comme les plus petites.

Les motivations sont multiples : quête d’autonomie, curiosité pour les autres façons de travailler…

Besoin d’autonomie, soif de voyage et de découverte, curiosité pour d’autres cultures ou d’autres façons de travailler… Les étudiants candidats au départ affichent de multiples motivations. Rares sont ceux qui, à leur retour, se disent déçus.

Adrien avait postulé pour le département mode de la Buna, à Tokyo, avant tout car cela lui donnait l’opportunité de découvrir un secteur qui l’intéressait. Il a beaucoup appris, également sur un plan personnel. « En vivant un an si loin, dans une culture si différente et avec la barrière de la langue, j’ai acquis une forme d’assurance », estime-t-il.

Anaïs Hervé, 22 ans, en quatrième année à lança, a rejoint en septembre l’Académie off Arts, Architecture and Design de Prague, en République Tchèque, dans le cadre d’Erasmus. Elle y ­restera un semestre. Dans le ­département textile, elle découvre une autre manière de travailler : « C’est plus créatif, moins technique, du fait même qu’il y a moins de matériel. Nous, nous avons des métiers à tisser, des ­machines pour la maille… et nous avons beaucoup de cours techniques. Ici, ils ont une approche plus expérimentale. »

Cinq mois à Glasgow

L’Académie praguoise est l’une des plus petites écoles européennes. Anaïs a préféré y postuler plutôt que dans un établissement plus connu pour lequel la concurrence est rude. « Je voulais être sûre de partir, explique-t-elle. En plus je souhaitais l’Europe, plutôt le Nord car je suis beaucoup allée dans le Sud, et un pays que je ne connaissais pas du tout. »

En deuxième année à l’école ­Camondo à Paris, établissement privé qui délivre un diplôme ­d’architecture intérieure et design, Edgar Jayet, 20 ans, a toujours aimé voyager loin. Après son bac, il s’est accordé une ­année de ­césure en Nouvelle-Zélande. Le 3 janvier, dans le ­cadre d’un échange, il partira un semestre au Hong Kong Design Institute. « J’avais une ­envie terrible de ­repartir », confie-t-il, estimant que « se confronter à une autre culture, à un autre mode d’enseignement, est essentiel pour un aspirant créateur ».

Cette envie de voyager peut aussi entrer dans une stratégie ­réfléchie. En quatrième année à Camondo, Charline Benazech, 22 ans, a passé cinq mois l’an ­dernier en Erasmus à la Glasgow School of Art, en Ecosse. « Je projette de travailler à l’étranger plus tard, explique-t-elle. J’ai demandé Glasgow car je voulais améliorer mon ­anglais. En plus, c’est une école très ouverte, pluridisciplinaire et ­internationale. » Sur les trente-cinq étudiants en architecture d’intérieur, seuls cinq étaient écossais. Une ouverture qu’elle a appréciée. Elle a aussi appris à ­travailler plus en autonomie.

Il y a une autre façon encore de partir étudier à l’étranger. Certains établissements se délocalisent. L’Ecole de design Nantes ­Atlantique propose ainsi chaque année à une vingtaine d’étudiants d’aller faire leur master à Shanghaï, sur le campus du tout nouvel Institut des Beaux-Arts. Le cursus est le même qu’à ­Nantes. Mais les étudiants vivent dans l’immense métropole ­chinoise, y font des stages et, ­durant ces deux ans, beaucoup en profitent pour voyager en Chine ou dans la région.

S’émanciper à Shanghaï

En première année de master, Marie-Alix Fieux et Gaëlle Rioual, 21 ans toutes les deux, sont arrivées fin août à Shanghaï. Gaëlle n’avait jamais mis les pieds en Chine. Mais elle est passionnée de culture asiatique, surtout japonaise et coréenne, grande amatrice de mangas. « J’ai l’impression d’être ici depuis ­longtemps, dit-elle, c’est un rythme de vie qui me convient. » Plus tard, elle aimerait travailler en Chine et espère que ce séjour sera un tremplin.

Marie-Alix, elle, garde un souvenir ébloui de son séjour dans une famille chinoise à Pékin, dans le cadre d’un échange ­scolaire. « Je voulais avoir un ­métier dans la création et revenir en Chine, c’est pour cela que j’ai choisi l’école avec ce master à Shanghaï », confie-t-elle.

Pour beaucoup, ces deux ­années à Shanghaï sont une ­formidable occasion de s’émanciper et de s’ouvrir à un monde ­inconnu. A peine arrivées, Marie-Alix Fieux et Gaëlle Rioual sont devenues ­accros à l’application mobile ­WeChat, qui permet de tout faire dans la métropole : prendre un vélo, payer ses courses, gérer son compte bancaire…