Drones et tourisme, les liaisons dangereuses
Drones et tourisme, les liaisons dangereuses
Par Jean-Michel Normand
Une entreprise a listé « les meilleurs endroits à visiter avec son drone ». Au mépris de toutes les règles encadrant l’usage des drones.
Le GoPro Karma. / GoPro
« Les meilleures destinations en Europe pour vous et votre drone ». L’invitation est alléchante, tant il est vrai que les amateurs de photographie aérienne ne partent plus sans leur drone. Les derniers modèles de quadricoptères sont toujours plus compacts et faciles à transporter pour être dégainés au plus vite, au détour d’une promenade. Avec comme corollaire, le risque de voir ressurgir le spectre de la soirée diapos… Surfant sur cette pratique, The Case Farm – fabricant britannique de valises spéciales pour transport de drone – a proposé un choix « des meilleurs endroits à visiter avec son drone à travers l’Europe ».
Le site de Stonehenge, en Angleterre. / Alastair Grant / AP
L’idée, remarquée par le site Dronelife, n’est pas tout à fait saugrenue. Mais, telle qu’elle est formulée, c’est une fort mauvaise idée, car les « spots » suggérés dans ce hit-parade posent parfois problème. Parmi elles figure, par exemple, le site de Stonehenge, dans le sud de l’Angleterre : un endroit que tout droniste rêve de survoler au lever du soleil mais qui risque de lui attirer les pires ennuis. « Vous aurez besoin d’une autorisation spéciale au préalable », est-il quand même précisé. Bon courage pour l’obtenir… Autre suggestion encore plus problématique, filmer la Sagrada Familia, à Barcelone. « Un challenge » assure The Case Farm qui ne fait figurer aucun avertissement. Le challenge en question promet à celui qui s’y risquerait de lui attirer les pires ennuis. En France, l’entreprise suggère de voler du côté de la vieille ville de Chambéry ou des pistes de La Plagne. Et conseille benoîtement de s’enquérir des règles édictées par la direction de l’aviation civile. Précaution inutile : en France, il est interdit de voler en ville et au-dessus des populations, donc des pistes de ski. Autres suggestions : filmer Dresde ou Split depuis le ciel. Les autorités locales vont adorer…
Le pilote de ce drone, photographié au-dessus du stade de Newport, en Angleterre, a été interpellé. / MATTHEW CHILDS / Action Images via Reuters
Alors, plutôt que de s’aventurer à l’aveuglette, on peut s’en remettre à l’application Mach7 Drones qui indique, selon l’endroit où l’on se trouve, s’il est possible de voler et, si oui, à quelle hauteur maximale. Sans oublier de préparer son voyage en avion, car les compagnies peuvent être chatouilleuses sur le transport des batteries. Est-ce à dire que l’on ne peut voler nulle part ? Il existe suffisamment de zones non fréquentées où l’on peut faire évoluer son drone l’esprit tranquille. Tous les pays disposent d’une réglementation qui leur est propre et dont il est préférable de prendre connaissance avant de faire décoller quelque engin que ce soit. Même dans les contrées les moins densément peuplées. En Australie, où l’on dénombre quelque 100 000 drones, les autorités s’inquiètent de leur prolifération et envisagent des dispositions contraignantes qui s’appliqueront aussi aux touristes. Et ce ne sont pas les quelques comportements irresponsables – dernier en date : le 27 janvier, en Angleterre, un pilote de drone qui faisait voler son engin au-dessus du stade où se disputait le match de FA Cup Newport-Tottenham, a été interpellé – qui inciteront les pouvoirs publics, dans un contexte de plus en plus sécuritaire, à se montrer un peu plus détendus.