Nolan Bushnell lors de la Games Developers Conference de 2011. / Max Photography for GDC Online

Nolan Bushnell, fondateur de la première entreprise de jeu vidéo, Atari, a félicité mercredi 31 janvier les organisateurs de la Game Developper Conference (GDC), un important salon réservé aux professionnels du secteur, pour leur décision de ne finalement pas lui remettre le prestigieux « Pioneer Award ». Ce prix récompense un apport majeur à l’industrie du jeu vidéo.

L’annonce de sa nomination avait suscité de nombreuses critiques de professionnelles du secteur, qui, témoignages d’époque à l’appui, ont fustigé le sexisme de la culture d’entreprise d’Atari et de son patron dans les années 1970 et 1980. Il lui est notamment reproché ses fréquentes tentatives de séduction sur le lieu de travail, ses réunions entre dirigeants dans des spas, avec invitation aux collaboratrice de les y rejoindre, ou encore sa politique d’embauche de secrétaires féminines en fonction de leur physique pour choyer les ingénieurs masculins.

« J’approuve la GDC, qui s’assure que leur institution reflète ce qui est juste, notamment du point de vue de la manière dont les gens devraient être traités sur leur lieu de travail, a écrit Nolan Bushnell dans un communiqué. Et si cela signifie qu’une récompense est le prix personnel que je dois payer pour que toute l’industrie soit plus éveillée et plus sensible à ces problèmes, je l’approuve également. Si par mes actes ou par ceux de toute personne ayant travaillé avec moi j’ai offensé ou causé de la souffrance au sein de mes entreprises, alors je m’en excuse sans réserve. »

« Ce n’est absolument pas un cas de “MeToo” » 

Certains commentaires reprochent à Nolan Bushnell d’employer le conditionnel dans ses excuses, et de ne pas prendre la mesure de la situation de domination dans laquelle sa position de chef d’entreprise le plaçait et des dégâts occasionnés. En réponse, une collaboratrice d’Atari entre 1977 et 1979, Loni Reeder, a pris la défense de l’ancien PDG.

« J’y ai travaillé. Je connais personnellement Nolan. J’ai cofondé une entreprise avec lui des années après. J’étais traitée convenablement, et bien payée. J’ai des camarades féminines d’Atari qui connaissent aussi Nolan. Aucune d’entre nous n’a été offensée par lui, par les noms de code [empruntés aux prénoms d’employées], ou par ses T-shirts. Ce n’est absolument pas un cas de “MeToo”. »

Contactée par Le Monde, Mireille Chevallier, présidente de Casino Slots & Parts et ancienne cadre d’Atari durant huit ans et demi, considère pour sa part que « Nolan était beaucoup aimé par la gent féminine », et qu’il n’a eu, à sa connaissance, que des relations consentantes. « Il est vrai que dans les années 1970, beaucoup de dirigeants à Atari, y compris Nolan, qui était à l’époque célibataire, ne se gênaient pas pour faire des propositions aux femmes, mais à cette époque, la vie et la mentalité au travail étaient complètement différentes. Si la femme le désirait, c’était son choix. »

Depuis l’explosion du mouvement #MeToo, plusieurs conceptions du féminisme s’opposent. L’une, héritée de la libération sexuelle, défend une « liberté d’importuner », et accepte les tentatives de séduction sur les lieux de travail. Une autre estime au contraire que les femmes doivent uniquement être considérées pour leurs compétences professionnelles et non comme des objets de séduction, a fortiori par des hommes en situation de pouvoir.