Elle est comme ça… Delphine Batho
Elle est comme ça… Delphine Batho
Par Philippe Ridet
A 44 ans, l’ancienne ministre de l’écologie du gouvernement Ayrault n’a pas réussi à se présenter pour le poste de première secrétaire du Parti socialiste.
Damien Cuypers pour M Le Magazine du Monde
Il y a longtemps, en 2014, Delphine Batho a écrit : « Je suis une “méga-enquiquineuse”. » On suppose que la députée socialiste a voulu rester polie. Dans un livre intitulé Insoumise (Grasset, 2014), publié après son limogeage du gouvernement Ayrault – elle avait critiqué la modestie du budget de son ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie –, elle se décrivait comme un roc de lin blanc et de probité candide face aux lobbys qui l’assaillaient de toutes parts. Solitaire, forcément ; héroïque, ça va de soi.
Le 15 janvier, dans Le Parisien, elle repartait en guerre en « candidate libre contre les verrouilleurs d’espérance » à l’assaut du Parti socialiste, dont elle découvre qu’il est dominé par des « petites mafias ».
Persuadée, comme Jeanne d’Arc, qu’elle seule peut le sauver, elle rabaissait ses concurrents, tous des hommes, au rang de « parrains », de « barons », et contestait les règles qui voudraient qu’elle recueille le soutien de 5 % des membres du conseil national pour pouvoir se présenter au poste de premier secrétaire. Sans appui, elle a quand même présenté sa motion, intitulée « Mitterrand, réveille-toi, ils sont devenus fous. » Sans surprise, elle a été rejetée. Solitaire et héroïque, vous disait-on.
A 44 ans, Delphine Batho a un petit problème. Après plus de deux décennies passées au PS, elle ne peut compter que sur elle-même. Repérée par Julien Dray quand elle était lycéenne à Henri-IV, chaperonnée par Jean-Luc Mélenchon, formée au sein de SOS Racisme, elle incarne un temps la génération montante de la gauche et se forge une réputation de bûcheuse. « Pour masquer ses fragilités, elle a durci son caractère », note un de ses mentors. « Mais jamais elle ne cède ? », s’étonnait François Hollande face à sa pugnacité.
A son tour, Ségolène Royal l’embarque dans sa campagne de 2007 pendant laquelle Delphine Batho théorise « l’ordre juste ». En récompense, la candidate lui lègue sa circonscription de Melle, dans les Deux-Sèvres, où elle est élue en 2012 et en 2017. Son intransigeance et son refus des combines d’appareil s’accommodent apparemment de ce parachutage. Mais de ce parcours qui la conduira sans à-coups à devenir ministre, il ne reste que des amitiés mortes, des pactes rompus, des portes claquées. Il fallait le soutien de seize membres du conseil national pour que sa candidature soit retenue. Elle ne les a pas trouvés, ni cherchés.
Delphine Batho "n'accepte pas le tournant de la rigueur qui ne dit pas son nom"
Durée : 00:55
Adolescente, Delphine Batho, brillante élève en physique-chimie, rêvait d’étudier les volcans. Elle a choisi le Parti socialiste. Ça revient un peu au même, non ? Sur les pentes du Vésuve comme dans les parages de Solférino, il faut gravir des chemins caillouteux, choisir les bonnes trajectoires, les bons compagnons de randonnée. L’espoir est identique : et si le volcan qu’on croyait éteint se réveillait ? C’est sa conviction – et l’unique créneau qui lui reste : moitié Haroun Tazieff, moitié Mitterrand au congrès d’Épinay, elle jure vouloir « poursuivre sa campagne » et promet « d’aller échanger et débattre dans tous les coins de France avec tous les militants qui le proposent. Il y aura donc le théâtre d’ombres du congrès officiel et, un peu comme à Avignon, le festival off ». Un one-woman-show, alors ?