JO d’hiver 2018 : Le CIO à la recherche des villes hôtes
JO d’hiver 2018 : Le CIO à la recherche des villes hôtes
Par Clément Guillou
Les candidats se font rares pour accueillir les JO d’hiver, effrayés par les dépenses engagées à Sotchi et Pyeongchang. Le président du Comité international olympique, Thomas Bach, cherche désormais à rassurer.
Le président du Comité international olympique, Thomas Bach, et Lee Hee-beom, président de Pyeongchang 2018, à Pully, près de Lausanne (Suisse), le 20 janvier 2018. / Laurent Gillieron / AP
Le 31 juillet 2015, à Kuala Lumpur (Malaisie), les membres du Comité international olympique (CIO) avaient devant eux un choix alléchant pour l’attribution des JO d’hiver 2022 : Pékin, et ses montagnes à 90 kilomètres du centre-ville, ou Almaty, candidature du président autoritaire du Kazakhstan, Noursoultan Nazarbaïev. Le CIO est allé au plus sûr : le savoir-faire chinois en matière d’organisation des Jeux olympiques, déjà éprouvé en 2008, en fut récompensé.
Mais à quel prix ! Aux JO 2022, certaines épreuves auront lieu à 220 kilomètres de la capitale chinoise, dans des zones où il ne neige quasiment jamais. Les JO d’hiver connaissent le même problème que les JO d’été, qui a conduit le CIO à attribuer du même coup les éditions 2024 et 2028 à Paris et Los Angeles : un déficit de candidats.
Six villes s’étaient initialement portées candidates pour l’édition 2022. Cracovie (Pologne) a renoncé après un référendum local, Lviv (Ukraine) en raison du conflit russo-ukrainien, Stockholm (Suède) faute de soutien politique. Oslo (Norvège) a franchi la première étape mais retiré sa candidature en raison d’un déficit de d’adhésion publique et politique.
Loin de l’enthousiasme des années 1990 et 2000
Quatre ans plus tôt, le CIO avait à peine plus de choix. Avec trois villes candidates – Pyeongchang, Munich (Allemagne) et Annecy (France) –, le nombre de projets soumis au vote était le plus faible depuis 1988. On était loin de l’enthousiasme des années 1990 et 2000, lorsque Albertville devait battre six adversaires pour organiser les Jeux de 1992 ou que huit villes se portaient candidates pour les JO 2010.
Dans la lignée de son agenda 2020, le président Thomas Bach souhaite rendre moins longue et coûteuse la procédure de candidature. La perspective d’un retour des Jeux olympiques en Europe ou en Amérique a, de nouveau, suscité quelque intérêt, même si les candidatures ne seront connues qu’à la fin de l’année.
Mais elles ne vont plus de soi. Le CIO tente de faire ressusciter celle de Stockholm, enterrée par la maire de la capitale suédoise en avril. Sion (Sitten, en allemand) a obtenu le droit de porter la candidature suisse mais la soumettra à une votation locale en juin. Après le rejet du projet d’Innsbruck par un référendum en Autriche, les villes de Graz et Schladming envisagent de lancer leur candidature. La ville de Calgary est partante, mais le Canada et la province d’Alberta hésitent. Sapporo (Japon) l’envisage, mais une troisième édition consécutive en Asie est peu probable.
Face à tant d’indécision, le Comité olympique américain, avec Salt Lake City (Utah) et Reno (Nevada), reste à l’affût, malgré l’organisation des JO d’été à Los Angeles deux ans plus tard. La Turquie et le Kazakhstan sont en embuscade, comme toujours, mais le CIO est désormais guidé par une obsession : mettre un terme à une série de candidatures à grands frais qui effraie les opinions publiques.
Niveau d’infrastructures
L’addition monumentale des Jeux olympiques du président Vladimir Poutine à Sotchi, dont les estimations varient en fonction des éléments pris en compte, a marqué les esprits. Ceux de Pékin, où tout est à faire en termes d’infrastructures et de liaisons ferroviaires, ne seront pas beaucoup moins chers.
En préférant Pyeongchang à Munich en 2009, en raison de la ténacité – troisième candidature – et d’un agressif lobbying sud-coréen, le CIO a raté l’occasion de Jeux plus économiques. Ceux de Pyeongchang sont évalués entre 10 et 14 milliards de dollars, trois fois le coût des JO de Turin (2006) et six fois ceux d’Albertville (1992) ou de Nagano (1998).
« Si j’étais au CIO, ma priorité ne serait plus de faire encore grandir les JO d’hiver. Le défi, maintenant, c’est de trouver des villes candidates disposant du niveau d’infrastructures requis, estime Michael Payne, directeur marketing du CIO de 1988 à 2004. Le CIO n’a pas été suffisamment agressif dans sa communication sur la réalité des coûts ni suffisamment souple pour séduire les candidats potentiels. Les pays traditionnels des Jeux d’hiver regardent ces sommes et se disent : “Impossible de dépenser tout ça.” Mais si vous avez déjà l’infrastructure, le coût des Jeux est de 2 milliards d’euros. »
Voilà le CIO pris entre le marteau et l’enclume, entre le désir commercial de conquérir de nouveaux horizons et la nécessité de ne pas se couper de son cœur de cible. Le vote de 2019, qui pourrait voir le CIO attribuer de manière simultanée les Jeux 2026 et 2030, devrait toutefois marquer, selon la volonté de Thomas Bach, un retour à ses bases historiques : les Alpes et les Etats-Unis.