TV – « Skam France », le nombril jeune
TV – « Skam France », le nombril jeune
Par Pauline Croquet
A voir ce soir. Avec ses dialogues crus et ses héroïnes attachantes, l’adaptation de la série norvégienne relate le quotidien d’une bande d’adolescents (sur France 4 à 19 h 50).
Bande-annonce SKAM FRANCE
Durée : 00:57
En Norvège, Skam est un véritable phénomène. Souvent comparée à la britannique Skins, cette série, dont le titre signifie « honte », ne s’impose aucun tabou pour raconter le quotidien d’une poignée de lycéens de la banlieue aisée d’Oslo, au cœur d’un récit presque sans adultes : les cours, leurs soirées très alcoolisées, leurs amis, la quête de popularité et la sexualité à explorer. Cette authenticité a également séduit à l’étranger, notamment en Europe, où la série connaît diverses adaptations. En France, les deux premières saisons de la version française sont diffusées sur France 4.
Toutefois, les téléspectateurs ont déjà pu se familiariseravec le casting hexagonal. En effet, la série a été lancée début février sur les réseaux sociaux, l’une des particularités de Skam. Les épisodes sont construits avant tout comme un programme à consommer en ligne plutôt que devant un écran de télévision.
Les premiers moments se concentrent sur Emma (Philippine Stindel), jeune femme taciturne et plutôt esseulée depuis qu’Ingrid et sa bande peu amène l’ont écartée. Emma va finir par tisser des liens d’amitié avec Manon, Daphné, Alexia et Imane, quatre autres filles de 2de qui ont décidé de s’allier pour organiser la fête la plus impressionnante de l’année et gagner enfin leurs galons de « meufs cool ».
SKAM la série - TU ME FAIS PAS CONFIANCE (Second Clip)
Durée : 03:55
Un des enjeux majeurs pour le réalisateur, David Hourrègue, était de confier la tête d’affiche à de jeunes actrices devant remplacer leurs homologues norvégiennes devenues iconiques. Le casting spontané et représentatif d’une féminité plurielle et multiculturelle a d’ailleurs contribué au succès de Skam. Ici, la présence d’Assa Sylla, découverte dans Bande de filles, de Céline Sciamma, et l’exubérance de Coline Preher pimentent un jeu de groupe relativement policé. Pour autant, Skam France fait partie de ces séries esthétiques et réalistes qui renouvellent les programmes pour adolescents autrefois cantonnés aux grilles des matinales pour enfants et souvent caricaturaux. Les préoccupations ne sont pas niaises, les dialogues parfois crus. Et les blessures profondes. Les Grands, diffusé sur OCS, avait brillamment ouvert la brèche en racontant, à travers le passage du collège au lycée, les tourments de l’entrée dans l’âge adulte d’une bande d’amis attachante et turbulente.
Sur le fond, Skam France reprend la trame et les personnages de sa grande sœur norvégienne, tout en les retravaillant afin qu’ils puissent trouver un meilleur ancrage dans la société française. Et si les premiers épisodes de la VF collent quasi plan par plan à la version originale, les suivants s’en affranchissent peu à peu. La réalisation sage, soignée et respectueuse de l’œuvre originale risque cependant d’ennuyer les fans de la première heure.
Philippine Stindel (Emma), Coline Preher (Alexia), Assa Sylla (Imane), Lula Cotton (Daphné), Marilyn Lima (Manon) dans « Skam France ». / GTV 2017
Chaque épisode de Skam consiste en une compilation de séquences de quelques minutes qui s’étendent sur une semaine. Les chapitres sont au préalable publiés en temps réel sur une page Facebook et sur France TV Slash, un nouvel espace en ligne de France Télévisions dévolu aux 18-30 ans. De même, onze des personnages ont un compte Instagram alimenté quotidiennement en photos et vidéos dans la temporalité de la série, brouillant agréablement la frontière entre réalité et fiction. Une ambitieuse expérience en ligne qui semble maintenir l’internaute dans la confidence et permet de développer la psychologie des personnages.
Skam France, adaptée de la série créée par Julie Andem. Avec Philippine Stindel, Lula Cotton Frapier, Marilyn Lima (Fr., 2018, 9x20 min).