Le programme de l’A380 – le Super-Jumbo d’Airbus, très prisé des passagers (ici lors du Salon du Bourget, près de Paris, en juin 2017) – connaît des déboires, tout comme celui de l’avion militaire A400M. / ERIC PIERMONT / AFP

Airbus sort à nouveau les ciseaux. Thomas Enders, le PDG du groupe, devait annoncer, mercredi 7 mars, à l’occasion d’un comité européen à Toulouse, un plan de suppression de postes qui correspond à 3 600 sureffectifs.

Cette coupe claire provoque la surprise, alors que l’avionneur européen détient un carnet de commandes de 1 000 milliards d’euros et qu’il a réalisé, en 2017, un bénéfice de près de 2,9 milliards d’euros. Toutefois, des nuages assombrissent le ciel d’Airbus. Deux programmes sont particulièrement à la traîne.

Cette année, seuls douze exemplaires de l’A380, soit un par mois, devraient sortir des chaînes

L’avionneur européen a fait savoir, lundi 5 mars, qu’il comptait « expliquer les réductions de cadence précédemment annoncées pour les programmes A380 et A400M et aborder leurs impacts sur les effectifs » du groupe. Du côté de l’activité aviation commerciale, l’A380, le navire amiral d’Airbus, souffre d’une mévente presque chronique.

En juillet 2016, déjà, la direction avait annoncé qu’elle allait ralentir les rythmes de production de son Super-Jumbo, qui est l’avion préféré des passagers. Cette année, seuls douze exemplaires de l’A380, soit un par mois, devraient sortir des chaînes. En 2019, la production sera moitié moindre, avec seulement six appareils.

« Ajustement des effectifs »

L’A380 n’est cependant pas le seul problème d’Airbus. L’autre hic a pour nom l’A400M. L’avion de transport militaire accumule les déboires techniques et les retards de livraison, qui obèrent les comptes de la compagnie.

L’an dernier, elle a été contrainte de passer une charge de 1,3 milliard d’euros. Celle-ci faisait suite à une précédente provision de 2,2 milliards d’euros passée en 2016. Au total, depuis son lancement, l’A400M a poussé le groupe à provisionner plus de 8 milliards d’euros.

Du côté d’Airbus, les suppressions de postes devraient principalement intervenir en Allemagne, en Grande-Bretagne et en Espagne, trois des pays de production et d’assemblage de l’A380 et de l’A400M. L’objectif de l’avionneur serait d’aboutir à « un ajustement des effectifs sans licenciement ». Pour y parvenir, Airbus signale que ces 3 600 sureffectifs doivent être calculés sur un effectif global de 133 000 salariés.

Surtout, l’avionneur rappelle que d’autres programmes, tels que ceux de l’A320, de l’A330 ou encore de l’A350, enregistrent à l’inverse « des plans de charge en forte hausse ». Pour calmer les esprits, « Airbus s’engage à gérer toute implication sociale de manière responsable. Par le passé, l’entreprise a démontré à plusieurs reprises sa capacité à trouver les meilleures solutions possibles pour ses employés ».

Procéder à des « fins de mission »

En pratique, certains des salariés en sureffectif sur l’A380 ou l’A400M pourraient être rebasculés sur la production d’autres avions. « La chance d’Airbus est d’être multiprogramme », observe un dirigeant syndical. En revanche, l’avionneur n’écarte pas l’idée de tailler dans les effectifs des intérimaires, notamment en procédant à des « fins de mission ».

Malgré ce nouveau plan social, Airbus confirme qu’il ne souhaite pas arrêter la fabrication de l’A380 ou de l’A400M, notamment pour conserver les compétences et le savoir-faire en cas de redémarrage des programmes. Grâce à une commande miraculeuse, en janvier, de la compagnie du Golfe, Emirates, de 36 Super-Jumbo, Airbus a en effet assuré la production de l’A380 pour les dix ans à venir.

In fine, ces sureffectifs localisés pourraient donner un peu d’air à Airbus. L’A320 Neo, un avion moyen-courrier remotorisé pour être moins gourmand en carburant, se vend très bien auprès des compagnies aériennes, qui s’arrachent toutes les versions de l’appareil. Grâce à lui, l’avionneur détient plus de 60 % de parts de marché. Mais il est victime de son succès. Il a déjà été commandé à plus de 6 000 exemplaires. Pour satisfaire ses clients, Airbus doit augmenter fortement ses cadences de production (il en sort déjà cinquante exemplaires par mois).

Le tempo devrait encore s’accélérer en 2019, avec une production mensuelle de soixante A320. Et ce n’est pas fini. Il se murmure déjà qu’Airbus envisage une cadence de production de soixante-dix moyen-courriers chaque mois au cours de la prochaine décennie. Pour tenir le rythme, des renforts internes ne seront donc pas superflus.