Pour la troisième fois de sa carrière, Marco Verratti a été exclu en Ligue des champions. / CHRISTOPHE SIMON / AFP

Il est incorrigible. Jamais avare d’un bon conseil arbitral ou d’une contestation avec geste théâtral à l’appui, Marco Verratti a au moins appris, mardi 6 mars 2018, l’extrême indulgence dont font preuve les arbitres de Ligue 1 à son égard.

Rappel des faits. Peu de temps après l’ouverture du score du Real Madrid, le milieu parisien piquait un sprint en direction de Felix Brych, préposé au sifflet, pour lui faire part avec véhémence de son indignation après ce qu’il estimait être une faute oubliée sur lui de Kovacic. L’Italien aurait pu s’en tirer avec une simple réprimande comme en championnat, mais l’arbitre allemand n’hésita pas à dégainer un second carton jaune fatal. Averti en première période pour un tacle désespéré sur Casemiro, Verratti prenait la porte à une demi-heure de la fin du match, et laissait ses coéquipiers finir à dix une rencontre déjà bien mal embarquée. Mino Raiola, son agent, a tenté de relativiser :

« Peut-être que Marco exagérait un peu, mais c’était juste la frustration d’un joueur qui voulait faire tout son possible pour aider l’équipe à se qualifier. C’était une réaction d’instinct et de fierté. Ronaldo a protesté plusieurs fois de manière flagrante, mais il a été gracié, même quand il a essayé de donner un coup de pied à Dani Alves. »

Irrégularité et nervosité

Refusant comme à son habitude de s’épancher sur les prestations individuelles de ses joueurs, le président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, a tout de même regretté que « le carton rouge de Marco [ait] tué le match ». Il faut épargner le soldat Verratti. « C’est pas bien de parler d’un seul joueur ce soir, a coupé court son coéquipier Thiago Motta. Quand on perd, c’est ensemble. Moi le premier, je suis coupable de la défaite. Il faut l’assumer et être honnête. » Sauf que la propension de son protégé à ergoter les jugements arbitraux n’est pas nouvelle. A 25 ans et sept campagnes de Ligue des champions au compteur, l’excuse de la jeunesse ne tient plus. Cette nouvelle réaction épidermique traduit une immaturité incompatible avec le statut dont se prévaut le joueur, et ses représentants, dans l’effectif du PSG.

Verratti n’est plus cet inconnu débarqué à l’été 2012, le même jour qu’un certain Zlatan Ibrahimovic, en provenance de Pescara (Italie). Il est très vite devenu une pièce maîtresse du milieu parisien. Plus qu’une « bonne pioche » réalisée par Leonardo, le directeur sportif de l’époque, celui qu’on surnomme « Petit Hibou » s’est vu assigner le rôle du jeune espoir couvé et porté au sommet du foot européen par une structure qui montre ainsi qu’elle ne se contente pas d’aligner les millions pour récupérer des stars déjà accomplies.

Si son talent ne fait guère débat, l’irrégularité de ses performances et sa nervosité au moindre coup de sifflet laissent songeur. En dehors des terrains, Verratti fait aussi régulièrement parler de lui avec sa condition physique aléatoire au retour de vacances ou les menaces de départ de ses agents successifs pour obtenir une énième revalorisation. Presque toujours excusé dans un club dont il est devenu le chouchou, il n’échappe pas en revanche aux critiques en sélection, où il échoue pour l’instant à être le successeur annoncé d’Andrea Pirlo dans l’entrejeu.

« Les idées ne s’achètent pas »

Plus qu’un cas isolé, Marco Verratti apparaît comme le symbole d’une équipe sans réelle opposition dans les compétitions domestiques, mais qui trébuche année après année face aux grosses écuries européennes. Les changements de coachs et les transferts records n’ont pour le moment toujours pas permis au PSG de rallier le dernier carré de la Ligue des champions, principal objectif de l’actionnaire qatari, aux manettes depuis 2011.

Pis même, ces deux dernières saisons, malgré la fin de la « Zlatan dépendance » et les arrivées de Neymar et Mbappé, le PSG a pris la porte dès les huitièmes de finale de la C1. Tétanisés l’an passé lors du match retour au Camp Nou (Barcelone), dont ils avaient largement attribué l’issue à l’arbitrage, les Parisiens n’ont cette fois jamais mis en danger le Real. Inquiétant pour un club dont les dirigeants en appellent à l’indulgence et arguent sans cesse d’un manque préjudiciable d’expérience. Arrigo Sacchi, double vainqueur de la Ligue des champions, à la télévision italienne réagit ainsi :

« Le PSG n’est qu’un groupe de joueurs. Les idées, ça ne s’achète pas. Le club passe toujours avant tout. […] Je pense qu’au PSG, il manque l’institution. Quand tu vois Verratti et son attitude, ça veut dire qu’il n’y a pas de club derrière. »

L’Italien pourrait compter parmi les grands mouvements du prochain été parisien après avoir souvent nourri les rumeurs lors des derniers mercatos. Le PSG devra céder quelques actifs pour rentrer dans les clous du fair-play financier. Et malgré ses problèmes de comportement, Verratti garde une cote appréciable, en particulier du côté de l’Espagne, où le Real et le FC Barcelonne viennent régulièrement aux renseignements. « Ce n’est pas le moment pour parler de changement, a déclaré un Nasser Al-Khelaïfi dont la tendresse pour son milieu de terrain est bien connue. On veut se calmer avant de savoir quoi changer, il nous reste du temps pour réfléchir. » Pas sûr que l’actionnaire fasse, lui, preuve d’une patience éternelle.