Etats-Unis : de gros calibres pour défendre les safaris
Etats-Unis : de gros calibres pour défendre les safaris
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
Le nouveau Conseil de préservation de la vie sauvage est surtout composé de mordus de chasse, dont certains ont l’oreille du fils aîné de Donald Trump.
A la convention du Safari Club International, à Reno (Nevada), en janvier 2011. / Max Whittaker / REUTERS
Le Conseil de préservation de la vie sauvage créé par le secrétaire à l’intérieur américain, Ryan Zinke, a tenu sa première réunion le 16 mars à Washington. La mission que lui a fixée cet ancien élu du Montana, grand chasseur devant l’éternel, est claire : cet organisme, qui coûtera 250 000 dollars par an au contribuable américain, doit « fournir des conseils et recommandations au gouvernement fédéral » sur les conséquences que peuvent avoir les expéditions à l’étranger de chasseurs américains sur « la préservation, l’application des lois sur la vie sauvage », ainsi que leurs « bénéfices économiques ». Le conseil entend militer pour promouvoir ces « bénéfices » et pour éliminer les « barrières » qui s’opposent à l’importation aux Etats-Unis de trophées de chasse.
Les réunions de ce conseil devraient être particulièrement efficaces. Il compte en effet une proportion écrasante de chasseurs particulièrement attirés par le gros gibier et les armes à feu, selon une enquête de l’agence Associated Press. Sans surprise, ces personnalités ont des liens étroits avec le Safari Club International, une organisation de chasseurs, et le lobby des armes à feu, la National Rifle Association. L’un comme l’autre disposent de liens étroits avec des élus du Congrès, et assurent que la chasse qu’ils défendent pour le profit de clients fortunés constitue la meilleure réponse au braconnage.
Ce conseil ne compte aucun représentant d’organisations de protection de la nature. Plusieurs responsables de celles-ci l’ont vivement déploré lors de la réunion du 16 mars, qui était publique. Plusieurs des membres choisis attirent l’attention. C’est notamment le cas de Steven Chancellor, un important donateur du Parti républicain, dont le tableau de chasse, obtenu par l’organisation Humane Society, compte près de cinq cents animaux sauvages, dont dix-huit lions, treize léopards, six éléphants et deux rhinocéros.
Permis de tuer
Chris Hudson, un avocat de Dallas, a fait les gros titres en 2014 en remportant aux enchères, pour plus de 350 000 dollars, un permis de tuer en Namibie pour un rhinocéros noir, une espèce particulièrement menacée. L’avocat avait ensuite poursuivi en justice la compagnie aérienne américaine Delta, qui avait refusé d’embarquer la dépouille de l’animal. Olivia Opre, ancienne reine de beauté du Nebraska, qui siège également au conseil, revendique la chasse de 90 espèces différentes sur six continents. Elle aurait rapporté aux Etats-Unis 150 trophées.
Deux représentants de cette instance ont des liens étroits avec le fils aîné du président des Etats-Unis, Donald Trump Jr, un autre fanatique de la chasse. Il s’agit de Peter Horn, qui travaille pour la firme d’armes Beretta, et de Keith Mark, un guide qui officie sur une chaîne de télévision consacrée à la chasse. Ce dernier avait mis sa notoriété au service de Donald Trump lors de la campagne présidentielle de 2016.
Le 17 novembre 2017, sous la pression d’organisations de défense de l’environnement et d’élus de son propre parti, le président avait gelé la décision publiée le jour même sur le Federal Register, l’équivalent américain du Journal officiel, d’autoriser à nouveau l’importation de trophées de chasse à l’éléphant tué au Zimbabwe, que Barack Obama avait interdite. Un répit de courte durée : le département de l’intérieur a réautorisé ces importations le 1er mars, au cas par cas. La porte-parole de Donald Trump, Sarah Sanders, a assuré que le président n’avait pourtant pas changé d’avis.