Trois jours après les attentats ayant touché les villes de Trèbes et de Carcassonne, dans l’Aude, le procureur de Paris, François Molins, a tenu, lundi 26 mars, une nouvelle conférence de presse. L’occasion de préciser la chronologie des événements du 23 mars et de faire le point sur l’enquête.

  • Le déroulé des événements au Super U

C’est à 10 h 39, vendredi 23 mars, que Radouane Lakdim arrive sur le parking du magasin Super U de Trèbes, à 10 kilomètres de Carcassonne. Il sort de son véhicule en courant et pénètre dans le magasin avant de tirer sur deux personnes, au niveau des caisses : d’abord le boucher Christian Medves, 50 ans, puis un client, Hervé Sosna, 65 ans, qui meurent tous les deux sur le coup. Les autres clients trouvent refuge dans la chambre froide située à l’arrière du magasin et dans les rayons. A l’arrivée des gendarmes, vers 11 heures, Radouane Lakdim se trouve près de l’accueil et se sert d’une femme comme bouclier humain. Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame entame alors une négociation avec lui, à l’issue de laquelle il rejoint l’homme dans la chambre des coffres et prend la place de la femme gardée en otage. Les gendarmes en profitent pour évacuer les autres clients.

Arnaud Beltrame demande ensuite à ses collègues de quitter les lieux, précisant que l’assaillant demande la libération du terroriste Salah Abdeslam et menace de faire exploser des grenades artisanales – trois engins explosifs ont ensuite été retrouvés dans le magasin. Le GIGN arrive sur les lieux à 12 h 10. L’assaut est donné deux heures plus tard, après que trois coups de feu ont été entendus – deux gendarmes sont alors blessés. Le lieutenant-colonel Beltrame, quant à lui, meurt à l’hôpital le 24 mars à 5 heures du matin. L’autopsie met en évidence des blessures par balle à un bras et à un pied, des blessures au visage, ainsi que des blessures par arme blanche au niveau de la trachée et du larynx, à l’origine du décès.

  • Ce que l’on sait de Radouane Lakdim

Radouane Lakdim est né au Maroc, le 11 avril 1992. Il arrive en France au mois d’août suivant. Il est naturalisé français à la suite de la naturalisation de son père, lorsqu’il a 12 ans, en 2004. Il était connu pour des faits de droit commun et avait été convoqué devant le tribunal correctionnel de Carcassonne le 23 avril pour port d’arme blanche et conduite sans permis.

Radouane Lakdim était fiché « S » (« sûreté de l’Etat ») depuis 2014, puis avait été inscrit à partir de novembre 2015 au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), en raison de ses « liens supposés avec la mouvance salafiste locale ». Il faisait toujours l’objet d’un « suivi effectif » par les services de renseignement en mars 2018, qui n’avaient pas décelé d’indice laissant supposer qu’il allait passer à l’acte.

  • Où en est l’enquête ?

La compagne de Radouane Lakdim, âgée de 18 ans, a été placée en garde à vue le vendredi 23 mars à 18 h 10. Elle a crié « Allah Akbar » lors de son interpellation, mais « conteste avoir été associée au projet mortifère de son petit ami ». La jeune femme, présentée comme une « convertie » depuis ses 16 ans, et fichée « S », n’avait plus de contacts téléphoniques avec Lakdim depuis janvier, mais elle est soupçonnée d’avoir poursuivi des échanges en utilisant une application sécurisée, a précisé le procureur François Molins. Le matin du périple sanglant de son compagnon, elle a posté une sourate promettant l’enfer aux mécréants.

Une autre personne a été placée en garde à vue. Une personne est, en effet, venue informer les forces de l’ordre qu’un de ses proches, un mineur, était un ami de Radouane Lakdim, et que ce dernier avait une forte influence sur lui. Il est impliqué dans deux procédures ultérieures, une pour détention de stupéfiants et l’autre pour violence. Les deux gardes à vue ont été prolongées dimanche soir.