Un master sino-suisse pour former les acteurs du développement durable
Un master sino-suisse pour former les acteurs du développement durable
Par Ingrid Seithumer
L’université de Genève et l’université chinoise Tsinghua, à Pékin, cofondent un master consacré à la réalisation des dix-sept Objectifs de développement durable fixés par l’ONU.
Choisir des problèmes et trouver des solutions. Telle est l’ambition du nouveau master développé conjointement par l’université de Genève (Unige), en Suisse, et la prestigieuse université Tsinghua, à Pékin (l’équivalent du Massachusetts Institute of Technology en Chine), où ont été formés l’actuel président chinois et son prédécesseur.
Proposé depuis septembre, ce programme, enseigné en anglais et intitulé « master en innovation, développement humain et durabilité », est consacré à la réalisation des dix-sept Objectifs de développement durable (ODD, ou SDG en anglais, pour Sustainable Development Goals) fixés à l’horizon 2030 par l’Organisation des Nations unies (ONU).
Une approche de projet
L’idée a germé très vite, lors d’une rencontre au Forum économique mondial de Davos, en Suisse, en 2016, entre le président de l’Unige et des responsables de Tsinghua. Face à l’ampleur de l’enjeu du développement durable en Chine, « l’université chinoise était très intéressée pour s’engager dans les ODD avec un partenaire comme l’Unige, qui multiplie à Genève les contacts avec l’ONU, les organisations non gouvernementales et les organismes internationaux », explique le professeur François Grey, coordinateur du projet. Lancée dans une vaste réforme de son éducation, la Chine a par ailleurs besoin de profils plus créatifs.
Pour l’Unige, un tel partenariat permettait notamment de dynamiser la collaboration entretenue avec les Nations unies, dont le siège principal en Europe se situe à Genève.
Fondé sur la multidisciplinarité, le programme s’est inspiré des travaux sur les nouvelles façons d’éduquer menés par François Taddei, directeur en France du Centre de recherches interdisciplinaires. Il s’adresse à des étudiants de tous pays, aux profils très variés, ingénieurs, biologistes, économistes, sociologues, etc.
Pendant leur formation, les étudiants bénéficient d’enseignements fondamentaux sur le développement durable dans toutes ses dimensions (humaines, environnementales, institutionnelles). Le master comprend également des enseignements pratiques, fondés sur une approche de projet.
Doublement des effectifs
En Suisse, les étudiants passent ainsi deux jours par semaine dans le laboratoire SDG Solution Space, inauguré tout récemment au cœur de la Genève internationale. Là, ils rencontrent des intervenants d’ONG et d’institutions internationales qui leur exposent des problématiques sur lesquelles on leur demande de travailler.
« Notre approche est originale : nous mettons à disposition des ONG une équipe d’étudiants dotés d’une solide formation, qui va réfléchir à leurs problématiques et tenter d’apporter des solutions concrètes. Les ONG jouent alors un rôle de mentor », précise François Grey. « Nous rencontrons chaque semaine des interlocuteurs très variés. Ici, nous sommes capables d’avoir une vision très large du développement durable », apprécie l’étudiante canadienne Samsam Mahmed, d’origine Somalienne, dont l’ambition personnelle est de travailler à l’élimination de la faim dans le monde (ODD numéro 2).
« Nous apportons tous notre pierre à l’édifice, c’est motivant et enrichissant. La perspective de passer du temps en Chine est également très intéressante », indique pour sa part le Franco-Suisse Emmanuel Kellner, titulaire d’un bachelor en ingénierie microtechnique de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. Concrètement, le programme comprend pour son lancement 24 étudiants à l’Unige et 14 étudiants à Tsinghua.
A l’issue de leur première année de master, les étudiants en Suisse se rendront en Chine et les étudiants en Chine viendront en Suisse. Un doublement des effectifs est prévu rapidement. « Nous n’allons pas forcément changer le monde radicalement avec notre master. Mais nous cherchons à avoir un impact sur le changement », disent les uns et les autres. A peine lancé, ce nouveau programme suscite en tout cas déjà l’intérêt d’autres universités, notamment en Afrique.