Twitter rend les « trolls » moins visibles sur sa plateforme
Twitter rend les « trolls » moins visibles sur sa plateforme
Par Perrine Signoret
Pour voir les posts ayant selon Twitter un impact « disproportionné et négatif sur l’expérience des utilisateurs », il faudra désormais activer une option, ou cliquer sur un bouton spécifique.
Pour afficher les messages desdits « trolls », il faudra cliquer sur un bouton « afficher plus de réponses ». / AFP/KIMIHIRO HOSHINO
Twitter veut des conversations « plus sereines » entre ses utilisateurs. Pour ce faire, le réseau social a annoncé mardi 15 mai de nouvelles mesures. Elles ciblent directement les « trolls », ou du moins ceux qu’il considère comme tels. Dorénavant, leurs commentaires seront moins visibles : il faudra, pour y accéder, cliquer sur un bouton « afficher plus de réponses », ou paramétrer son compte de sorte à voir « tout le contenu » publié sur le site.
Les « personnes contribuant à la sérénité de la conversation » seront de fait, promet Twitter, « plus visibles dans les conversations et la recherche ».
Des « trolls » qui ne violent pas les règles de Twitter
Cette annonce fait partie d’une série de mesures destinées à apaiser les échanges sur Twitter. Un engagement pris par l’entreprise il y a plusieurs mois, et que Jack Dorsey, le PDG de l’entreprise, avait rappelé le 1er mars en expliquant vouloir « améliorer la santé collective, l’ouverture et la civilité des conversations publiques ».
Après les contenus ouvertement haineux en décembre, c’est donc aux « trolls » que s’attaque cette fois Twitter. Un terme aux contours imprécis. Dans un communiqué, le réseau social reconnaît ainsi qu’il regroupe aussi bien des personnes aux comportements « amusants, bons et pleins d’humour » que des personnes « qui faussent et nuisent à la conversation ».
Del Harvey, vice-présidente en charge de la confiance et la sécurité chez Twitter, explique au Monde que c’est à cette seconde catégorie que la plateforme souhaite s’attaquer.
« Nous avons constaté qu’un pourcent des comptes de Twitter concentrait à lui seul la majorité des signalements effectués par les utilisateurs. Certains contenus qui y étaient signalés étaient en violation de nos conditions d’utilisation, mais d’autres non. Ceux qui étaient en accord avec nos règles étaient pour autant engagés dans des comportements néfastes, dans la mesure où ils perturbaient les discussions entre les utilisateurs. »
« Un grand nombre d’indicateurs »
Interrogés sur le flou de cette définition, Del Harvey et David Gasca, directeur de la gestion des produits, arguent que Twitter prendra en compte « un grand nombre d’indicateurs » afin de définir qui est selon eux un « troll ».
Parmi ces indicateurs, qui se compteraient par « centaines », le fait qu’un compte n’ait pas confirmé d’adresse email, qu’une même personne ait créé simultanément plusieurs comptes, ou qu’elle mentionne dans ses tweets des personnes qui ne la suivent pas.
« Nous ne nous focalisons pas sur le contenu du message en question mais sur le comportement de la personne qui l’a posté », précise David Gasca. Del Harvey, de son côté, insiste également sur l’importance de la manière dont les utilisateurs ont interragi avec la personne.
« Par exemple, explique la vice-présidente en charge de la confiance et la sécurité, si un utilisateur envoie le même message à quatre personnes, que deux d’entre elles bloquent l’utilisateur, qu’une le masque et qu’une autre le signale pour abus, cela nous envoie une indication assez claire quant au fait qu’il ne s’agit pas d’une interaction intéressante. »
Une baisse du nombre de signalements
Comme pour la modération de ses contenus, Twitter compte, pour repérer les « trolls », sur une combinaison de moyens techniques (détection automatique grâce à des algorithmes) et humains (signalements des utilisateurs, modérateurs). Une fois identifiés, ils verront leurs commentaires non pas supprimés, puisqu’ils « ne transgressent pas les règles de Twitter », mais invisibilisés par défaut.
Le réseau social se défend pour autant de toute volonté de censure, et assure ne pas dépasser sa mission d’hébergeur en triant les contenus. « Le nombre de comptes qui seront affectés par cette nouvelle fonctionnalité est faible : on parle d’un très petit pourcentage du nombre de comptes total, moins de 1 % », note Del Harvey à ce propos, avant d’ajouter :
« Par ailleurs, nous avons constaté lors d’un test de cette fonctionnalité une baisse de 4 % des signalements pour abus effectués suite à une recherche sur Twitter, 8 % dans les conversations. »
« L’idée, explique-t-elle, c’est de trouver un équilibre entre le fait de masquer trop de contenus ou ne pas en masquer suffisamment ». A ses côtés, son collègue assure que des ajustements pourront être faits dans les prochaines semaines ou mois, en cas de dysfonctionnements.
« Filtres de qualité »
Les « trolls » ne sont pas un problème nouveau pour Twitter. Même si jusqu’à présent l’entreprise s’était surtout attaquée à ceux qui postaient des contenus haineux ou insultants, elle avait déjà en août 2016 instauré des « filtres de qualité ».
Ces derniers devaient permettre aux utilisateurs de recevoir moins de notifications provenant de comptes a priori peu intéressants. Pour y parvenir, l’entreprise analysait « l’origine d’un compte » et « le comportement » de celui ou celle le détenant. Les filtres pouvaient être activés ou désactivés dans les paramètres des utilisateurs. Selon Twitter, 99 % des internautes fréquentant le réseau social l’auraient aujourd’hui activé. Le nombre d’interactions « indésirables » aurait été réduit grâce à cela, avance la firme.