Grand Prix de France : la formule 1 n’est plus ce qu’elle était
Grand Prix de France : la formule 1 n’est plus ce qu’elle était
Par Catherine Pacary
En dix ans d’absence de France, vingt-huit dans le Var, la F1 a évolué. Pour ceux qui auraient un peu décroché, récapitulatif à la veille des premiers essais au Castellet.
Affiche du Grand Prix de France 2008. / FFSA
Le dernier Grand Prix de France s’est couru sur le circuit de Magny-Cours, dans la Nièvre, en 2008. Il revient le 24 juin au Castellet, dans le Var, sur le Paul-Ricard, qui lui n’avait plus accueilli de formule 1 depuis 1990. Cette année-là, Alain Prost offrait sa 100e victoire à Ferrari après un dépassement dans les derniers tours sur le surprenant Ivan Capelli. Pour ceux qui n’auraient pas tout suivi, et pour les autres, petit mémorandum non exhaustif des principales évolutions enregistrées depuis une décennie.
Aérodynamisme maximisé pour la Mercedes 44 du quadruple champion en titre Lewis Hamilton, ici au Grand Prix de Monaco. / FIA
1/ Un look futuriste… Au premier coup d’œil, le halo, sorte de « Y » arqué placé au-dessus du baquet, surprend. Obligatoire depuis janvier, il protège la tête des pilotes, puisque, en F1, il n’y a pas de pare-brise. A l’avant, des ailerons s’étirent au ras du bitume à l’avant des pneus pour maximiser la prise au sol ; à l’arrière, en hauteur, ils changent de forme au fil des réglementations. Performant, cet aérodynamisme serait en revanche à l’origine de la baisse du nombre de dépassements en course, en générant dans le sillage des monoplaces de trop fortes turbulences. Et ce même si, depuis 2011, le DRS (Drag Reduction System), sorte de trappe qui s’ouvre ou se ferme sur commande, permet, en détournant le flux d’air, de booster la voiture d’environ 10 km/h sur certaines portions du tracé. Sur le plateau du Castellet, dans le Var, les pilotes risquent de découvrir un autre perturbateur de masse d’air : le mistral.
Zones de DRS, vitesses estimées : les données techniques du nouveau circuit Paul Ricard au Castellet (Var). / FIA
2/ Hybrides, moins bruyantes. L’évolution de la motorisation reflète les enjeux de la mobilité de demain. Adieu le moteur 10 cylindres en V de la McLaren-Honda d’Ayrton Senna de 1990 — de 3 493 cm3 pour 690 chevaux — ou les V6 Turbo. Depuis 2014 sont imposés des groupes propulseurs hybrides (V6 turbo) dotés de deux systèmes de récupération d’énergie, au niveau du freinage et de l’échappement, pour une puissance proche de 1 000 chevaux. Conséquence, la voiture fait moins de bruit, ce qui n’a pas plu aux fans de la première heure ni au promoteur de la F1 d’alors, Bernie Ecclestone.
3/ Bernie » justement n’est plus « le grand argentier de la Formule 1 ». Après quarante ans de règne sans partage, il a été évincé en janvier 2017 par les nouveaux propriétaires de la F1 mondiale, l’américain Liberty Media, et remplacé par Chase Carey aux bacchantes déjà célèbres.
4/ La consommation a été divisée par deux en un quart de siècle et limitée à 105 kg par course (environ 130 litres, selon les mélanges). Les ravitaillements en essence ont donc été supprimés en 2010. Un plein couvre un Grand Prix, dont la distance varie de 300 km à 310 km — à l’exception des 260 km de Monaco. Le nombre de tours est donc calculé en fonction de la longueur du circuit. Question : sachant que le Paul-Ricard fait 5,842 km, combien de tours effectueront les monoplaces dimanche ? Réponse 53, soit une distance totale de 309,626 km.
Le pilote français de Toro Rosso Pierre Gasly, découvre sur simulateur le nouveau Paul Ricard pour F1.com. / F1.COM
5/ Hyperconnecté. Le développement de l’électronique permet aux ingénieurs de recevoir les données de la monoplace en continu sur l’usure des pièces, les niveaux d’huile, de carburant, les températures… Autre révolution, les jeunes pilotes comme le Français de Force India, Esteban Ocon, ou le pilote Red Bull Max Verstappen ont appris à piloter uniquement sur simulateur. C’est pourquoi le « volant » s’apparente désormais à une console de jeu. De même pour le nouveau tracé du Paul-Ricard, qu’aucun pilote n’a pu tester, puisque les travaux se sont achevés il y a quelques semaines, le simulateur a été la seule option pour se préparer. Gare toutefois à ne pas déshumaniser la course. La FIA refuse toujours de valider les Robot Race, courses de voitures autonomes.
6/ Toujours plus vite ? La vitesse moyenne n’a pas tant augmenté que ça : de 40 km/h en un quart de siècle. Globalement, la Fédération internationale de l’automobile (FIA) a plutôt tout fait pour ralentir les monoplaces : ailerons diminués en 1991, pneus moins larges en 1993, baisse de la cylindrée en 1995 et en 2006… afin d’améliorer la sécurité. Jusqu’à ce que le spectacle en pâtisse. Aussi, depuis deux saisons, les vitesses de pointe ont-elles été revues à la hausse.
Doté d’un revêtement de "grip" dans les dégagments, le Paul Ricard est le premier désigné « Centre d’excellence » par la FIA. / FIA
7/ La sécurité, une priorité. Le Paul-Ricard s’est voulu exemplaire dès sa conception. Son créateur, inventeur de la boisson anisée à 40 degrés qui porte son nom, voulait en effet par ce circuit démontrer que ce n’étaient ni la vitesse ni l’alcool mais le mauvais état des routes qui était la cause principale de nombreux accidents enregistrés dans les années 1960-1970 (avec un pic de 18 034 morts en 1972 contre 3 500 en 2017). D’où la configuration novatrice du tracé, avec une piste très large, de grands dégagements, des bacs à graviers, qui seront remplacés par les bandes de « grip » à adhérence progressive. Aujourd’hui, le Paul-Ricard est un des circuits les plus avancés techniquement au monde, et le premier désigné « Centre d’excellence » par la FIA.
8/ Ecuries. Derrière l’apparente stabilité — Honda motorise les McLaren en 1990 comme en 2017 — se cache un incessant va-et-vient. Parmi les grandes « disparues », Virgin Racing, rebaptisée Marussia puis Manor (2010–2016), et Lotus (2010-2015) rachetée en décembre 2015 par Renault pour effectuer son grand retour comme « écurie à part entière » et non plus comme simple motoriste. Autre grand come-back, celui des Etats-Unis avec l’écurie Haas en 2016 également. Dernière annonce en date, le 19 juin, Red Bull qui rompt son contrat avec Renault motoriste pour passer à un moteur Honda dès 2019. Toro Rosso, la pépinière de Red Bull, se trouvant très satisfaite des engins nippons.
Get ready for the grand revival of the #FrenchGP! The biggest thing on our #Fit4F1 to do list at Paul Ricard is to… https://t.co/bTDMveMCeR
— pirellisport (@Pirelli Motorsport)
9/ Stratégiques pneumatiques. L’équipementier français Michelin se retire de la F1 à la fin de 2006, alors qu’il se partage l’élite du sport automobile avec Bridgestone. Depuis 2011, Pirelli a pris le relais en tant que fournisseur exclusif. Au-delà de la marque, la technologie a beaucoup évolué. La gamme de pneus mise à disposition est passée de trois à neuf en vingt ans : hypertendre rose, ultratendre violet, extratendre rouge…, l’arc-en-ciel se décline jusqu’au pneu pluie bleu.
French GP special 🤙🇫🇷👌#r8g https://t.co/O2NdA3FBRv
— RGrosjean (@Romain Grosjean)
10/ Cocoricos. Bien avant la création du championnat du monde FIA de F1, en 1950, le premier Grand Prix de l’histoire s’est couru en 1906 en France, sur 103 km de route ouverte entre Le Mans, Saint-Calais et La Ferté-Bernard.
— Sur les quinze nationalités présentes dimanche 24 juin sur la grille, la France est la plus représentée, avec trois pilotes — contre 0 en 2011 ! : Romain Grosjean (32 ans, pilote Haas, qui s’est fait customiser son casque pour l’occasion) ; Esteban Ocon (arrivé chez Force India à la mi-saison en 2016) ; et Pierre Gasly, promu chez Toro Rosso un an après.
— Sur les dix écuries en lice, trois sont dirigées par un Français : McLaren, drivée par Eric Boulier ; Renault F1, par Cyril Abiteboul ; et Sauber, par Frédéric (Fred) Vasseur depuis juillet 2017, six mois après avoir claqué la porte de Renault.
— Le Français Jean Todt, patron de la Scuderia Ferrari pendant quatorze ans (1993-2007), est réélu président de la FIA le 7 décembre 2017 pour un troisième mandat de quatre ans, qui doit le mener jusqu’en 2021, le temps de renégocier avec les écuries la nouvelle répartition des budgets.
Reste à trouver un successeur à Alain Prost. En dehors du « Professeur », dernier vainqueur au Castellet, en 1990, avant de décrocher son quatrième titre mondial en 1993 pour Williams, il y a eu l’unique victoire en Grand Prix de Jean Alesi (Canada, 1995) et celle d’Olivier Panis (Monaco, 1996). Depuis, plus rien.
This day in 1996 in the Ligier JS43, Olivier Panis crossed to victory at the Monaco Grand Prix. Amazing scenes. #F1 https://t.co/Wbp97ryH0S
— F1PaddockPass (@F1 Paddock Pass)