Coupe du monde 2018 : les supporteurs belges et la menace de la taxe drapeau
Coupe du monde 2018 : les supporteurs belges et la menace de la taxe drapeau
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, Correspondant)
Alors que tout le pays se prend de passion pour le parcours des Diables rouges, mieux vaut faire attention à quel drapeau on déploie. Car le fisc local veille.
Beaucoup d’étrangers s’en étonnent : dans cette Belgique où le sentiment national semble très faible, les drapeaux tricolores – noir, jaune et rouge – s’affichent un peu partout. Aux fenêtres, sur le capot des voitures ou sur les épaules des promeneurs. Dans les écoles, les élèves – étrangers y compris – exigent de pouvoir porter un maillot frappé du nom d’Eden Hazard ou de Kevin De Bruyne en classe. Devant les écrans géants installés dans de nombreuses municipalités, les fans se massent et ont dépensé en moyenne 30 euros pour leur équipement, avec chapeau, trompette et lunettes à la clé.
Les automobilistes ont, eux, enfilé des « chaussettes » aux couleurs nationales sur leurs rétroviseurs, plantés des fanions sur le toit ou décoré les flancs de petites cornes rouges, symboles de ces « Diables » qui ont battu le Panama 3-0 dans leur match inaugural à Sotchi et se préparent à affronter la Tunisie, à Moscou, samedi.
Ferveur patriotique retrouvée ? Enthousiasme, en tout cas, pour cette sélection talentueuse que beaucoup de ses supporteurs imaginent déjà en finale d’autant que l’Allemagne et le Brésil, les deux cadors qu’elle était censée rencontrer en quarts, n’ont pas semblé invincibles lors de leur premier match. Et tant pis si les hommes de Roberto Martinez ont peiné pendant une grosse heure avant de venir à bout d’une faible équipe du Panama. Tant pis, aussi, si sur les 23 sélectionnées un seul, en réalité – Leander Dendoncker – évolue encore dans un club belge, Anderlecht…
Une amende de 50 euros
La seule chose qui menace l’enthousiasme général est, en fait… le fisc. Des Belges ont, en tout cas, découvert que sortir leur drapeau national ne les exposait pas à la colère des nationalistes flamands – même dans leur fief, Anvers, les magasins regorgent de bibelots tricolores – mais bien à… un impôt ! Plusieurs communes – surtout flamandes – sont, en effet, dotées d’un règlement prévoyant une taxation sur les affiches et les panneaux publicitaires. Or, de nombreuses bannières noires, jaune et rouge sont frappées du logo de sponsors de l’équipe nationale : une bière rebaptisée « Belgium » le temps du Mondial, une banque, une boisson gazeuse, une marque de voiture… Accrocher le drapeau à son balcon peut donc entraîner le paiement de la taxe sur la publicité.
A Hasselt, dans la province de Limbourg par exemple, la taxe grimpe à 50 euros par mètre carré. La Wallonie semble plus tolérante mais pourrait, à certains endroits, viser les drapeaux s’ils permettent d’identifier directement le propriétaire d’une enseigne commerciale. Et attention, a prévenu Michel Maus, un expert fiscal : si un bourgmestre – maire – décide de fermer les yeux, il risque d’être lui-même placé dans l’illégalité : un contribuable qui aurait, lui, acquitter l’impôt pourrait se retourner contre lui en s’estimant victime d’une discrimination.
Dans la zone de police du Brabant wallon, c’est une autre menace qui est agitée : les forces de l’ordre promettent de punir ceux qui orneraient leurs rétroviseurs des désormais célèbres « chaussettes » offertes notamment à leurs lecteurs par des quotidiens sportifs. Une amende de 58 euros pourrait leur être infligée « si les rétroviseurs disposent de clignotants ou si les chaussettes diminuent la visibilité du miroir »… Chez les Belges, le diable se niche décidément dans les détails.