Donald Trump, cerné par les affaires judiciaires, s’en prend à Jeff Sessions
Donald Trump, cerné par les affaires judiciaires, s’en prend à Jeff Sessions
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
Dans le même temps, deux dirigeants du magazine « National Enquirer » ont obtenu l’immunité judiciaire, en échange d’informations sur le président américain.
Image extraite de l’entretien accordé par Donald Trump à la chaîne américaine Fox News et enregistrée à la Maison Blanche le 22 août. / AP
L’attaque a été aussi sèche que la riposte. La condamnation de l’un de ses anciens directeurs de campagne, Paul Manafort, et la décision de son ancien avocat, Michael Cohen, de l’impliquer dans une violation des règles de financement de campagnes électorales a en effet dressé Donald Trump, jeudi 23 août, contre son propre ministère de la justice. « Je mets maintenant toujours « justice » entre guillemets », a assuré le président des États-Unis au cours d’un entretien vigoureux accordé à la chaîne conservatrice Fox News.
Donald Trump reproche depuis plus d’un an à son ministre, Jeff Sessions, ancien sénateur républicain de l’Alabama, sa décision de se récuser dans l’enquête sur les interférences prêtées à la Russie pendant la campagne présidentielle de 2016. Il est convaincu que cette décision, motivée par le fait que l’attorney general des États-Unis avait omis de rendre publiques des rencontres avec des responsables russes pendant la même période au cours d’auditions au Sénat, l’a privé d’un rempart contre les investigations en cours.
« Les démocrates sont vraiment puissants au sein du ministère de la justice (….) Jeff Sessions n’a jamais réellement pris le contrôle du ministère et c’est quelque chose d’assez incroyable », a-t-il ajouté jeudi, reprenant la thèse d’un biais idéologique régulièrement reproché à l’équipe du procureur spécial chargé de l’enquête russe, Robert Mueller, nommé par sa propre administration.
Spéculations sur un éventuel limogeage
L’attorney general des États-Unis, pourtant habitué à ces critiques récurrentes, a choisi de riposter presque immédiatement en indiquant que tant qu’il exercera ses fonctions « les actes du ministère de la justice ne seront pas influencés indûment par des considérations politiques ».
Alors que la rupture entre les deux hommes qui ont participé à une réunion commune à la Maison Blanche jeudi apparaît irréparable, cet échange a alimenté les spéculations sur un éventuel limogeage précipité de Jeff Sessions. Il a incité plusieurs sénateurs républicains à réagir en ordre dispersé. « Nous n’avons pas le temps et il n’y a pas de candidat probable qui puisse être confirmé à mon avis dans ces circonstances actuelles », a assuré John Cornyn (Texas). Le président de la commission des lois responsable des auditions d’un candidat à la tête du ministère de la justice, Chuck Grassley (Iowa) a juré au contraire qu’une telle audition pourrait se tenir au cours de l’automne.
Dans son entretien à Fox News, Donald Trump s’en est pris également avec virulence aux « donneurs » (flippers), le terme qu’il a utilisé pour désigner les personnes qui concluent un accord avec les autorités judiciaires afin d’obtenir leur clémence. « Cela devrait presque être interdit. Ce n’est pas juste (…) [cela les incite] à dire de mauvaises choses à propos de quelqu’un (…) à juste inventer des mensonges », a poursuivi le président.
Immunité judiciaire
Il avait manifestement en tête la décision de son ancien avocat de plaider coupable notamment dans l’affaire qui le concerne, celle d’un financement occulte en lien avec la campagne présidentielle de 2016. Michael Cohen avait en effet acheté à prix d’or, avant le scrutin, le silence de deux femmes qui assurent avoir eu par le passé une relation extraconjugale avec le magnat de l’immobilier.
Dans l’après-midi, la presse américaine a cependant révélé qu’un proche du président, le patron d’un groupe de presse qui l’avait soutenu avec constance pendant la campagne a obtenu l’immunité de la justice, tout comme l’un de ses bras droits, en échange d’informations concernant ces transactions.
David Pecker, qui dirige notamment le tabloïd The National Enquirer, aurait versé la somme de 150 000 dollars pour obtenir l’exclusivité des confidences d’un ancien modèle de Playboy, Karen McDougal, sans pour autant les publier. Il aurait également joué un rôle dans les tractations avec une ancienne actrice pornographique, Stephanie Clifford, connue également sous le nom de scène de « Stormy Daniels ».
The National Enquirer avait multiplié pendant la campagne les manchettes outrancières qui sont sa marque de fabrique contre la candidate démocrate, Hillary Clinton. L’une d’elle avait même affirmé que l’ancienne secrétaire d’Etat, présentée comme gravement malade, n’avait plus que six mois à vivre.