A Brasilia, le 14 août. / Eraldo Peres / AP

João Doria a-t-il péché par vanité ? L’ex-étoile montante du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB, centre droit), vient de subir un affront judiciaire à même de compromettre, ou pour le moins fragiliser, ses ambitions politiques. L’ancien maire de São Paulo, 60 ans, candidat au poste de gouverneur de l’Etat de São Paulo pour les élections d’octobre, a été condamné vendredi 24 août par la juge de première instance, Carolina Martins Cardoso, à la suspension de ses droits politiques pour quatre ans.

Cet as de la « com » qui aime à s’afficher comme un entrepreneur plus que comme un politicien et laisse dire qu’il serait le « Macron do Brasil », est accusé d’avoir utilisé l’argent public pour promouvoir sa propre image. En cause, une campagne baptisée « Cidade Linda » (jolie ville), mise en place en 2017 visant à reverdir, nettoyer et laver la mégalopole matinée de tags colériques.

Alimenter le sentiment d’injustice

Selon la justice, l’ex-publicitaire millionnaire qui apparaissait ostensiblement dans cette campagne en se présentant tantôt comme éboueur tantôt comme concierge ou jardinier, aurait détourné l’argent public à des fins de promotion personnelle. Vertement critiqué et moqué après son bref passage à la tête de la capitale économique – du 1er janvier 2017 au 6 avril 2018 –, João Doria doit, par ailleurs, rembourser les sommes engagées par la mairie ainsi qu’une amende correspondant à cinquante fois sa rémunération à l’époque des faits, soit de l’ordre de 1,2 million de reais (250 000 euros), selon les calculs du site UOL.

Le condamné peut faire appel et dans l’attente « la campagne se poursuit normalement », assure l’entourage de l’ancien édile. « La décision annoncée ce vendredi n’interrompt pas la campagne de João Doria. Le candidat fera appel de la décision et est persuadé qu’elle sera annulée. Son administration a toujours agi correctement. (…) il n’y a jamais eu de lien entre la publicité officielle de la ville de São Paulo et la figure de João Doria. », écrit l’équipe du candidat dans une note diffusée peu après la décision.

Suivi d’effets ou pas, la sanction juridique de Doria promet de bouleverser une campagne où le favori de la présidentielle, Luiz Inacio Lula da Silva, figure du Parti des travailleurs (PT, gauche) et principal opposant du PSDB, est emprisonné pour corruption après une condamnation en deuxième instance. Lula conteste la décision de justice (plus de douze ans de prison) et revendique ses droits politiques… à l’instar de João Doria diront les sympathisants du PT.

« Le PT va utiliser cela comme argument d’autant que Doria fut des plus corrosifs contre le PT, estime le politologue Carlos Melo. Tout cela va ajouter à la confusion et peut alimenter le sentiment d’injustice des militants du PT. »

Décision imminente sur la candidature de Lula

La validité de candidature de Lula, crédité de 39 % des intentions de vote, doit être examinée dans les prochains jours par le Tribunal supérieur électoral. A en croire les experts, il est peu probable que l’ancien chef d’Etat (de 2003 à 2010) puisse prétendre disputer l’élection. Selon la loi dite de « ficha limpa » (casier propre) un condamné en deuxième instance est inéligible pendant au moins huit ans. M. Doria lui ne devrait pas être inquiété.

« Je veux voir le #prefake [le faux maire] avoir le culot de parler du Roi du peuple, Lula, et dire “les décisions judiciaires ne se discutent pas, elles s’appliquent” », commentait sur Twitter un certain@thiagoripol, rappelant les propos de M. Doria à l’encontre de Lula. « Vous avez déjà imaginé que João Doria pourrait ne pas être candidat et Lula oui ? Ce serait hilarant mais improbable », ajoute@Lennon1289 tandis qu’une kyrielle d’internautes raillait la ténacité avec laquelle l’ancien maire était parvenu à se détacher complètement de son étiquette « politique ». « Quel exemple de persévérance », ricane@testes_damassa.