Devant le Medef, Edouard Philippe fait la réclame de sa politique économique
Devant le Medef, Edouard Philippe fait la réclame de sa politique économique
Par Raphaëlle Besse Desmoulières
Le premier ministre s’est employé à rassurer le patronat échaudé par les annonces budgétaires.
Edouard Philippe, premier ministre, à la 20e université d'été du Medef, à Jouy-en-Josas (Yvelines), mardi 28 août. / Jean-Claude Coutausse/French-Politics pour "Le Monde"
A l’université d’été du Medef, à chaque premier ministre son style. Quelques mois après sa prise de fonctions en 2014, Manuel Valls avait lancé un tonitruant « J’aime l’entreprise » qui avait marqué les esprits. A l’ouverture de la 20e édition de cette rentrée patronale, mardi 28 août à Jouy-en-Josas (Yvelines), Edouard Philippe a fait plus sobre, mais le message se voulait le même sur le fond.
Pour sa première prestation devant ce parterre de patrons – il n’était pas venu en 2017 –, l’ancien maire du Havre s’est présenté en VRP de la politique économique menée depuis un an par son gouvernement. Un exercice seulement entrecoupé par quelques mots sur la crise qui a rattrapé l’exécutif depuis le matin : la démission surprise du ministre de la transition écologique et solidaire. « J’ai aimé travailler avec Nicolas Hulot, j’ai appris beaucoup de choses », a glissé M. Philippe, sans rien laisser paraître. Juste une parenthèse, presque comme si de rien n’était, avant de prendre son temps pour égrener les mesures probusiness prises par son équipe ministérielle. Sans annonces nouvelles dans sa besace, il s’est surtout longuement employé à cajoler son auditoire.
Le premier ministre était attendu après les mesures budgétaires dévoilées ces derniers jours qui ont brouillé la communication gouvernementale. Dans une interview au Journal du dimanche, le 26 août, M. Philippe avait, en effet, indiqué que son gouvernement n’aurait pas recours à une « mesure brutale de transfert vers les entreprises » du financement des arrêts maladie de courte durée, en débat cet été. De quoi rassurer les chefs d’entreprise pour qui un tel dispositif faisait office d’« énorme chiffon rouge ». A lire l’entretien, les intéressés avaient également compris que les entreprises ne seraient pas mises à contribution pour boucler le budget 2019.
« Très mauvais signal »
Mais dès le lendemain, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, avait surpris en annonçant plusieurs mesures visant spécifiquement les sociétés dont le report d’un allégement de cotisations patronales de quatre points pour les salariés au niveau du smic du 1er janvier au 1er octobre 2019. De quoi rafraîchir l’ambiance. En introduction, le nouveau président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, ne s’est pas privé de souligner, sous les applaudissements, « le très mauvais signal » envoyé. « Certes, nous ne sommes pas revenus aux temps que nous avons connus du zig et du zag mais la stabilité, c’est en soi une politique fiscale probusiness », a lancé le successeur de Pierre Gattaz.
Ce dernier a cependant rappelé la volonté du gouvernement de redonner de la confiance aux entrepreneurs par plusieurs réformes dont celle du code du travail, le projet de loi avenir professionnel ou encore la suppression d’une « anomalie française, la surtaxation du capital ». Le nouveau numéro un du Medef a également voulu imprimer sa marque, appelant ses troupes « à se saisir de ces réformes pour les utiliser à plein » et à « être capable de renvoyer la balle sur la fiscalité du capital et d’investir dans les entreprises ». S’adressant au chef du gouvernement, M. Roux de Bézieux a assuré : « Nous prendrons notre part au redressement du pays quand les outils nous seront donnés. » Et de lancer, en référence aux propos de M. Valls : « Monsieur le premier ministre, nous préférons les preuves d’amour aux déclarations d’amour. »
Edouard Philippe ne les a pas nommées ainsi, mais il les a soigneusement listées : à celles citées par M. Roux de Bézieux, il a ajouté l’impôt sur les sociétés « ramené de 33,3 % à 25 % d’ici 2022 », la suppression des cotisations salariales sur les heures supplémentaires, la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi en baisse pérenne de cotisations sociales ou le projet de loi Pacte… Des mesures qui ne sont des « cadeaux » faits aux entreprises mais des réponses aux « besoins » exprimés par celles-ci.
Le premier ministre a également défendu les choix budgétaires annoncés par M. Le Maire, affirmant qu’il ne s’agit pas d’« une forme de zigzag » : « Nous mettons en œuvre les choses sérieusement, au regard de la croissance dont nous disposons », s’est-il justifié. M. Philippe, qui devait entamer mercredi une série de rencontres avec les organisations syndicales et patronales sur l’agenda social à venir, a conclu son propos sur les deux thématiques qu’il entend voir abordées : l’assurance-chômage, pour « faire en sorte qu’il soit toujours plus intéressant de revenir vers le travail, toujours et de façon systématique » et la santé au travail, en s’attardant longuement sur la question du financement des arrêts maladie. Une façon de rappeler que s’il a écarté un transfert « brutal » vers les entreprises, il entend que des solutions soient trouvées.