Christie’s expose des tableaux de la collection Barney A. Ebsworth
Christie’s expose des tableaux de la collection Barney A. Ebsworth
Par Harry Bellet
A Paris, la maison de vente aux enchères présente quelques chefs-d’œuvre acquis par l’homme d’affaires.
Le collectionneur Barney A. Ebsworth chez lui, avec en arrière-plan le tableau d’Edward Hopper, « Chop Suey » (1929), et à gauche, un détail de l’œuvre d’Arshile Gorky, « Good Afternoon, Mrs. Lincoln » (1944). Phorographié par Brian Smale. / 2018 THE ARSHILE GORKY FOUNDATION / HEIRS OF JOSEPHINE HOPPER / ARTISTS RIGHTS SOCIETY, NEW YORK
Il y a des coïncidences amusantes : François Pinault possède, entre autres, une compagnie de croisière et la maison de vente aux enchères Christie’s. Barney A. Ebsworth (1934-2018) possédait aussi une compagnie de croisière et les tableaux qu’elle lui a permis d’acquérir seront vendus chez Christie’s. L’ensemble est estimé à environ 300 millions de dollars : cela tombe bien, c’est approximativement le prix d’un yacht de luxe.
Comme les employés de Christie’s connaissent leur métier, ils profitent de la Biennale de Paris (ex-Biennale des antiquaires, qui se tient du 8 au 16 septembre au Grand Palais) et des amateurs d’art fortunés qu’elle draine, pour exposer dans ses locaux de l’avenue Matignon une sélection des choix de Barney A. Ebsworth. Des œuvres à dire vrai assez peu banales, à l’image de ces deux jeunes femmes devisant autour d’une table de restaurant. C’est Chop Suey, peint par Edward Hopper en 1929. Date du krach de Wall Street ou pas, on en attend 70 millions de dollars.
Le reste de la collection est dans une gamme de prix moins élevés (quoique, 60 millions de dollars, même pour un des derniers Woman, de De Kooning, encore disponible, cela ne relève pas des achats spontanés), mais révèle un bel œil, sans gros moyens à l’origine – Barney A. Ebsworth a commencé à collectionner en 1957, après une visite au Louvre, endroit dangereux comme chacun sait – et un goût prononcé, mais pas anormal pour un natif de Saint-Louis (Missouri), pour l’art moderne américain.
Autodidacte et pragmatique
Autodidacte en la matière, mais pragmatique, il fit comme bon nombre d’amateurs fortunés de son pays : il prit rendez-vous avec le conservateur du musée local, pour s’informer. Charles Buckley, directeur du musée de Saint-Louis, tenta de l’orienter tout d’abord vers les impressionnistes – ils devaient manquer à ses collections et le professionnel qu’il était espérait bien une future donation – mais Ebsworth les trouvait au-dessus de ses moyens. L’école de Paris de l’entre-deux-guerres ? Trop cher aussi. Leurs homologues américains, par contre, n’étaient pas encore à la mode.
Charles Sheeler, Stuart Davis, Charles Demuth, Joseph Stella formèrent ainsi le noyau d’une collection très bien choisie, auxquels il adjoignit le Hopper, mais aussi Georgia O’Keeffe, qui devint une amie (il possédait d’elle notamment un dessin, portrait du peintre afro-américain Beauford Delaney qui est une petite merveille) et, plus tard, la nouvelle génération, le De Kooning, un Pollock, un Kline, un Joan Mitchell. Une sélection de ses choix fait donc une courte halte à Paris, visible – gratuitement – jusqu’au 9 septembre. Elle ira ensuite à Hongkong, San Francisco et Los Angeles, avant que la collection ne soit dispersée à New York, au mois de novembre.
« An American Place: The Barney A. Ebsworth Collection », Christie’s, 9, avenue Matignon, Paris 8e. Jusqu’au 9 septembre. www.christies.com