Croquis de Wojciech Janowski, au procès Pastor, le 17 septembre à Aix-en-Provence. / BENOIT PEYRUCQ / AFP

L’histoire se dessine déjà là, dans la première apparition de cette troupe hétéroclite d’accusés qui, à des degrés divers, ont pris part à l’affaire Pastor, du nom de la richissime Monégasque assassinée avec son chauffeur à la sortie d’un hôpital à Nice le 6 mai 2014. Son gendre cravaté aux cheveux blancs, Wojciech Janowski, élégant dans un costume gris clair, qui décline son identité de « gérant de sociétés » mais tient devant la cour d’assises des Bouches-du-Rhône le premier et le plus mauvais rôle, puisqu’il est accusé d’être le commanditaire du double assassinat.

« Je suis innocent, je n’ai commis aucun crime, c’est tout », dit-il d’une voix forte. Il partage le box et la ligne de défense de Samine Said Ahmed, un voyou marseillais originaire des Comores, que l’accusation désigne comme le tireur. « Je conteste tout », énonce celui sur lequel pèsent à la fois les images de vidéosurveillance et l’identification de son ADN sur un malencontreux flacon de douche oublié le mauvais jour au mauvais endroit.

Le coach et le « guetteur »

« Je confirme l’intégralité de mes propos et je plaide coupable », déclare en revanche l’ancien coach sportif Pascal Dauriac, visiblement très abattu, qui a reconnu avoir accepté de servir d’intermédiaire pour trouver les exécutants du double assassinat, en affirmant avoir agi sous l’emprise et les ordres de Wojciech Janowski. Par précaution, les policiers l’ont fait asseoir à l’autre extrémité du box, le plus loin possible de celui qu’il accuse.

Al Haïr Hamadi, qui a reconnu avoir servi de « guetteur » et qui a longuement détaillé pendant l’instruction le rôle de recruteur de tueur qu’il avait joué, confirme ses rétractations sur ce dernier point. « Ma position est celle de ma dernière version », comme il dit. L’ancien gendarme bénévole Salim Youssouf, celui-là même dont Al Haïr Hamadi a confié pendant l’enquête qu’il l’avait « lâché » la veille du meurtre, l’obligeant ainsi à chercher nuitamment un remplaçant pour tirer, veut bien reconnaître sa participation à l’association de malfaiteurs mais refuse la complicité d’assassinat qui pèse sur lui.

De tous les accusés détenus, Abdelkader Belkhatir semble le plus anéanti, peinant à s’exprimer. « C’est une affaire qui me dépasse tellement… », souffle celui que Pascal Dauriac a sollicité et financé pour le mettre en relation avec des exécutants.

« J’suis pas un tueur, chacun ses projets »

Les autres personnages de cet improbable casting comparaissent libres. Une jeune avocate polonaise au chignon blond relevé sur la nuque, en jupe et veste de tailleur noires, voisine avec le voyou marseillais sexagénaire Francis Pointu, qui a une déjà longue carrière de détenu derrière lui. La première, nièce de Wojciech Janowski, s’est chargée à sa demande de faire passer des enveloppes – 60 000 euros – au second pour qu’il fasse un faux témoignage chez le juge d’instruction en faveur de son oncle et à la charge de Pascal Dauriac, qu’il avait croisés tour à tour en détention.

Omer Abale Lahore, sur lequel pèsent aussi les déclarations d’Hamadi, prend résolument ses distances. Ce Marseillais originaire de Côte d’Ivoire considère qu’il a déjà assez de soucis avec la justice pour ne pas en rajouter. « Je reconnais pas. Bien qu’on est tous du même quartier, j’suis pas un tueur, chacun ses projets », tranche-t-il. Quant à Anthony Colomb, auquel Hamadi a aussi demandé de l’aide, il assure avoir « juste voulu rendre service à un ami », sans savoir de quoi il s’agissait.

De cette première journée d’audience, lundi 17 septembre, on retient encore le visage ébahi et heureux de l’homme que le tirage au sort a désigné en premier pour rejoindre la cour en qualité de juré et vivre les cinq semaines de ce procès. On le comprend.