Niamey annonce l’expulsion d’une employée de MSF pour « manipulation d’informations »
Niamey annonce l’expulsion d’une employée de MSF pour « manipulation d’informations »
La pédiatre s’était alarmée dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux de la forte mortalité infantile dans le sud du pays.
Un bébé souffrant de malnutrition et du paludisme dans un centre de l’ONG Médecins sans frontières à Guidan-Roumdji, dans le sud du Niger, en avril 2010. / BOUREIMA HAMA / AFP
Les autorités nigériennes ont annoncé, mercredi 3 octobre, l’expulsion d’Anne Pittet, une pédiatre employée par la branche suisse de Médecins sans frontières (MSF) et installée à Magaria, dans le sud du Niger, où elle s’est récemment alarmée des taux de mortalité infantile dus à la malnutrition et au paludisme.
« Le motif [de son expulsion], c’est une vidéo dans laquelle elle a manipulé des informations, en rapportant qu’à Magaria il y a dix décès par jour, soit 298 à 300 décès par mois », dus à la malnutrition et à un pic de paludisme, a expliqué à l’AFP le ministre nigérien de la santé, Idi Illiassou. Il se trouvait à Magaria, une préfecture nigérienne où est installée l’ONG. « On est venu vérifier avec le responsable de MSF-Suisse pour le Niger […] et tout ce qu’elle a dit est faux », a-t-il martelé.
La pédiatre a « déjà quitté Magaria, le temps qu’on lui trouve un avion, aujourd’hui ou demain », pour quitter le pays, a assuré le ministre mercredi.
« Dix décès par jour en moyenne »
Dans une vidéo d’un peu plus d’une minute tournée à Magaria et diffusée sur les réseaux sociaux, la docteur Pittet affirmait notamment : « C’est impressionnant, [les patients] arrivent par wagons, tous plus mal les uns que les autres. […] 298 décès en un seul mois, ça veut dire dix décès par jour en moyenne. […] Moi, je n’ai jamais vu autant de décès de ma vie. »
MSF-Suisse « va continuer à travailler » au Niger, a assuré le ministre, « parce que ses responsables ont affirmé » que l’employée « n’a pas agi au nom » de MSF.
Dans un communiqué publié le 25 septembre, l’ONG avait déclaré que « depuis plus d’un mois » ses équipes de soins pédiatriques « [luttaient] contre des taux de mortalité alarmants chez les enfants de moins de 5 ans à Magaria ». Au cours du mois dernier, elle comptabilisait « une moyenne de dix décès d’enfants chaque jour », selon une porte-parole de l’organisation à Genève. Ces enfants souffrent de complications dues à des formes graves de paludisme ou de malnutrition, a noté MSF.
Les autorités nigériennes avaient fermement démenti ces chiffres. « De janvier 2018 à mi-septembre, les formations sanitaires du district de Magaria ont eu à notifier 67 décès dus au paludisme », a affirmé Djermakoye Hadiza, la responsable du programme gouvernemental de lutte contre le paludisme. Pour tout le pays, un total de 1,36 million de cas a été enregistré de janvier à mi-septembre, avec 1 584 décès, et plus de 2,2 millions de traitements ont été placés dans les établissements sanitaires, avait-elle précisé, ajoutant que des patients venaient du Nigeria pour « se faire traiter » au Niger.
En juillet 2008, Niamey avait déjà mis fin aux activités de MSF-France dans la région de Maradi (centre-sud), où sévissait une crise alimentaire sévère consécutive à la sécheresse et à une invasion de criquets pèlerins.