Lors de la manifestation du jeudi 4 octobre à Washington en protestation contre la nomination du juge Kavanaugh à la Cour suprême. / ALEX WONG / AFP

Le juge Brett Kavanaugh n’est plus qu’à un vote d’accéder à la Cour suprême des Etats-Unis. Les sénateurs américains ont voté, vendredi 5 octobre, à 51 voix contre 49 la clôture du processus de nomination. Cette formalité est un préalable à la confirmation du juge, accusé d’agressions sexuelles. Ce vote limite ainsi à trente heures la durée des débats sur la candidature de Brett Kavanaugh, avant le vote final qui devrait donc intervenir ce week-end.

L’issue de ce vote reste cependant incertaine. La majorité des Républicains au Sénat (51 contre 49) est très courte et trois de ses membres n’ont pas encore fait connaître leur position. Il n’existe pour l’heure aucune garantie sur le fait que les sénateurs ayant voté pour l’accélération du processus de confirmation votent également pour la nomination de M. Kavanaugh.

La sénatrice républicaine du Maine, Susan Collins, qui a voté pour ce vendredi, a ainsi déclaré qu’elle annoncerait sa décision pour le vote final dans l’après-midi. Toujours indécis sur son choix final, le sénateur démocrate de Virginie-Occidentale, Joe Manchin, a également voté pour lors de ce vote de procédure. La sénatrice républicaine de l’Alaska, Lisa Murkowski, a pour sa part voté contre.

Donald Trump se dit « confiant »

Mais la Maison Blanche s’est dite « confiante » sur l’issue du scrutin. En meeting dans le Minnesota, Donald Trump a même estimé jeudi soir que l’affaire Kavanaugh, qui tient les Américains en haleine depuis plusieurs semaines maintenant, était de nature à mobiliser l’électorat républicain à l’approche des élections parlementaires du 6 novembre.

« Il suffit de regarder les sondages des trois ou quatre derniers jours pour voir que [la] résistance [des démocrates], alimentée par la colère, est en train de se retourner contre eux comme jamais », a lancé le président américain, conforté par un rapport du FBI qui ne confirme pas les accusations portées contre M. Kavanaugh.

Brett Kavanaugh, un brillant magistrat, héraut des valeurs conservatrices, était en bonne voie d’être confirmé, quand une femme – Christine Blasey Ford – est sortie de l’ombre à la mi-septembre pour l’accuser d’une tentative de viol remontant à une soirée entre lycéens en 1982. Lors d’une audition suivie par 20 millions d’Américains, Christine Blasey Ford, une universitaire de 51 ans, s’est dite sûre « à 100 % » d’avoir été agressée par le jeune Kavanaugh. Le magistrat s’est dit tout aussi certain de son innocence.

Confronté à deux vérités irréconciliables, le Sénat avait, sous la pression d’élus indécis, demandé un complément d’enquête au FBI, qui a rendu son rapport confidentiel mercredi soir à la Maison Blanche. Les sénateurs ont pu en consulter une copie jeudi dans une salle fermée. Les Républicains en sont sortis ragaillardis, les Démocrates frustrés.

Il n’y a « rien » de nouveau dans ce rapport, « cette enquête n’a trouvé aucune trace de comportement inapproprié », a estimé le chef républicain de la commission judiciaire du Sénat, Chuck Grassley. « Espérons que dans 48 heures, nous aurons un nouvel arrivant à la Cour suprême », a-t-il ajouté.

« Ce qui est notable avec ce rapport, ce n’est pas ce qui est dedans, mais ce qui n’y est pas », a rétorqué la sénatrice démocrate Dianne Feinstein, dénonçant une enquête « incomplète », probablement « contrainte » par la Maison Blanche.

Ce processus de confirmation du juge conservateur continue de susciter de très vives réactions. Des milliers de militants se sont retrouvés jeudi à Washington sur la colline du Capitole, où se dressent face à face la Cour suprême et le Congrès, en brandissant des pancartes barrées des messages : « Ne trahissez pas les femmes, votez non ». Plus de 300 manifestants ont été interpellés, y compris la comédienne Amy Schumer, cousine du leader démocrate au Sénat, Chuck Schumer, et le mannequin Emily Ratajkowski.

La haute cour est l’arbitre des questions de société les plus épineuses aux Etats-Unis : peine de mort, droit à l’avortement, lois sur les armes à feu, mariage homosexuel… L’entrée de Brett Kavanaugh, 53 ans, en son sein, placerait les juges progressistes en minorité pour de nombreuses années.