Le rendez-vous était prévu de longue date, mais il a pris une tournure particulière. Dimanche 21 octobre, La République en marche (LRM) réunissait à Paris son « conseil », sorte de « parlement » du mouvement présidentiel. La rencontre s’est muée en moment d’adieux pour Christophe Castaner, devenu cette semaine ministre de l’intérieur. Une nomination qui l’a conduit à quitter son poste de délégué général du mouvement.

Le bureau exécutif de LRM a désigné Philippe Grangeon, communicant proche d’Emmanuel Macron, en attendant la désignation du prochain chef du parti le 1er décembre. Une échéance qui était dans toutes les têtes, dimanche. « Notre seul risque, c’est la division. (…) Il n’y a pas de destin individuel en politique, il n’y a que des réussites collectives », a prévenu Muriel Pénicaud, qui prenait la parole lors de la clôture du rendez-vous. La ministre du travail s’exprimait devant un parterre où les ambitions sont déjà nombreuses pour prendre la suite de Christophe Castaner.

« Nous devons être vigilants à ce que cette campagne éclair ne vienne, par des comportements, des initiatives, des propos à l’emporte-pièce, abîmer l’image et la réputation de La République en marche », avait pour sa part prévenu, lors d’une déclaration à huis clos, Philippe Grangeon, dimanche matin.

Plusieurs candidats potentiels

Un seul candidat est officiellement déclaré : le député LRM des Français de l’étranger, Joachim Son-Forget. Ce dernier avait déjà présenté une liste concurrente à celle de Christophe Castaner l’an dernier, en vain. Dimanche, il a annoncé son intention de proposer qu’une coprésidente, issue de la société civile spécialiste des questions environnementales soit élue à ses côtés. Dans Le Journal du dimanche, Marlène Schiappa a, elle, confirmé « réfléchir à présenter [sa] candidature », estimant « incarner l’ADN du mouvement et une forme de renouvellement ».

Parmi les députés parisiens, plusieurs sont aussi sur la ligne de départ. Stanislas Guérini y « réfléchit ». « Il y a de l’envie », a-t-il confié au Monde dimanche midi. Dans une interview à Challenges.fr, Sylvain Maillard a détaillé, vendredi, sa vision d’une amélioration du fonctionnement du mouvement qui ressemble de très près à une déclaration de candidature.

Un seul des candidats putatifs a été cité, dimanche midi, à la tribune par Christophe Castaner pour son discours de bilan et d’adieux : Pierre Person, député de Paris, qui a aussi été son bras droit au mouvement. Ce dernier avait le matin même fait plusieurs annonces d’amélioration de la mécanique militante aux référents locaux d’En marche. « Une telle efficacité en trois jours, Pierre, je me dis qu’il était temps que je parte », a lancé à la tribune M. Castaner, entre réprimande et passage de relais. Si ses proches font déjà activement campagne pour lui, le député de Paris n’a toutefois pas formellement déclaré sa candidature. « Ce qui est important, ce sera le projet », a-t-il déclaré à la presse.

« Si nous doutons de nous, de la France, de l’Europe, nous nous affaiblissons »

Le prochain délégué général du mouvement aura fort à faire, dans un mouvement qui peine à se structurer. « Mille cinq cent marcheurs nous rejoignent chaque mois », a rappelé Christophe Castaner à la tribune. « Il faudra renouer le lien avec les territoires », a, pour sa part, déclaré Stéphane Travert aux journalistes. L’ancien ministre de l’agriculture, débarqué cette semaine du gouvernement, retrouvera bientôt son siège de député mais entend bien jouer un rôle important dans le mouvement. Il pourrait s’occuper d’entretenir le réseau des élus locaux soutiens d’Emmanuel Macron.

Tout le week-end, les « marcheurs » ont, par ailleurs, planché sur leur organisation et la définition de leur ligne idéologique. Samedi, ils organisaient un colloque sur le progressisme, mais un atelier organisé dimanche matin a rappelé que ce seul terme ne serait pas suffisant pour définir la ligne politique de La République en marche. « Il faut aussi trouver les mots dans lesquels les Français puissent se retrouver », a rappelé Claude Posternak, membre du bureau exécutif du mouvement à la tribune dimanche midi.

Dans ce contexte, à la fois dans le discours de Muriel Pénicaud et de Christophe Castaner, un mot est revenu, celui de « doute ». « L’autodénigrement est trop facile », a mis en garde le nouveau ministre de l’intérieur. « S’il faut analyser avec acuité les erreurs, il nous faut apprécier l’étendue du chemin parcouru ensemble », a-t-il insisté. « Le risque, c’est de douter de nous », avait déclaré avant lui la ministre du travail. Muriel Pénicaud avait alors invité les « marcheurs » à plutôt regarder en miroir ceux qui, à La France insoumise, « ne croient pas en la démocratie parce qu’ils ne respectent pas la séparation des pouvoirs, de la justice et des médias. C’est eux qui menacent la démocratie ! », a-t-elle affirmé en référence aux attaques de Jean-Luc Mélenchon, après les perquisitions qui ont visé LFI cette semaine.

« Si nous doutons de nous, de la France, de l’Europe, nous nous affaiblissons », a encore martelé Muriel Pénicaud. L’Europe, justement, sera l’un des enjeux du mouvement LRM dans les prochains mois à l’approche de la campagne des européennes. « L’échéance européenne doit être notre première priorité », a insisté M. Castaner. « Ne lâchez rien sur ce projet européen, (…) allez partout en France dans nos territoires, porter ce message d’espoir et d’exigence », a-t-il lancé. Une commission d’investiture pour désigner les candidats de la future liste LRM va se mettre au travail, présidée par Jean-Marc Borello, fondateur du groupe SOS et membre du bureau exécutif du mouvement.

Mais, dimanche midi, la question du futur délégué général occupait bien plus les esprits, comme l’expliquait un député membre du bureau exécutif du mouvement : « C’est dans 41 jours. Top départ. »