Roger Federer, lors de son quart de finale contre le Japonais Kei Nishikori, vendredi 2 novembre à Bercy. / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

A Bercy, les matchs de Roger Federer sont un événement autant sur le terrain qu’en dehors. Vendredi 2 novembre, comme la veille à l’heure de ses retrouvailles avec le public parisien, lui qui snobait la capitale depuis 2015, il n’y en avait que pour l’idole. Il n’y a décidément que le Suisse pour produire pareil effet, et il faut le voir pour le croire. Une entrée digne d’une rock-star, les 14 000 spectateurs debout pour l’ovationner et immortaliser chaque seconde de leur dieu vivant, smartphones greffés au bout des doigts, comme on observe religieusement une espèce en voie de disparition. Le Suisse a 37 ans et chacun sait trop bien que l’occasion ne se représentera peut-être plus.

Polo et bandeau rose pâle, short et chaussures marine, lui ne s’en laisse pas perturber. Y compris quand les « Je t’aime Rodgeur » et autres variantes de déclarations d’amour précèdent ses jeux de service. Les gestes sont toujours aussi gracieux, le revers toujours aussi cristallin, les déplacements parfaitement ajustés (admirez ces petits pas chassés…) et la volée rarement mal inspirée. Le tout ponctué d’une série de « woaaaaaaahhh » et « oh là là… ». Et quand le Suisse fait le break à 5-4 dans le premier set, s’ensuit une salve d’applaudissements.

Gare à ne pas abîmer l’icône

Mais gare à ne pas abîmer l’icône… Le malheureux Kei Nishikori ose un retour – involontaire – sur le corps ? Voilà le public qui lui réserve aussitôt une bronca. La menace est vite écartée et le premier set empoché en quarante minutes.

En face, son adversaire est loin d’être misérable, mais voilà. Quand le génie suisse est en marche, il n’y a pas grand-chose à faire. D’entrée de deuxième set, Federer prend les commandes et se détache 2-0. Malgré l’heure tardive, le sommeil ne guette pas les spectateurs et les salves de « Ro-dgeur » reprennent de plus belle, éteignant les rares encouragements adverses.

Vendredi soir, même le filet avait choisi son camp… Le Suisse livra un récital de coups gagnants et après une heure et dix-neuf minutes, l’affaire était pliée (6-4, 6-4). « C’était un match très solide, j’en attendais un car à Bâle [où le Suisse a remporté son 99e titre dimanche dernier], ça n’a jamais marché comme je le voulais. Aujourd’hui, aux moments importants, j’ai fait les bons choix, et c’est ce qu’il faudra faire aussi demain [samedi] si je veux battre Novak en demie », réagit Federer peu avant minuit, dans les coursives de Bercy.

Un peu plus tôt, Novak Djokovic avait obtenu son billet face à Marin Cilic (4-6, 6-2, 6-3). Le Serbe, qui n’a plus été battu depuis le 9 août, n’a pas montré le visage du « Djokosmic » de ces dernières semaines qui l’a vu enchaîner coup sur coup des victoires à Cincinatti, l’US Open et Shanghaï. Un service friable, des fautes directes inhabituelles chez lui et plusieurs moments d’agacement ont ponctué sa prestation. « [Cilic] a joué avec beaucoup de puissance, son service était très efficace, c’était une situation délicate pour moi », a-t-il reconnu, en français dans le texte.

« Je peux casser sa série »

La dernière fois que Djokovic et Federer se sont affrontés, le 19 août à Cincinnati, l’aîné n’avait pas existé. « J’espère mieux jouer car là-bas c’était terrible, j’avais sans doute livré le pire jeu de retour de ma carrière, analysait le Suisse avec le recul. Il est sur une méga lancée, mais je peux espérer casser sa série ici car à Roland on avait joué un match incroyable [en demi-finale en 2011, remportée par le Suisse 7-6, 6-3, 3-6, 7-6]. »

D’autant que comme il le répète depuis mardi, il s’est décidé à venir à Bercy à la dernière minute et avec peu d’ambition. « Je vais essayer d’aborder ce match de la façon la plus décontractée, je ne veux pas me mettre trop de pression. L’idée, c’était de venir jouer ici un ou deux matchs, trois maximum car je ne pensais pas que le physique ou le mental allaient suffire pour aller encore plus loin. Mais le forfait de Raonic [mercredi, au deuxième tour] a tout changé. » Désormais, Federer, à deux marches du 100e titre de sa carrière, a de la suite dans les idées.